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Billet de blog 26 février 2020

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LA MACRONYMIE

Savez vous ce qu'est une macronymie ? La macronymie c'est LA figure de style de la macronie, comme vous l'aurez deviné, et elle consiste à désigner un objet ou une idée par un autre terme que celui qui lui convient.

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Vu qu'on est en pleine période de bac blanc, j'ai une question pour vous ! Vous vous y connaissez en figures de style ?

Savez vous ce qu'est une macronymie ?

Non, langue au chat ? (D'ailleurs ça c'est une métonymie!)

La macronymie c'est LA figure de style de la macronie, comme vous l'aurez deviné, et elle consiste à désigner un objet ou une idée par un autre terme que celui qui lui convient.

Un bon exemple de macronymie c'est le mot « débat ».

Un débat oppose plusieurs courants de pensées sur un sujet donné. Au terme du débat, on a entendu tous les participants et on a peut être même fait évoluer son avis.

Au moment du « grand débat national » censé répondre à la crise des gilets jaunes, Emmanuel Macron a pris la parole devant tous ceux qui voulaient bien l'entendre aux quatre coins de la France (qui pourtant en compte cinq, c'était déjà mal parti).

Or je ne sais pas si vous avez vu mais globalement ça consistait à plusieurs personnes qui prenaient la parole pendant longtemps et au président qui prenait la parole pendant encore plus longtemps. En fait, chacun disait son truc puis laissait la parole à un autre et puis basta, rien, personne répondait à personne.

En plus les sujets étaient décidés à l'avance par l’exécutif, les participants étaient choisis, et comme par hasard, on était pas loin des européennes, bref, pas très socratique comme débat.

Ici, on a donc un bel exemple de macronymie où le terme « débat » a clairement été utilisé à la place du terme « monologue ».

Et on comprend bien pourquoi, c'est difficile dans une démocratie d'assumer ouvertement que t'en as rien à foutre de l'avis des autres.

Autre exemple de macronymie, et c'est le mot de cette mi-janvier, le mot « compromis ».

Un compromis est le résultat d'une négociation entre plusieurs parties opposées pour arriver à une solution commune. Il se base sur des concessions.

Tous les ministres sont intervenus pour marteler en cœur que face à cette grève inteeeeeeerminable, (un peu comme les phrases explicatives de Muriel Penicaud) l'heure du compromis avait sonné. Ils y sont tous allés, sincèrement, gravement, en vantant les concessions arrachées par les grévistes au si généreux premier ministre.

Mais soyons clairs, ils s'en foutent que la grève se termine ! La grève impacte pas exactement de la même manière l'assistante maternelle de la garderie de ma fille qui habite en banlieue et qui se tape 2h aller 2h retour tous les jours et un membre du gouvernement qui a un chauffeur. Je veux dire, globalement, si t'as un chauffeur, t'es autant emmerdé par les grèves des transports qu'un milliardaire sur son yacht par la montée des eaux.

Y'a une grosse diff entre le sans dent qui perd tous les jours 4h à se rendre au taf pour un smic sur lequel se base le crédit de sa maison et le ministre qui au pire va écouter dix minutes de Mozart en plus assis sur son siège chauffant en cuir parce que « mon dieu vous avez vu les bouchons à cause de la grève ? » Incroyable ce qu'Hidalgo a fait de Paris, vraiment... vivement Rachida.

Donc non seulement ils s'en foutent que la grève se termine mais en plus, a priori, les concessions coutent pas autant aux ministres qu'aux grévistes. T'es pas aussi prêt de tes sous quand t'es cadre sup' que quand tu vas faire tes courses calculette à la main. Pour peu que t'aies passé ta vie à faire un métier pénible et mal payé tu l'as forcément un peu mauvaise si un mec en costard vient t'expliquer avec un ton fataliste que mon bon monsieur, va falloir travailler plus longtemps et gagner moins d'argent... Les concessions impliquent pas autant dans leur chair les différentes parties.

Prenons un exemple d'actualité pour filer la métaphore (et oui c'est une chronique hautement littéraire !)

Harry et Megan en ont marre de faire la une des tabloids anglais et veulent prendre leur indépendance. La reine veut que perdure la royauté britannique et les privilèges qui sont attribués à sa famille (et aussi vivre jusqu'à 130 ans, mais ça c'est hors sujet). Du coup, Harry, Megan et la Reine se mettent d'accord pour que le couple se barre fissa au canada, renonce à tous ses titres royaux, et même rembourse de l'argent. Comme ça les britanniques se disent : « Ça n'a pas du être facile pour la Reine d'éloigner son petit fils et son arrière petit fils. Et Megan et Harry, les pauvres, ils ont perdu gros, en plus ils vont rendre l'argent (ce qui n'est pas le cas de tout le monde hein, big up François Fillon) »

La royauté britannique peut perdurer sans scandale ou coupage de tête intempestif au grand bonheur de Stéphane Bern parce que les anglais pensent que le compromis a été juste.

 Elle est là la clef. Pour qu'il soit bon, un compromis est sensé être juste. Et pour se faire, il faut que les concessions se valent.

Pas la peine d'avoir fait l'ENA pour comprendre que c'est pas exactement le cas ici...

Philippe dit j'accepte peut être de retirer pour quelques années un âge pivot transitoire, ce qui est pas folichon en terme de concession, contre tout simplement l'arrêt de la gréve, qui est grosso modo la concession ultime des syndicats.

Y'a plus pacificateur comme compromis, vous ne trouvez pas ?

Comme dit Ricoeur, que clairement notre président à du lire en diagonale pendant ses soirées karaoké au Bunny's bar, « un bon compromis ne camoufle pas les conflits ».

Mais mais mais c'est vraiment trop injuste ! Et ben oui Calimero !

BIM l'injustice dans vos faces de gens qui ne sont riens !

Plus que vos yeux pour pleurer, pardon votre œil. Ben oui t'avais qu'a pas manifester...

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