Tout d’abord, un peu de démagogie – quoique. Ce gouvernement, on le savait incompétent et menteur, capable à plusieurs reprises de nier une réalité pourtant évidente. Pour ne rien arranger, l’un de ses hommes forts a été condamné en justice pour injures raciales, et de nombreux autres membres de cette équipe sont sous le coup de fortes présomptions de malhonnêteté. Après les évènements d’hier, la prochaine étape, c’est quoi ? Tueur d’enfants ?
Parce que ça y est, les lycéens sont rentrés dans la danse. Et de manière spectaculaire : alors que leurs aînés à l’université sont étonnamment calmes, c’est par un mouvement d’ampleur nationale, qui touche autant les pôles urbains que les campagnes, que ces jeunes entendent faire entendre leur mécontentement. Bien entendu, sous quelle angle une certaine presse analyse-t-elle la situation ? Celui de la manipulation. Les lycéens, ces jeunes tendrons à la cervelle d’oiseau, sont la proie du machiavélisme des organisations syndicales et de la gauche, qui les envoie au front.
Quand donc ce cliché rétrograde disparaîtra-t-il ? Je l’ai toujours trouvé d’une ironie profonde. Ces jeunes-là ont autant de chances d’êtres manipulés, que certains journalistes en ont de l’être par leurs patrons, les Bolloré, Dassault et autres Lagardère, amis (que dis-je ! « frères » !) du président et de la majorité en place. Pour les journalistes, on suppose donc une déontologie sans faille, même vis-à-vis de ceux qui leur permettent de payer le loyer ; mais pour les lycéens, pas de présomption d’intelligence et d’autonomie ?
Au lycée, je n’ai participé qu’à un seul mouvement social. C’était en 2002. Jean-Marie Le Pen venait d’arriver second au premier tour de la présidentielle. Spontanément, nous sommes allés manifester. Des critiques, il y en a eu : n’est-ce pas anti-démocratique que de contester le résultat d’une élection légitime ? Cependant, je ne me souviens pas avoir alors été taxé de jouet d’un courant politique quelconque. Sans doute que cette colère-là ne heurtait pas les bien-pensants et le pouvoir.
Je ne suis pas en train de plaider pour l’adoption d’une posture angélique à propos du mouvement lycéen. Mais qu’on arrête de systématiquement vouloir les faire passer pour des enfants bêtes et naïfs, à qui l’on doit rappeler de ne pas se curer le nez en société. A seize ans, l’on a souvent déjà une conscience politique, même si aucun moyen institutionnel ne permet de l’exprimer.
Restera l’accusation éculée de fainéantise. La grève, c’est juste pour pas aller en cours et rien glander de la journée. Bien sûr qu’il y a de ça chez certains. Mais de là à en faire une généralité… A ce moment-là, ne pas chercher à faire entendre son opinion (ou, pire, ne pas chercher à en avoir une !), n’est-ce pas une marque de servilité ? Il faudrait donc nécessairement choisir entre être une cigale ou un mouton. Alors, hamac ou carpette ?