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Billet de blog 29 septembre 2015

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Stanislas Rodanski, 1927-1981

« Je suis à pétrir avec les débris de mon ombre une substance poétique qui ne lèvera qu’après ma mort, me laissant dans le pétrin qui est un cercueil. » (Stanislas Rodanski)

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« Je suis à pétrir avec les débris de mon ombre une substance poétique qui ne lèvera qu’après ma mort, me laissant dans le pétrin qui est un cercueil. » (Stanislas Rodanski)

« Repéré par Julien Gracq et André Breton, Stanislas Rodanski (1927-1981) fait partie des marges du surréalisme, de ces figures extrêmes qui en posent naturellement les jalons. Ce recueil est constitué de poèmes écrits entre 1946 et 1952, presque tous inédits, qui offrent la découverte du poète après celle du Rodanski écrivain «surréaliste». Ici, il arpente en veilleur un territoire froid et nocturne. Dans son paysage intérieur sont dressées des phrases-lanternes auprès desquelles il revient pour relancer son discours et réchauffer sa flamme. Rodanski suit les mots tout en disant «je suis les mots», utilise les paradoxes et les antithèses pour forcer le langage, pour trouver la voie de l’être et le «cours de la liberté». Chez lui la folie est devenue une «vertu morale» et Rodanski se réclame du «fanal de Maldoror» tout en marchant dans les pas de Nerval. Son univers poétique s'étend du romantisme allemand de Novalis et de Hölderlin au panthéon surréaliste avec lequel il dialogue (allusions à Breton, Sade, Vaché, Jarry, ou Rimbaud) dans un style unique, cristallin, où pointe un humour noir et désespéré.»

LE DISCOURS DU GRAND SILENCE

Ô toi que brûle le feu inerte et froid de la nuit  

As-tu arrêté ta marche humaine   

En deçà du domaine des apparences étrangères ?   

As-tu écouté le discours du grand silence ?  

As-tu pénétré dans les contrées intermédiaires   

Surgies de la rumeur nombreuse des étoiles   

À travers les plaines terrestres ?        

Connais-tu la musique silencieuse des mers   

La sourde poussée des marées nostalgiques  

Qu’appelle l’éloquence du vide ?   

Connais-tu les accords de l’orgue du silence   

Qui planent au-dessus des eaux marines ?   

La mer est une grande force égarée   

On y retrouve confusément les fastes ténébreux  

De l’univers d’absence où s’affirmait la Volonté unique        

Le chant de l’horizon charmeur   

S’abolit à l’infini des paysages de beauté

Il vibre de l’horreur du vide   

Qui entraîne l’humaine nature vers une mystérieuse destinée   

Par la force du désir qu’éveillent les lointains indécis  

Dans l’esprit de l’homme frappé de vertige        

La voix d’outre-mer qui proclame le Verbe du Silence   

Glisse dans le cœur des jeunes héros dévorés d’attente  

Les merveilleuses syllabes de l’amour  

Il s’affirme en une Volonté immense et calme   

Dirigée dans le sens du destin   

Étale comme l’eau des océans   

Qui reflète les ténèbres accueillantes   

De la mort radieuse   

Où s’accomplit en l’éternité   

La mystique aventure des amants        

De par-delà les Univers   

De par-delà la nuit   

La Vacuité du Néant appelle à l’infini  

L’Absolu qui s’affirme à travers le chaos

Stanilas Rodanski, Je suis parfois cet homme (Gallimard Poésies).

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