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Billet de blog 16 octobre 2017

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D'Anne et de Balthazar

Dernièrement sortait sur les écrans "Le Redoutable" de Michel Hazanavicius adapté d'un récit autobiographique d'Anne Wiazemsky "Un an après", paru en 2015, qui relatait sa vie de couple avec Jean-Luc Godard sur fond de révolution. Puis, on apprenait la mort d'Anne Wiazemsky le 5 octobre 2017. Stacy Martin incarne la jeune-femme à l'écran, gracile, séduisante, soumise, muse et captive.

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Il me vient l'envie de découvrir le visage de la véritable Anne, de m'intéresser à l'actrice qu'elle a été.

Au hasard Balthazar, R. Bresson, 1966

Je découvre d'abord sa photo, l'ovale de son visage, la mélancolie de ses grands yeux sombres, leur intensité tragique voilée de détachement. C'est un visage de madone qui a traversé les siècles, peint par Piero della Francesca, il resurgit, éternellement gracieux et fragile. Mais cette beauté semble résignée, ce visage de madone a la sagesse d'un animal triste sacrifié à la folie des hommes.

La madonna del Parto, Piero della Francesca

Anne Wiazemsky a rencontré Robert Bresson alors qu'elle avait 17 ans et elle incarne Marie, l'héroïne de "Au hasard Balthazar", l'été de ses dix-huit ans. L'histoire de l'âne Balthazar, recueilli par Marie enfant, c'est aussi l'histoire de Marie, l'histoire du sacrifice de la beauté.

Jeune campagnarde, Marie est la fille de l'instituteur, l'amoureuse de Jacques jeune citadin qui passe ses vacances à la campagne sur les terres de son père. Les enfants adoptent Balthazar, un ânon qui deviendra leur compagnon. Après le départ définitif de Jacques, Marie recueille Balthazar mais le hasard, la cupidité, la méchanceté lanceront Balthazar sur les routes d'une existence de peine, comme Marie, abandonnée à la cruauté des hommes.

Ce film poignant, qui raconte le destin de deux innocences brisées, affirme la grandeur des faibles dans un monde qui les piétine. Et on reconnait le génie de Bresson qui choisit la jeune Anne, madone à la lumière triste, dont le visage entraperçu sur google acquiert sa vérité sous les traits de Marie. Si "le cinéma comme la peinture montre l'invisible", d'après Godard, Bresson touche à la grâce, ce qu'on pressent chez Anne, il l'exprime, comme une fragrance exprime l'essentiel d'une plante, et j'ai le sentiment que Marie/Anne flottera longtemps autour de moi.

Au hasard Balthazar, R. Bresson, 1966

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