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Billet de blog 1 octobre 2010

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Chers à entretenir, ces riches...

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Nos gouvernants nous l’affirment. On ne peut revenir sur le bouclier fiscal – ou plus généralement rendre nos impôts plus progressifs, c’est-à-dire faire payer plus à ceux qui ont le plus – parce que nos riches partiront sous des cieux fiscaux plus cléments. On serait tentés de rétorquer que s’ils n’aiment pas suffisamment la France pour accepter de payer leur écot à la solidarité nationale, ils peuvent la quitter. Il y a pas mal d’avions affrétés ces derniers temps ; on peut bien leur réserver quelques places. Mais on nous répondrait alors qu’on est des frustrés, parce qu’en fait on voudrait tous pouvoir s’offrir des îles désertes, des Rolex en or massif et des yachts grands comme des maisons, mais on le mérite pas et c’est pour ça qu’on est aigris, et toc.
En y réfléchissant, qu’à-t-on à craindre du départ de ces grandes fortunes ? C’est qu’elles coûtent cher à entretenir, ces fortunes, et surtout à vous ou à moi, pauvres citoyens lambdas qui ne goûtons pas aux joies de la Légion d’Honneur de complaisance. En parlant de riches, je ne parle pas du fameux dernier décile de l’INSEE, qui n’a aucune valeur analytique. Il nous apprend que les 6,5 millions les plus riches parmi nous ne disposent par mois que de 3,4 fois les ressources des 6,5 millions les plus pauvres. D’ailleurs, fort à parier qu’un certain nombre des lecteurs de Mediapart font partie de ces 6,5 millions de privilégiés, espèce de profiteurs. Bref, si l’on s’arrête là, on pourrait croire que la France est un pays d’un égalitarisme exemplaire.
Je voudrais plutôt me pencher sur ces 0,1 ou 0,01% de Français qui ont des fortunes qui peuvent devenir tellement démesurées que l’on n’en gagnerait pas le centième en une vie d’honnête labeur, l'échine courbée et la sueur perlant, i.e. les héritiers des « Deux-cent familles ». Un peu démago de dire ça comme ça, certes, mais c’est l’idée. Pour une analyse sociologique, je vous renvoie vers les Pinçon-Charlot, qui ont fait la Une de Mediapart, et qui décortiquent bien les us et coutumes de cette caste coupée du sort du commun des mortels.
Comme je vous le disais, ces riches, ils nous coûtent cher. Très cher, même, à commencer par les finances publiques. Au-delà des chèques-aux-montants-plus-élevés-que-celui-de-la-super-cagnotte-du-Loto-du-vendredi-13 que le Trésor Public envoie tous les ans aux indigents protégés par le bouclier fiscal, ces pauvres exploités se répartissent le territoire national à des prix défiant toute concurrence (l’affaire de l’hippodrome de Chantilly est un exemple récent), quand ils ne l’aménagent pas à grands frais publics à leur convenance (à venir : Grand 8 gouvernemental autour de l’agglomération parisienne, qui s’il est mené à bien dépossèdera de nombreuses mairies d’importantes réserves foncières pour construire une desserte qui reliera uniquement des pôles économiques sans se soucier des habitants). D’ailleurs, il faut bien soutenir leurs industries souffreteuses – que serait l’empire Dassault sans les commandes étatiques ?
Puisqu’on parle d’économie, embrayons sur la finance. Ces gentils-riches-sans-qui-la-France-s’effondrerait sont les principaux promoteurs (et bénéficiaires…) de cette financiarisation qui fait de la Bourse ce jeu détestable qui crée de l’argent virtuel et détruit l’économie réelle. On a beaucoup glosé depuis la crise des subprimes sur ce capitalisme à moraliser, je n’en rajouterais pas ; mais force est de constater que s’il n’y avait pas de riches pour le faire fonctionner, on n’en parlerait pas. J’irais même plus loin : s’il n’y avait pas la possibilité de s’enrichir jusqu’à des niveaux obscènes, il n’aurait aucune raison d’exister, ce capitalisme barbare. Et s’il n’existait pas, aurait-on besoin de toujours alimenter cette croissance du PIB, dont on sait (une fois les œillères enlevées) qu’elle nous mène à la catastrophe écologique ?

Bref, pourquoi retenir les riches ? Ils pompent l’argent public, vampirisent l’économie, et mettent gravement en danger la planète (et encore, je n’ai pas abordé le coût écologique catastrophique de leur consommation somptuaire). D’accord, ils ne sont pas responsables de tout ce qui va mal, ne poussons pas la mauvaise foi jusqu’aux extrémités les plus viles. Non, ce qui est réellement en cause, c’est le principe de cupidité. Ce « désir immodéré de gains et de richesses » (déf. TLF), voilà l’ennemi. Quand est-ce qu’on parle sérieusement de l’instauration d’un revenu maximal admissible ?

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