ODOME ANGONE (avatar)

ODOME ANGONE

Enseignante-chercheure. Commissaire d'Art(s). Analyste-blogueuse spécialisée dans le cybermonde au Sud du Sahara, notamment dans l'impact des réseaux sociaux sur la communication politique et institutionnelle en Afrique francophone.

Abonné·e de Mediapart

30 Billets

0 Édition

Billet de blog 11 juillet 2019

ODOME ANGONE (avatar)

ODOME ANGONE

Enseignante-chercheure. Commissaire d'Art(s). Analyste-blogueuse spécialisée dans le cybermonde au Sud du Sahara, notamment dans l'impact des réseaux sociaux sur la communication politique et institutionnelle en Afrique francophone.

Abonné·e de Mediapart

Retour sur la deuxième édition du forum de l'image et de la photographie

La deuxième édition du Forum de l’Image et de la Photographie (F.I.P) n’a pas été seulement un lieu d’échanges de compétences intellectuelles ou de partage d’expériences mais aussi une plateforme qui a permis aux jeunes de croire en leurs rêves.

ODOME ANGONE (avatar)

ODOME ANGONE

Enseignante-chercheure. Commissaire d'Art(s). Analyste-blogueuse spécialisée dans le cybermonde au Sud du Sahara, notamment dans l'impact des réseaux sociaux sur la communication politique et institutionnelle en Afrique francophone.

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Une arrestation musclée en 2014 - pour infraction au droit à l’image sur bâtiments administratifs de protection officielle - est à l’origine de l’ingénieux forum de l’image et de la photographie (FIP) qui vient de s’achever à Libreville.

En 2014, MASSALA MASSALA Grégor, plus connu comme MASSALA Mac-Grégor, initiateur du Forum, est victime d’une arrestation par les forces de sécurité nationale lors d’une séance de shooting photographique.

En pleine exercice de sa passion, le quidam est interpellé par deux agents qui saisissent ipso facto son matériel. Il est menotté et conduit chez un lieutenant pour subir un interrogatoire. Cet autodidacte de la photographie sera informé séance tenante que s’il avait été photographe professionnel, il aurait vu son matériel saisi, on lui aurait également flanqué une amende et il aurait probablement été incarcéré. Le bâtiment au cœur de l’incident qui n’était pour lui qu’un décor et qu’il n’avait pas filmé en réalité est le palais de justice de Libreville, situé non loin d’un État-major.

Durant l’interrogatoire, ahuri, on lui déclinera une liste non exhaustive des endroits soumis à un protocole particulier et à ne donc pas photographier sans autorisation préalable, pour des questions de sûreté, comme les ambassades, les aéroports, la Présidence, les commissariats, etc. C’est suite à cet incident que lui viendra alors l’idée d’organiser une rencontre sur les défis liés au droit à l’image à l’ère du numérique. Ce quiproquo personnel devient ainsi un cas d’école collectif pour sensibiliser les professionnels des métiers connexes sur la complexité du droit à l’image à l’ère du digital. La première édition est sanctionnée le 09 décembre 2017 par une conférence sur ces questions. L’initiateur a ainsi associé des professionnels de la photographie et quelques aficionados pour former une équipe dynamique aux compétences variées, chaque membre étant diplômé dans un domaine spécifique.

Très vite, la première journée de réflexion autour du droit à l’image fait mouche et suscite beaucoup d’intérêts de la part du public. Si les professionnels du métier et les amateurs sont motivés, du côté des sponsors on reste cependant sceptique et réticent. Ce qui oblige l’équipe organisatrice, pour ne pas freiner l’élan et l’engouement, à redoubler d’efforts afin de trouver les moyens de continuer.

La deuxième édition du FIP achevée il y a quelques jours est ainsi devenue un forum parce qu’entretemps, la conférence de 2017 s’est muée en véritable plateforme de réflexion interdisciplinaire sur le droit à l’image autour des métiers adjacents comme la photographie, le journalisme, la communication, le numérique, la couture, le stylisme, le mannequinat, l’industrie du divertissement, la marketing, l’entrepreneuriat, bref, tous les corps de métiers dont l’image est le dénominateur commun.

Les ateliers de la deuxième édition ont servi également de cadre d’orientation professionnelle pour susciter des vocations chez les personnes qui veulent faire des métiers de l’image des carrières car la sélection - des thèmes, des domaines et des experts - a été faite en adéquation avec les besoins du marché gabonais où les métiers en plein essor tournent autour du make-up, du montage vidéo et de la photographie en l’occurrence. C’est la raison pour laquelle le choix des conférenciers s’est aussi fait par rapport à leur expertise avérée dans le domaine des thèmes sélectionnés afin de combler les attentes du public. Toutefois, les métiers qui touchent la photographie sont encore mal connus au Gabon, nous disent les organisateurs, le cadre juridique y relatif étant encore au stade embryonnaire. Le collectif « 241 millimètres », par exemple, regroupe la plupart des photographes exerçant au Gabon, sans distinction de nationalité mais ce n’est pas une organisation « officiellement reconnue ». Le forum veut donc être un agent motivateur pour professionnaliser les métiers de l’image.

Les enjeux et objectifs du forum sont évidemment multiples : de la sensibilisation à l’information sur le droit à l’image, en passant par les dérives observées sur les réseaux sociaux, entre autres.

Pour donner de la visibilité à cette initiative, une page Facebook du même nom a permis de suivre l’actualité du forum en ligne et de s’inscrire, dans l’avenir, aux différents évènements qui s’organiseront régulièrement ; un site web est aussi en cours de création, sans oublier le bouche-à-oreille et les médias traditionnels. Le succès de l'édition de juillet 2019 a été rendue possible grâce, en partie, à la dynamique des plateformes digitales pour atteindre le plus grand nombre.

Comme tout début, les aléas sont nombreux mais la passion et la détermination sont une constance qui force l’admiration chez ses jeunes lorsqu’on a une vision commune à long terme. Certains potentiels sponsors ont exprimé une certaine réticence en considérant le forum comme une idée farfelue et frivole, d’autres ne donnaient pas très chère la peau de cette énième rencontre pour les mêmes raisons. C’est ce qui explique pourquoi la deuxième édition s’est tenue presque deux ans après la conférence de 2017, les organisateurs avaient besoin de partenaires et de sponsors fiables.

L'édition qui vient de prendre fin à Libreville après deux jours de travaux intenses portait sur les métiers de l’image et de la photographie à l’ère du numérique. Cap à présent sur la troisième édition qui se tiendra en avril 2020 à Port-Gentil, la ville économique du pays, à l’invitation des autorités de la localité, le but étant de décentraliser la rencontre afin de ratisser large, parce que, comme le dit si bien le slogan du forum « la force est dans le partage ». L’initiative étant axée sur la formation et l’information, les organisateurs veulent aussi donner cette opportunité aux jeunes qui vivent dans les zones reculées, notamment à l’intérieur du pays où l’accès à l’information sur les métiers du numérique est encore une denrée rare.

L’itinérance du forum pour les éditions à venir, d’une ville gabonaise à une autre, et plus tard d’un pays africain à un autre, offre un nouveau tournant à cette rencontre, ce qui traduit non seulement le succès de cette initiative mais aussi l’engouement suscité. Pour reprendre les mots de Yoan Stephene Lekambo, l’un des membres du comité d’organisation : « la deuxième édition du Forum de l’image et de la photographie n’a pas été seulement un lieu d’échanges de compétences intellectuelles ou de partage d’expériences mais aussi une plateforme qui a permis aux jeunes de croire en leurs rêves ».

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.