Voici une trentaine d'années, je me disputais avec ma sœur, émigrée aux États-Unis et persuadée qu'il fallait autoriser les statistiques "raciales" censées nous permettre de mieux mesurer la réalité du racisme pour le combattre.
On voit aujourd'hui que les statistiques raciales n'ont pas fait avancer le problème d'un iota aux États-Unis ; au contraire, la multiplication des catégories – aux blacks se sont par exemple ajoutés les browns (café au lait ?) – pour essayer d'apporter un semblant d'équité à la démarche n'a fait qu'aggraver le problème, puisque Trump peut à présent se faire un plaisir d'enjoindre Kamala Harris à se revendiquer des arabes, des latinos ou des noirs. Entretemps, les Étasunien.nes ont élu Obama et nous nous sommes emballés pour la seule couleur de sa peau : c'est la définition même du racisme.
Des associations au demeurant respectables comme la NAACP sont tombées dans le piège qu'elles ont pour vocation d'éliminer (voir à ce sujet le formidable documentaire intitulé « Rachel Dolezal, un portrait contrasté » sur Netflix). Le moindre formulaire d'inscription à quelque organisation que ce soit force le candidat à faire état de sa race, de son ethnicité, de son pays d'origine (voir plus bas le type de document que mon métier m'amène à traduire tous les jours).
Il me semble que la formule lapidaire de notre meilleur penseur de la question, l'ancien footballeur Lilian Thuram, qui avait répondu à JM Le Pen son célèbre « Personnellement, je ne suis pas noir », demeure la meilleure des antidotes. Au lieu de revendiquer une catégorie qui nous est arbitrairement assignée (d'où la pertinence du terme "racisé.e"), refusons-la catégoriquement.
Agrandissement : Illustration 1
