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Billet de blog 1 février 2016

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La place de la femme

Cherchez la femme à sa place

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Bon, nous sommes tous d’accord que ce qui s’est passé à Cologne est grave. Très grave. Très très grave même. Comment ont-ils osé ? Ici, chez nous. Impensable. Ce n’est pas comme ça que ça se passe ici et ils devraient le savoir. Chez nous, la femme est sacrée. Kamel Daoud appelle ça « l’essence » de notre modernité. Et c’est d’ailleurs ce qui fait de nous une race bien moderne et bien supérieure. Même au Etats-Unis où, dans certains états, il n’y a plus de cliniques d’avortement et où les médecins qui le pratiquent se font parfois tuer. Tiens, le planning familial français a récemment fait quelques titres… je ne sais plus pourquoi. Passons…

Nous sommes supérieurs, un point c’est tout. Dans notre culture avec un grand C, personne ne peut obliger une femme à se voiler. Alors que là-bas (et, de plus en plus, ici chez nous, c’est franchement flippant), elles sont toutes de niqab vêtues. Certes, il y a quelques décennies, les mini-jupes défilaient à Kaboul. Les femmes irakiennes étaient médecins, ingénieurs, que sais-je. Et l’apparition du voile en Algérie a été vécue avec grande réticence par les principales concernées - c'est ma gentille nounou algérienne qui me l'a raconté. Vous me direz, peut-être, que les méchants islamistes ont ignoré leur avis. Ce sont des barbares et c’est un crime.  Chez nous, ça se passe autrement, parce que nous sommes supérieurs. Chez nous, dans notre culture bien propre et policée, nos avis intéressent grandement les politiques à l’approche des élections. Juste après, moins, mais ce n’est pas grave, car le reste du temps, ils sont précieusement recueillis par les instituts de sondage passionnés par les barres chocolatées, la téléphonie mobile et les cotes de popularité. Bon, disons qu’un avis est un terme masculin. L’opinion publique elle est déjà plus féminine. Quand la majorité des Français se prononce(rait) en faveur d’Emmanuel Macron, troll de la république déguisé en ministre, ou de la déchéance de nationalité, l’oreille du gouvernement est attentive. Quand elle rejette la Constitution européenne, elle est irréfléchie et puérile. Va jouer dans ta maison de poupée, Nora, c’est trop compliqué pour toi. À quoi bon te montrer le texte du TTIP, tu n'y comprendras rien.

Chez nous, les hommes qui symbolisent l’autorité ne sont pas des barbus. Ils portent des costumes. Ils savent ce qu’il nous faut sous leurs cravates. Idéalement, c'est un papa et une maman. Non, pardon, ça c’est ringard. Le père et la mère de la nation, voilà. De préférence, un père. Une mère au sommet de la politique c’est bien aussi si elle applique la même éducation punitive que le père. Madame Thatcher – une belle ironwoman. Michèle Alliot-Marie – une poigne. Angela Merkel - simplement parfaite. Une mère qui a des visées politiques se doit d'être austère, savoir tenir la caisse et ne pas oublier le ménage.

Les barbus pensent que nous sommes décadents. Surtout avec le mariage pour tous. Bon, c’est vrai que le mariage pour toutes, ça va un peu loin. L’étreinte lesbienne doit rester dans le domaine du fantasme, sinon c’est un peu l’anarchie, non ? C’est très bien quand elles sont jolies, adoptent des positions improbables et s’invitent dans les rêves de nos hommes. Mais quand elles oublient ce rôle de choix pour prétendre à une position à part entière dans la société, c’est tout de même un peu… vexant. Bon, j’exagère. Va pour le mariage pour toutes. Il y a plus grave aujourd’hui. C’est l’oisiveté des assistés qui, de nos jours, est la mère de tous les vices, pas les lesbiennes. Il faut travailler, mes enfants. Dans notre république laïque, seul Dieu a le droit de se reposer le dimanche. Pour les autres, c’est un jour comme un autre – c’est notre nouvelle charte de laïcité, elle est chouette, hein ? Même Valls est trop occupé pour se bourrer  tranquillement la gueule le samedi soir, alors bon… Il est d’ailleurs grand temps de rétablir la dégressivité du chômage, parce qu’à force de se shooter aux allocs, plus personne ne veut bosser. Nos femmes sont certes des vaches sacrées, mais elles ne peuvent pas nettoyer toutes les écuries d’Augias à temps partiel. Et puis, il y a tant et tant de caisses dans ce pays.

Il faut reconnaître, notre monde civilisé n’est pas parfait. Nous avons trois groupes d’exception qu’il convient détailler :

1. Il y a les connes. Cécile Duflot détient la palme. Duflot hérisse les poils de tous bords, même chez les femmes, qui normalement sont censées s’épiler. C’est très simple. Seule une conne peu croire dans l’encadrement des loyers et la lutte contre l’insalubrité (même s’il s’agit quand-même un peu de ménage). Bon, quand je l’écoute parler, elle me semble tout sauf conne, mais enfin, je ne suis qu’une faible femme, qui suis-je pour juger ? Je suis peut-être conne moi aussi...

2. Il y a les singes. La figure de proue de cette catégorie est, évidemment, Christiane Taubira. Elle est insupportable à double titre. C’est une femme qui refuse de faire le ménage et de punir avec toute l’austérité requise, et, comble de prétention, elle singe les manières et les comportements intellectuels de NOTRE culture avec un grand C. Elle parle aux hommes, avec intelligence et en vers ! Franchement, la poésie à l’Assemblée est une blague. Un bon gang-bang pour Duflot sur Europe 1 c’est déjà plus réglo.

3. Et puis il y a les dingues. Ma préférée du moment c’est Myriam Benraad. Une « hystérique », une  vraie « folle ». Avec son regard (presque) persan, c’est peut-être même une sorcière.

Ces femmes posent problème. Elles veulent se battre. Or, les femmes au combat ne nous ravissent que quand elles sont Kurdes et affrontent les violeurs et égorgeurs islamistes. Chez nous, leur combat doit être celui du ménage, avec l’obligation de ménager les égos boursouflés de ceux qui se positionnent en bons pères de notre grande famille.  Une femme qui retrousse les manches et sort les dents trahit la gent féminine de notre société qui se veut harmonieuse. La femme doit rester élégante jusqu’au bout de ses ongles vernis et ne jamais sombrer dans la vulgarité de la bataille, car ce domaine est réservé aux spécimens masculins, naturellement plus forts et mieux à même de comprendre et se faire écouter. L’égalité des sexes au gouvernement a, d’ailleurs, été une anecdote particulièrement drôle. Souvent femmes varient, trois petits tours et puis s’en vont. Nos dirigeants ne sont quand-même pas fols.

Le dernier Monde diplomatique raconte la légitimation des djihadistes et de leurs pratiques par la presse française dans les années 80’. Point d’égarement : à l’époque, le communisme était le plus grand mal de l’humanité. Aujourd’hui, rien n’est plus odieux que ces monstres de la nature, assassins ahuris de la liberté, barbares déshumanisés qui se font exploser chez nous. Et je me fiche complet de savoir pourquoi leur humanité a décidé de déguerpir, ce n’est pas mon problème. On n’a qu’à les renvoyer chez eux en Arabie. Dommage que je ne puisse renier mon gosse quand il refuse de m’écouter alors que j’applique assidûment des arguments d’autorité. Heureusement que le trône qui sert d’assise à cette légitimation reste bien solide. Ouf.

Au détour d’une formule malheureuse, Antoine Compagnon, tout baudelairien qu’il est, s’est récemment attiré les foudres des féministes (qui sont folles et sorcières). Le métier de l’enseignant est devenu trop féminin, dit-il. Les femmes y vont pour pouvoir s’occuper de leurs gosses. Je crois que s’occuper de 30 djihadistes en puissance contre le droit de s’occuper des siens, c’est un bon deal, mais je n’y connais rien. Reste que Compagnon a vu juste - l’enseignement scolaire est un domaine déconsidéré qui attire trop peu d’esprits virils. Car oui, mesdames et messieurs, les emplois déconsidérés sont chez nous majoritairement réservés aux femmes. Cherchez pas, c’est la volonté divine. Tant et tant d’écuries. Tant et tant de caisses.

Alors, il faut bien expliquer à tous ces réfugiés qu’on ne les accueille pas pour qu’ils violent NOS femmes. S’il le faut, on s’en occupera nous-mêmes. Leurs plaintes ne seront attentivement étudiées que si l’homme est musulman d’apparence, c’est promis.

Et juste pour info : je ne suis pas du tout énervée. Je ne suis pas folle, vous savez.

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