Pourquoi cette obsession de la croissance? Je conseille à tous la lecture (relativement simple) du magnifique cours théorique de Thomas Piketty au College de France en mars 2011 intitulé "Croissance économique et répartition des richesses".
Il y démontre que dans un monde stable tel que l'Europe depuis la fin de la seconde guerre mondiale, le capital prend irrémédiablement le dessus sur le travail. Par un effet de cliquet en fait très simple, tout euro de capital génère bon an- mal an entre 3 et 5% de revenus... dont la majeure partie se capitalise à nouveau. Du fait des techniques de placement de plus en plus sûres, instantanées et globales, à moins de prendre des risques stupides, tout possesseur de capital ne peut que le voir prospérer au fil des ans.
Si on est, d'autre part, dans un environnment à faible croissance (1 à 2% comme c'est le cas en moyenne depuis 10 ans en Europe occidentale)... la part de la richesse produite qui revient au travail va en diminuant. C'est mathématique.
Pour éviter les tensions sociales qui découlent des inégalités de plus en plus évidentes entre ceux qui bénéficient d'un capital et les autres... il faut effectivement prier pour que la croissance revienne. Du moins c'est ce que se contentent de faire les hommes politiques poltrons ou limités dans leurs analyses qui ne veulent pas envisager d'autres méthodes pour ré-équilibrer la répartition du capital ou de ses revenus.
Si, comme le démontre Piketty, le problème central de nos sociétés c'est la répartition des richesses entre "capitalistes" et ceux qui essaient de survivre avec leur salaire, tentons de résumer les leviers à la disposition de nos Gouvernants :
- implorer la croissance, ou tenter de la déclencher par des investissements publics (en évitant les ponts qui ne mènent nulle part ou les cadeaux aux copains, brefs les investissements qui ne génèrent pas d'économies par la suite) ou des dépenses publiques redonnant du pouvoir d'achat.. (tout en sachant qu'une partie va booster la croissance de la Chine)
- taxer massivement le capital ou les revenus du capital afin de s'assurer que le capital ne croisse jamais plus vite que la richesse globale produite
- taxer massivement les successions (variante du point précédent)
- créer de la masse monétaire, de l'inflation, pour que le Capital n'augmente, en valeur réelle, pas plus que la richesse globale produite.
Il me semble que dans la situation de l'Europe de l'Ouest il faut faire un peu de tout :
- inciter aux investissements dans les domaines dont on est sûr qu'ils vont générer de la richesse ou des économies... comme les énergies vertes intelligentes (pas des panneaux solaires Chinois, idée doublement stupide)
- taxer les revenus du capital ou les successions (c'est le plus facile). Les caisses de retraite devraient voir leur déficit combler par des taxes sur le capital plutôt que sur le travail. Même chose pour l'assurance maladie.
- créer de l'inflation "sous contrôle" en évitant que les banques ne transforment les liquidités en bulles spéculatives.
Pour terminer, un petit rappel très simple : la dette publique est de 1700 Milliards d'Euros. Le capital privé sous forme d'assurance vie uniquement, c'est environ le double.