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Billet de blog 31 décembre 2015

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Déchéance de la nationalité : le retour de l'imaginaire colonial?

Voici un mail, écrit à des amis, à propos du projet de déchéance de la nationalité. Et que, après reflexion, je souhaite partager avec tous ceux qui voudront bien débattre et, plus encore, aider à sortir de ces mauvaises ornières de fin d'année.

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Chères, chers ami(e)s; je vous fais suivre cette pétition à l’heure où un gouvernement dit de gauche, par pure stratégie politique à court terme, instrumentalise l’une des valeurs fondatrices de notre vivre ensemble, le droit du sol. Français, nous le sommes dès le premier jour, et souvent nos ancêtres ont donné assez de leur peine et de leur sang, comme tout autre citoyen français, pour la construction et la défense de notre pays. La construction de la mosquée de ¨Paris( avec minaret, eh oui) a été entreprise en hommage aux 100000 soldats des”colonies” morts pour la France. Serons-nous à nouveau des citoyens de seconde zone, suspects de non francité suffisante? Ou bien cette mesure que l’on veut introduire dans la loi fondamentale vient-elle, une fois encore, démontrer combien une part de notre élite joue régulièrement avec l’Histoire de notre pays( hier le ministère de l’identité nationale, la loi vantant les bienfaits de la colonisation, aujourd’hui ce projet), oubliant sciemment les différentes étapes qui ont construit ce pays. La France, qu’on le veuille ou non, doit faire sienne aussi bien ce qu’il est convenu d’appeler ses racines chrétiennes, que ses héritages issus de sa période coloniale. C’est l’Histoire. Les racines sont multiples, le tronc est commun. Le terrorisme est abject et il atteint son objectif quand il divise les Français, quand il jette la suspicion sur la communauté dite musulmane( dont beaucoup de sociologues doute de l’existence homogène). Et je le dis en tant que non pratiquant pour lever toute suspicion de prosélytisme.

A-t-on laissé dériver ici ou là les valeurs de la République, l’adhésion à ces valeurs? Y a-t-il , comme on dit, des territoires perdus la République? Si oui, qui les a laissés dans cet état de perdition? Y a-t-il un pacte civique à renouer? Y a-t-il des endroits où la misère a atteint un tel niveau que les conditions mêmes la pensée, du désir de s’élever par la connaissance, de s’affranchir des pesanteurs sécrétées par le repli dans le groupe blessé, ne sont plus réunies? On le voit, aborder ces questions peut se faire en dehors de toute arrogance, de tout tabou, de toute stigmatisation : c’est un exercice difficile et passionnant qui demande que nous nous penchions sur les connaissances sociologiques, politiques, issues des sciences de l’éducation, psychologiques, qui ont exploré de ces problématiques. Alors nous pourrons rappeler que l’identité est un concept dynamique, surement pas statique; elle est un processus, s’étayant sur la rencontre avec l’autre. Elle est faite d’errance, d’ erreurs, et de réussites. Et bien sûr d’après coups. Vivre ensemble, c’est apprendre en effet à se connaitre et à dépasser ses origines sans les renier. Et ce rassemblement ne peut se faire qu’autour d’un idéal fort, authentiquement incarné par la nation et ses gouvernants. L’autorité est autre chose que le caporalisme de M Valls qui, hier encore, nous demandait de faire barrage au FN et qui, aujourd’hui, nous insulte en nous accusant de faire son jeu. La déchéance de nationalité est assurément une mesure symbolique, mais symbole de quoi sinon d’un retour du refoulé nauséabond que m Valls dénonçait il y a cinq ans. Disons-le franchement, sans avoir peur de nous confronter au reproche de complaisance dans la victimisation dans lequel on a coutume de nous enfermer pour éviter le débat de fond, disons-le donc comme on brise un tabou : le projet de modification de la constitution vise les citoyens “d’origine arabo-musulmane” en priorité; voilà pourquoi il plait tant au FN et à tous ces élus nostalgiques de l’Algérie Française. Sans le savoir peut-être( ou pire, le sachant..) il renoue avec l’ancien code de l’indigénat qui refusait toute citoyenneté véritable aux Algériens ( ce mot lui-même était tabou, on lui préférait donc Indigène ou Arabe), bafouant au  passage la devise de la République dont les valeurs s’appliquaient uniquement aux citoyens blancs. Cela est triste, cela est vrai. Sait-on combien Messali el Hadj( qui connait encore ce nom?) n’ a eu de cesse de demander aux gouvernants de l’époque une reconnaissances des Algériens dans la citoyenneté française, une autonomie dans la République? Réponse : des années de prison, puis la marginalisation de Messali au profit de la lutte violente du FLN. Je m’aperçois que je voulais faire passer un message, et, qu’à mon tour, j’écris ce mail bien long que vous me pardonnerez. C’est sans doute que j’ai trop mal en découvrant le projet du gouvernement qui m’incite à crier( avec civilité, par les temps qui courent, il vaut mieux) : quand donc reconnaitra-t-on notre existence, notre contribution? A partir  de quand ne serons-nous plus reconductibles à la frontière (pour ma part, je n’ai remis les pieds qu’au décès de ma mère en Algérie, après 34 ans d’absence)? Sommes-nous d’éternels exilés, en sursis de nationalité?

Comme toujours, ce que vit un sous-groupe, dont on fait à l’occasion un bouc émissaire, en dit long sur l’époque et les processus en cours dans la société et ses élites. Nous voici en situation de devoir dire, puisque cela n’irait pas de soi, le fond de nos convictions. Levons donc tout malentendu. Oui, il faut combattre avec la plus grande force le terrorisme, le wahhabisme. Oui, il faut s’attaquer aux prêcheurs de haine d’où qu’ils viennent, dans les mosquées, mais aussi dans les partis politiques etc..Oui, il faut défendre la laicité et faire en sorte qu’avance la sécularisation des populations dites “musulmanes”. Lire J Baubérot sur ce sujet donne de précieuses pistes. Et mieux même que la nationalité, il faut s’attaquer à ce qui nourrit la violence : d’abord le chômage; mais aussi le sexisme qui a trop souvent cours dans les “cités”( mais pas seulement) et dont sont trop souvent victimes les jeunes filles, menacées, empêchées d’aller en cours d’éducation physique, à la piscine, puis plus tard em^pêchées d’études. La condition des femmes n’a jamais été très reluisante dans les trois monothéismes. C’est le devoir de l’Etat de limiter la prétendue liberté de croire quand elle est attentatoire à des principes universels( ici, l’égalité homme femme). Veut-on vraiment mener ces combats     avec force et sans stigmatisation? Ou veut-on agiter les hochets de la haine sans s’ attaquer aux véritables questions?  Ces combats sont pourtant conformes à nos valeurs, et visent chaque citoyen, quelles que soient ses origines. Les mener demande de la détermination, un accord profond avec les valeurs républicaines, de la modestie. Loin de tout sensationnel. Oeuvrer en somme à l’égalité de fait de tous, devant le travail, devant l’éducation, devant l’altérité fondamentale qu’est la différence des sexes. En pleine accord, en somme, avec notre constitution telle qu’elle est. L’autorité, dont on se plaint trop du déclin, ne se rétablit pas par le caporalisme. Mais par l’adhésion du plus grand nombre. Cette adhésion nait quand les valeurs sont incarnées avec authenticité, quand la Nation est sourcilleuse du sort qui est fait à chacun. Alors, celle-ci, à son tour peut demander, avec de grandes chances d’être entendue, l’effort et le devoir de tous. L’autorité procède sinon de l’amour, du moins du respect de chacun. Elle n’élude pas le conflit, elle contribue à le résoudre. Ensemble, sans passage en force, sans évitement du débat, sans faiblesse de la pensée. Et la pensée n’est rien quand elle ne s’adosse pas à l’histoire des idées et des personnes. 

C’est avec les valeurs issues des Lumières qu’il faut combattre ce projet attentatoire à celles-ci. Daech veut que les”musulmans” quittent l’Europe et rejoignent le “califat” Le sait-on? Ce serait lui donner raison. Le FN veut la même chose, même s’il police ( un peu) son discours. On voit fleurir le nom des généraux putschistes OAS d’Alger dans les villes du Sud de la France..retour du refoulé..Ceux-la même qui s’accommodaient du système colonial et de ses abjections.

Il faut cesser d’instrumentaliser l’offense qui a été faite à chacun de nous par les actes violents dont a été victime notre pays. Nous ne sommes pas d’éternels immigrés ni d’éternels colonisés. Nous sommes Français et ce n’est rendre service à personne que de jeter la suspicion sur ce fait intangible. C’est pousser les plus jeunes, démunis, et privés de l’horizon de l’appartenance, dans le pire pour venir ensuite le leur reprocher. Or, ces plus jeunes, ont besoin de nous. Nous ne pourrons exercer notre fermeté à leur endroit que s’ils ont la conviction qu’ils sont traités comme tout citoyen français, sans délit de faciès, sans préjugé de lieu de domicile quand ils sont en quête d’un travail. ILs sont les première victimes de la désespérance qu’instrumentalise le wahhabisme.

Sans rire, je suis Français de souche, si l’on admet que souche n’équivaut pas à être blanc et assimilables à la “communauté” chrétienne. Français, par Locke, Voltaire, Hugo, et 1789. Français par l’Algérie occupée et toute l’histoire de France, car il n’est pas question de ne m’identifier qu’à la période concernant mes ancêtres. Français par ma vie ici et ma petite contribution au vivre ensemble  Depuis le début. Ni meilleur ni pire que les autres. Français par ce que demande le combat présent, face à tous les obscurantismes.  Par bonheur de l’être. Par devoir. Par droit. Pour la liberté, l’égalité et la fraternité. Pour que le fin d’année soit, s’il se peut, un peu plus douce, plus vraie. N Ben Bachir

From: Change.org

Sent: Wednesday, December 30, 2015 2:43 PM

To: nourredineb@orange.fr

Subject: Diviser les Français

Bonjour Nourredine,

Cette pétition prend de l'ampleur sur Change.org, nous pensons que vous souhaiteriez peut-être la signer :

Déchéance de nationalité : ne pas franchir la ligne rouge...

Sam KHEBIZI
MARSEILLE, France

Signez la pétition

Je m'appelle Samir, Sam pour mes proches. J'ai 43 ans, je suis français. Je suis né et j'ai grandi à Marseille. Je dirige une association artistique et suis très engagée dans la vie locale. J'ai raconté mon témoignage dans une lettre ouverte adressée au président Hollande qui a été publiée par le journal Libération (Lettre ouverte à Hollande).

Comme des milliers de citoyens français, au delà même des binationaux dont je fais partie, je me sens atteint par une mesure aussi inefficace que dangereuse. Je dénonce toute forme de terrorisme. Pour autant je n'accepte pas l'instrumentalisation politique qui en est faite par le gouvernement. Je n'accepte pas l'amalgame crée entre la nationalité  et le terrorisme. Je n'accepte pas la division des français en catégories.

Que cache réellement la réforme constitutionnelle relative à la déchéance de nationalité ? Annoncé comme un outil supplémentaire de lutte contre le terrorisme, le texte propose, entre autres, de déchoir un Français (même né en France) de sa nationalité française en cas de crime ou délit constituant un acte de terrorisme dans le cas où ce même Français possèderait une seconde nationalité.

Les problèmes que posent ce texte sont les suivants :

1)      Une mesure inefficace. De l'aveu même du gouvernement, c'est une mesure "symbolique", qui ne protègera en aucun cas de nouvelles attaques. La nationalité n’a rien avoir avec le terrorisme et il n’existe pas de passeport "franco-terroriste" à ce jour. L'arsenal des nombreuses mesures anti-terroristes est déjà largement suffisant pour répondre à cette menace.

2)      Une mesure discriminatoire. Cette mesure remet en cause le principe de droit du sol et porte atteinte, dans la Constitution, à notre vision historique de la Nation française, une et indivisible. Binational ou pas, tout citoyen français attaché à nos valeurs fondamentales se doit de s’insurger contre une telle réforme. Notre diversité culturelle souffre bien assez de discriminations dans la réalité quotidienne pour qu’on s’autorise à les inscrire dans la Constitution.

3)      Une mesure stigmatisante. Ce texte est une insulte à l’ensemble des binationaux vivant en France ou à l’étranger, soit plus de 3 millions de personnes, en faisant de leur double culture un facteur de risque plutôt que de richesse. C’est aussi une mesure hypocrite parce qu’en réalité elle vise plus particulièrement les binationaux de confession musulmane qui ont déjà bien assez de soucis avec les amalgames du fait d’une infime minorité d’extrémistes radicaux.

4)      Une mesure digne de l'extrême droite. Il est inadmissible, inconcevable que le gouvernement actuel puisse faire voter un texte porté de longue date par le Front National et la droite extrême. Il y a des limites au n’importe quoi. Un gouvernement socialiste ne peut pas, et surtout ne doit pas voter une mesure FN.

5)     Une constitution doit unir et non diviser. On ne révise pas une constitution en plein état d'urgence, dans l'émotion ou le calcul politique. Le simple fait que cette mesure crée de la division justifie son retrait.

Je demande donc au gouvernement le retrait de cette mesure.

Au-delà de la signature de cette pétition et son relais, je vous invite à interpeller votre entourage mais également l’ensemble des députés sur cette mesure qui risque d’être votée dans le plus grand désintérêt. Le changement d'attitude face à ce séisme politique doit commencer par nous, en renforçant notre capacité de vigilance et d'interpellation jusqu'au débat du texte prévu début février.

Vous trouverez ici les adresses mail des députés.

Signez la pétition

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