PRESQUE ! Impossible de m'approcher de ce mot sans frissonner !
"Y suis-je presque ?" disait la grossière, manipulée par son obsession du plus : plus de gros, plus de moi ... celle-là est passée à côté de la magie du mot. Magie, oui ! Vertige, certes ! car enfin, le presque n'est pas encore, pas tout-à-fait, donc pas définitivement scellé. Cet espace, sous-entendu étroit, cette petite fente dans le temps, vaut vraiment la peine d'y coller son oeil.
C'est là que se trouve le juste avant. Juste avant le coup de volant idiot, la gifle qui part, le mot de trop, l'insulte qui tue. C'est aussi l'antichambre de la décision, le moment de grâce avant l'engagement, l'éblouissement de l'amour à l'aube de l'aveu. C'est aussi parfois, innocemment, le livreur qui sonne, interrompant le geste suicidaire.
Oui vraiment, ce mot me fait frissonner, pour ce qu'il recèle de possibles où exercer ma responsabilité. Il y a place ici pour un futur antérieur guérisseur.
Je voudrais être pour vous l'ami pré-venant qui arrive au bon moment. Je vous le demande : soyez pour moi le frère qui, à ma place, retient encore un peu le temps, lorsqu'il s'emballe sans mon consentement.