Si je commence par questionner nos relations avec la Russie, c'est que j'y vois la survie de notre intelligence. Comme je vous le disais, j'y suis pour un mois et je l'ai habitée pendant cinq ans. Vous avez raison de dire que c'est notre partenaire naturel, pas notre ennemi, à cause de la continuité territoriale qui nous permet de faire Paris-Vladivostok sans quitter la terre. De plus, quand les frontières de l'Union soviétique se sont ouvertes au début des années 90, chaque Russe capable de voyager voulait se rendre à Paris, pas à Londres ni à New York.
En revanche, malgré les apparences, il se peut que les Etats-Unis soient nos faux-amis. Le rêve américain, c'est tout de même le cauchemar des populations que nos ancêtres ont décimées par millions. Et ce n'est pas un hasard si, chaque année, pour célébrer la rencontre des premiers migrants avec des tribus qui, dans un premier temps, les ont nourris, hébergés, les Etats-Unis immolent et mangent pour le Thanksgiving day des millions de dindes, comme s'ils expiaient à bon compte la liquidation des populations autochtones par le sacrifice d'animaux qui le sont tout autant.
De fait, l'inconscient collectif des wasp transmet la nostalgie et le ressentiment envers le pays qu'ils ont dû quitter et pousse leurs descendants à conquérir l'Europe. Depuis la fin de la dernière guerre, on nous bombarde culturellement, économiquement, comme on a pilonné Caen, Cherbourg, Brest, le Havre... pour nous "libérer" soi-disant d'un ennemi que la Russie avait déjà vaincu avec ses vingt-cinq millions de morts. Soixante ans plus tard, l'oncle Sam, dans son délire économique, veut évangéliser la planète. C'est à dire la mettre à genoux. Et nous, fascinés par la rapine que nos ancêtres ont transformée en dollars, sommes réduits à l'impuissance et laissons parler nos gouvernants comme des perroquets.
Par conséquent, pour leur salut aussi bien que pour le nôtre et celui de la terre entière, il faut que les Russes soient nos amis ! Je dis bien "les Russes", pas leurs dirigeants qui sont, comme presque partout, des opportunistes confondant leurs petits intérêts avec ceux de leurs compatriotes. Sans cet élan d'amitié, le risque est grand d'aboutir à une déflagration généralisée que nous ne voulons pas. Je vous l'ai entendu dire à des journalistes sourds dont les questions tournaient tristement autour de l'écume politique française.