toujours Fillon

Que les actions de monsieur Fillon soient légales ou non, finalement, n'a plus aucune importance pour moi. Dans ses accusations, Madame Angot s'est trompée, au moins dans la manière de les porter. Calme et tempérance auraient certainement été plus efficaces. Personnellement, encore une fois, le fait que les agissements de monsieur Fillon puissent être illégaux ne m'importe plus. Monsieur Fillon prétend à la fonction suprême de la Nation. Il veut l'incarner et gouverner les Français. Il faut donc qu'il puisse incarner une "certaine idée" de la France qui convienne au plus grand nombre s'il veut être en capacité de gouverner presque 67 millions de personnes. Or s'il veut incarner l'autorité nécessaire à la gouvernance d'un pays, il faut bien qu'il soit crédible. J'ai personnellement regretté que madame Angot n'ait pas fait le rapprochement, pourtant facile, entre le prix des costumes offerts par monsieur Bourgi (comment monsieur Fillon peut-il assurer que ça aurait été sans contrepartie, vu le passé du personnage ?), portés de l'aveu de François Fillon même s'ils ont été rendus récemment (au moment où l'information en est arrivée dans les médias ?) et le petit documentaire dans lequel il rencontrait le personnel soignant d'une maison de retraite. La moyenne du salaire mensuel net de ces employées peut, environ, avoisiner 1600 euros. Les horaires de travail ne sont bien sûr pas limités aux horaires habituels pour une majorité de femmes qui, par ailleurs, assument des charges familiales. Monsieur Fillon leur explique, sur le ton paternaliste de celui qui sait et doit expliquer à ceux qui n'ont pas compris, qu'il faut rembourser la dette et que, pour cela, il faut donc que ces femmes travaillent plus. Il le formule d'ailleurs en leur retournant la responsabilité de la situation si elles refusaient de travailler plus, histoire de bien leur remettre la faute sur le dos (1600 euros mensuels et 45 000 euros de costumes, plus les salaires Pénélope, et ceux de leurs enfants ... ??? Qui doit rembourser la dette en priorité ?). Il s'en retourne calmement, mais avec un petit air légèrement agacé. Qu'il ne comprenne pas un seul instant, lorsqu'il répond quelques minutes plus tard sur le sujet de ses costumes, que le rapprochement de ces deux images de lui-même est mortel, me fait douter de sa santé mentale. Il regrette visiblement ses erreurs. Ses erreurs, ou le fait qu'elles soient maintenant connues du grand public ? Qu'il n'ait pas conscience, une seconde, que son utilisation de l'argent versé par les Français pour qu'il s'occupe au mieux de leur intérêts, même s'il est légalement obtenu, puisse être en décalage avec les engagements qu'il a pris d'être un homme politique probe et incorruptible, relève aujourd'hui pour moi, dans son obstination et son accusation des "autres", ses ennemis qui bassement l'attaquent, d'une santé mentale défaillante qui ne peut être celle du plus haut dirigeant de l'Etat. Qu'il ne comprenne pas une seconde qu'on ne peut confier son destin à un homme qui, au final, se montre si ouvertement méprisant pour le travail et les revenus d'autrui, doit mettre très mal à l'aise une bonne partie de l'électorat de droite. Tous, loin de là, ne sont ni si riches, ni si égoïstes. Que, pour justifier son échec prochain, monsieur Fillon attaque les structures-mêmes du Pouvoir, doit en plus les consterner, eux qui voudraient bien, à nouveau, l'exercer un jour (2022 ?). Quant à moi, ancienne assistante sociale, j'imagine bien ce que pourront répondre à mes collègues ces jeunes sur le fil de la délinquance lorsqu'on leur parlera d'autorité (dont ils connaissent parfaitement l'exercice, quelle maffia n'est pas reine en ce domaine ?), de crédibilité et d'honnêteté... Mais cela ne concerne pas seulement monsieur Fillon. Visiblement, même si tous ne sont pas pourris, loin de là, un certain nombre (de droite comme de gauche) semble cependant avoir agi de la même manière (plus ou moins violemment, mais enfin). Cela donne l'impression d'une petite caste rassemblant des candidats à l'ascenceur social, dont les membres se couvrent les uns les autres pour améliorer les conditions de vie de leur famille, persuadés du bienfondé de leurs comportements compte tenu de leurs charges, de leur compétence, de leur engagement et de leur responsabilité, comme si les soignantes de la maison de retraite, elles, ne connaissaient même pas l'existence de ces mots... Pour avoir vu de près l'exercice du pouvoir, tous partis confondus, sur le terrain, au contact des difficultés les plus cruelles des habitants, ce comportement, malheureusement, n'est pas si exceptionnel. Et je me demande quand, enfin, les élus dans leur majorité comprendront qu'on ne peut prétendre à l'écriture de la loi pour en édicter des règles qui punissent les autres, et d'autres qui les protègent EUX ! Sans redressement de leurs comportements, ils nous mettent tout simplement tous en danger. Personnellement je suis satisfaite que le travail des journalistes, que je sois ou non d'accord avec eux, nous informe. Voter Fillon, ou d'autres, sans rien savoir de tout cela me paraitrait finalement le plus dégoutant et le plus dangereux. Nous sommes tous bien plus adultes et matures que ces politiques ne veulent le croire.