OUI d'après notre ministre de l'Economie, de l'Industrie et de l'Emploi, Christine Lagarde, qui avait affirmé lors de l’ouverture du G20 en 2008 que « la finance conventionnelle doit s’inspirer des principes de la finance islamique » pour limiter les risques systémiques et les crises financières violentes telles que celle dite « des subprimes » qu’ont connue les Etats Unis et l’Europe. La spéculation, la titrisation à outrance n’auraient pas pu avoir lieu dans un modèle de finance qui impose aux banques le partage des risques, qui remet l’activité productive et l’économie réelle au cœur du système. C’est en cela que la finance islamique, dans ses principes et ses sa dimension éthique et solidaire peut servir de modèle d’inspiration pour redonner une dimension morale au capitalisme, le « civiliser » et repenser le capitalisme financier.
Source : Livre : Ethique & finance en islam ecrit par Isabelle Chapellière Ed. Koutoubia, nov 2009
Extrait du discours de Christine Lagarde, Ministre de l’Economie, de l’Industrie et de l’Emploi, prononcé lors du IIème Forum Français de la Finance Islamique, organisé à Paris par Secure Finance.
http://www.financeislamiquefrance.fr/useruploads/files/Discours_Europlace_jeudi_2_juillet_2009.pdf
La France, qui compte 6 millions de musulmans, a mis en place une législation visant à permettre l'émission de sukuk (**) et à développer une expertise dans le secteur financier islamique à l'image des autres grandes places financières européennes comme Londres. C'est une nouvelle manière d'élargir le nombre des épargnants potentiels.
Le Parlement a donné le feu vert aux obligations islamiques :
Le Parlement français a adopté une proposition de loi qui autorise l'émission d'obligations islamiques "sukuk", en dépit des protestations de l'opposition de gauche. Le texte présenté par la députée UMP Chantal Brunel a principalement pour objet de faciliter l'accès des petites et moyennes entreprises au crédit. Les députés ont adopté la proposition de loi telle que le Sénat l'avait votée le 9 juin. Le texte est donc définitivement adopté par le Parlement. Le texte oblige les banques mais aussi les organismes d'assurance à justifier leur désengagement si l'entreprise le demande. 17/09/09.
Comment expliquer l’intérêt que portent certains gouvernements européens, notamment la France, pour la finance islamique ?
Ces gouvernements européens ne sont pas nombreux actuellement : La Grande Bretagne. Quand à la Suisse, elle constatait début janvier 2011 "le difficile positionnement dans la finance islamique" : le secteur des banques de gestion privée dans ce pays enregistre peu de demandes pour les produits financiers compatibles avec la charia.
Dans un contexte de besoins importants de liquidités, la finance islamique peut être le moyen de financer des projets d’investissements de grandes entreprises (Total l’a déjà utilisée), de financer les projets des collectivités territoriales (le «Grand Paris», par exemple) par l’apport de capitaux issus des pays du Golfe notamment. Les 5 à 6 millions de musulmans présents en France pourraient constituer un marché de détail important pour des banques islamiques pour financer l’investissement immobilier des ménages et celui, productif, des petites entreprises, mais il semble que les gouvernements considèrent d’abord l’atout de cette manne financière dans la situation actuelle d’endettement massif des Etats et des collectivités locales.
La finance islamique pour le grand public : un développement possible en France ??
La possibilité pour des particuliers de souscrire en France à des produits financiers islamique remonte à mars 2008, avec le lancement par la BFCOI, filiale réunionnaise de la Société générale, du premier fonds chariah compatibles (*).
En février 2009, AGF commercialisait un contrat d'assurance vie, donnant accès à l'Allianz Global Islamic Fund Platform. Un produit charia compatible sous réserve de ne pas souscrire la garantie décès optionnelle du contrat, que le capital ne soit pas garanti contractuellement et que l'investissement se fasse dans des sociétés chariah compatibles
.En octobre 2010 a été accordé pour la première fois en France par la Bred, un prêt à l'habitat charia compatible pour l'achat d'une maison en région parisienne. L'opération a été réalisée par le biais d'un mécanisme d'achat-revente (Murabaha) consistant, pour la banque, à acheter le bien et le revendre ensuite au client. Une manière d'éviter le versement d'intérêts, prohibé par la loi islamique.
2011 devrait voir l’émission en France des premières obligations islamiques, les sukuk (**). Le premier emprunt islamique en France, ou sukuk, pourrait être émis au premier trimestre 2011, a affirmé Arnaud de Bresson, l'optimiste délégué général de Paris Europlace, à Zawya Dow Jones lors d'un forum organisé conjointement avec le Dubai International Financial Center. Paris Europlace est l'organisme chargé de la promotion des marchés financiers français et le DIFC, la place financière de Dubaï.
Mais pour l'instant, les débuts sont très calmes, et la mayonnaise aura du mal à prendre à moins que notre gouvernement décide de se lancer dans le financement de gros projets d'investissement par le biais du financement islamiste.
(*) Les produits financiers sont dits "charia compatibles" s'ils sont validés par un conseil de conformité éthique, tel en France le Comité Acerfi (Audit, conformité et recherche en finance islamique). Plusieurs mécanismes ou conditions permettent de contourner les interdits ou de se conformer aux principes énoncés.source: finances.orange.fr
Pour être "charia compatible", un produit doit répondre aux principes de la finance islamique, qui sont au nombre de cinq :
1) L'interdiction de l'intérêt (Riba) et de l'usure. Ce principe interdit le gain abusif et injustifié généré par une transaction déséquilibrée.
2) L'interdiction de l'incertitude (Gharar) et de la spéculation (Maysir). L'islam prohibe toute forme de contrat dans lequel le droit des parties contractantes dépend d'un événement aléatoire.
3) La règle du Haram ou des secteurs illicites. Sont ainsi proscrits les investissements dans les activités liées aux jeux de hasard, au tabac, à la pornographie, à l'alcool, à la filière porcine, à l'armement offensif ou encore à l'industrie des loisirs.
4) L'obligation du partage des profits et des pertes.
5) L'adossement à un actif tangible. La finance islamique impose aux investisseurs de s'engager dans l'économie réelle.
(**) Les sukuk sont des obligations islamiques liées à un actif sous-jacent à travers différents types de structures. Les Sukuk (pluriel de Sakk) sont les équivalents islamiques du financement obligataire pour les entreprises et les émetteurs souverains qui souhaitent se conformer aux principes de la Sharia.