A tous nos enfants qui ne sont pas nés.
A vous tous qui auriez pu naître,
Et qui ne vous êtes pas trouvés au bon endroit, au bon moment,
A vous tous trésors perdus dans l'immensité de l'inconnu,
A vous tous même pas débutés, sans passé, sans avenir,
A jamais ignorés, à jamais inimaginés, inespérés,
Vous êtes des non-pensés, non-regrettés, non-pleurés .
Qu'auriez vous pu être dans notre monde immonde ?
Peut-être ceux qui nous manquaient justement.
Ceux que l'on aurait dû attendre, réclamer et engendrer.
Ceux qui auraient mérité d'être là à notre place,
Capables de donner, aimer, transcender et conduire
Cette pauvre humanité vers un présent supportable.
Enfants non-conçus, non-nés, vous n'avez rien à regretter.
Votre non-sort, votre non-vivre est à envier et reconnaître.
Vous êtes tous les espoirs auxquels nous avons pu croire,
Toutes les attentes inutiles et les mirages vains et en vain,
Les horizons inatteignables, les rêves cassés, piétinés, défigurés.
Vous les gardez en votre néant toujours purs et inviolés.
Vous êtes sans jamais avoir été.
A nous tous dont les enfants ne sont pas nés
Nous les avons en nous intouchés, et sans fatalité.
Ils resteront un improbable fruit en leur éternité
Et jamais personne ne pourra les blesser, ni les prendre.
A jamais protégés, à jamais épargnés, c'est leur dû.
Ne connaîtront ni souffrance, ni mort, ni notre insuffisance.