Une brochette de chefs d’états cyniques et des cohortes de marchands « sont Charlie »… Triste spectacle !
Les récupérations marchandes et politiciennes de la riposte populaire aux tueries antisémites et visant la liberté d’expression sont la principale cause de la division tragique du peuple français que les pompiers pyromanes déplorent hypocritement.
François Hollande et son staff de conseillers et ministres ont pris l’initiative stupéfiante de créer un carré VIP dans une manifestation populaire, et d’essayer de transformer celle-ci en fondation d’un nouvel ordre pseudo républicain, d’embrigader les citoyens épris de liberté, d’égalité et de fraternité dans un projet sécuritaire et guerrier derrière Netanyahou, Orban, Cameron, Porochenko, Samaras, Bongo, Keïta… Cette mise en scène obscène d’un consensus de pouvoirs politiques, parmi lesquels des ennemis résolus de la démocratie et la libre expression et des exemples notoire de corruption, a définitivement flétri l’emblème « Je suis Charlie », car de même qu’on ne peut rire avec n’importe qui on ne peut pleurer avec n’importe qui.
Cette manipulation a été mise en échec par la manifestation populaire, qui a su dépasser, et a voulu nier cette présence encombrante des dirigeants l’ordre capitaliste mondial mais n’a pu l’empêcher. Les médias, soucieux de représentation politique « correcte » et consensuelle ont cru favoriser la paix sociale et démocratique en présentant ce directoire du monde comme le monde lui-même, et en promouvant l’idée que « le monde entier » s’était dressé contre « le terrorisme ».
Le compte-rendu médiatique dominant de la riposte populaire a donc profondément dénaturé celle-ci, promouvant un Président consensuel, alors même qu’il agissait en diviseur, et un Premier Ministre dominateur, alors même que sa politique devenait inaudible pour une grande partie de la jeunesse et des forces vives de la nation.
L’ordre capitaliste ne s’est pas contenté de cette manipulation politicienne, emblématique de la « société du spectacle », il a de plus entrepris de marchandiser à grande échelle le mot d’ordre de communion sociétale « Je suis Charlie ». Casquette, Tee-Shirt etc. Les produits dérivés déferlent. Ils dénaturent profondément le sens de la riposte populaire à la frappe en plein Paris des agents militarisés d’un mouvement politique et guerrier d’inspiration religieuse extrémiste contre la liberté et pour le racisme. Ainsi se propagent des symboles à la signification réduite à leur valeur marchande. Les expressions de la liberté, de la critique et de la culture sont ravalées à grande échelle à leur valeur marchande.
Ces deux récupérations sont les principales causes de la division du peuple français dans la réaction aux événements meurtriers du 7 janvier.
Beaucoup de jeunes ne se sont pas reconnus dans une minute de silence à laquelle les appelait l’ami de Netaniahou, le massacreur de Gaza, et Orban, le censeur de la presse… Le matraquage médiatique d’une vérité unique, là où des luttes de pouvoir faisaient s’affronter, se concurrencer, des acteurs cyniques soucieux d’instrumentaliser l’émotion populaire et l’aspiration à la paix et la liberté a provoqué une réaction de rejet, souvent à peine formulée mais aussi profonde et spontanée.
Beaucoup de citoyens ont vu trop vite se concrétiser leur crainte que la réponse de l’état soit principalement sécuritaire et répressive, assortie de propos condescendants de promotion d’une pédagogie ciblée vers des populations sensibles, immatures, parfois tout simplement décrite comme déficitaire dans leur langage et leur intelligence…
L’ordre idéologique du monde capitaliste, de ses politiciens et de ses marchands, est donc apparu comme ce qu’il est profondément : l’étouffoir des aspirations démocratiques, l’empire du mensonge et de la déculturation.
Les discours penauds sur la jeunesse qui n’entendraient pas le discours démocratique et républicain se focalisent sur le communautarisme, la misère des quartiers, le manque d’imams dans les prisons, la langue française, l’instruction civique etc… Rien de tout cela ne manque d’intérêt, mais n’a pourtant pas de valeur explicative de la division idéologique et sociale, au contraire des manœuvres de l’ordre capitaliste, qui sont elles des causes efficientes et directes.
C’est hélas le Président et le gouvernement qui ont, les premiers, manqué d’esprit civique en essayant de profiter d’événements tragiques pour refonder et consolider l’ordre mondial des dominations et impérialismes. Leurs semblables se sont précipités et ont joué des coudes pour être en bonne place à leurs côtés. Leurs commanditaires ont aussitôt entrepris de rafler la mise, à petite et grande échelle (du Patriot Act aux mugs customisés…)