En invoquant Marx « Un pas en-avant vaut mieux qu’une douzaine de programmes » (formule sortie de son contexte) vous laissez planer « d’importantes divergences de vues » avec la FI, mais on ne sait trop lesquelles. Vous n’en dites rien. Le doute s’insinue. L’angoisse monte…
Des pas en avant, nous en avons eu lors de la campagne électorale qui a mobilisé des foules, lors des débats au parlement marqués par l’intransigeance républicaine des députés FI, et pourquoi n’en verrions-nous pas encore ? Tout cela fondé sur le programme, justement, en tant que ligne de conduite. Un pas en avant sans perspectives, où est-ce que ça mène ?
Faut-il rappeler, pour tenter de les différencier à vos yeux, que contrairement à celui de Macron, le programme de la FI n’a pas été décidé dans la boutique d’un banquier, mais au travers d’apports multiples et dans des instances ouvertes et évolutives (voir la convention de Lille) ?
Dans l’esprit de la FI, « l’émancipation des travailleurs » ne consiste pas à « faire revenir vers eux l’essentiel des richesses qu’ils produisent ». Qu’est-ce qu’ils en feraient ? Cela consiste à rendre à l’Etat et aux institutions les moyens d’opérer un partage admissible pour chacun au regard de ses talents et de ses besoins, puisque seule la décision collective (démocratique) permet de mettre au second plan les intérêts particuliers.
Certes, encore faut-il que les gens votent. Mais de « dictature », fut-elle du « prolétariat », il n’est pas question, que je sache, à la FI qui prône le pouvoir d’une assemblée élue et la révocabilité (par le vote) de ses représentants.
« L’intérêt général, ça n’existe pas », dites-vous ?
Vous considérez donc, avec les tenants du mépris qui nous gouvernent, que les êtres humains qui forment le peuple sont définitivement incapables de discernement. Incapable de se fédérer. Incapables de soigner ensemble leurs misères. Or ils ne sont humains qu’ensemble, comme vivent ensemble vos loups et vos singes. Là où se trouve le bonheur d’être.
Selon vous les « intérêts objectifs » des être humains divergent. L’intérêt général, ce serait « abstrait ». Nous ne serions animés que par nos intérêts particuliers. Dès lors, le discours de la FI tente d’éveiller les consciences de ceux qui ne savent pas encore que leur nombre fait d’eux les destinataires de l’intérêt général (en tant « qu’intérêt objectif » du plus grand nombre) et de tordre ainsi le cou à « l’abstrait ». Ce qui parait abstrait n’est que mal expliqué. Participez à l’ouverture des esprits ! Reprenez votre plume ! Instruisez vos lecteurs ! Sortez de l’abstraction !
Vous êtes, Monsieur Boudine, assez difficile à suivre dans ce grand balayage que vous faites du destin de l’humanité à travers les âges, ce catalogue qui évoque une vieille école racornie en blouses grises où les enfants apprenaient par cœur et à la baguette des dates et des noms n’ayant pour eux aucun rapport avec le réel. Vous lisant, nous sommes un peu vos élèves, et je dois dire que, vous lisant, je reste sur ma faim de savoir.
Je ne crois pas que les pratiques sexuelles dominantes chez les chimpanzés puissent éclairer utilement la question qui aurait du logiquement vous occuper : l’avenir de la FI, puisque tel est le titre de votre série d’articles.
Vous ne voudriez d’un « chef » que pour vingt-cinq personnes (ça nous ferait beaucoup de chefs !). Il faudrait surtout qu’il ne rie jamais ni ne se moque (de vous ?), mais qu’il soit austère sans doute, voire sinistre, et nous en avons d’autres qui nous assènent avec sévérité des farces obscènes à longueur de discours et de commentaires « journalistiques ». Contre cela, l’humour aussi est une arme nécessaire, puisqu’il ne s’agit pas pour les esprits progressistes d’aujourd’hui d’organiser une saison de chasse à l’ours !
De l’autorité et de ses abus dans une société « première » de vingt-cinq personnes, on peut se faire une idée en observant certains rapports familiaux de notre temps et je ne vois pas que le consentement à la tyrannie soit une question de nombre, même il y a quarante mille ans. Au fait, c’est quoi une société « première » et qu’est-ce que ça change ?
Ceci dit, je vous accorde qu’il est tout à fait lucide de s’organiser à vingt-cinq chasseurs pour se dresser contre la finance internationale, les marchands de canons et de pétrole…
Nous avons dans la personne de Mélenchon un orateur dont la force de persuasion fédère des cœurs et des espérances dans notre univers profondément inhumain et décadent et qui propose une vision globale et cohérente du temps présent pour tenter d’en modifier les contours et de lui trouver les moyens de la justice. Et il est loin d’être seul, je vous le rappelle, à s’adresser au peuple en sollicitant son intelligence.
Le propre d’un discours utile n’est-il pas de livrer une explication du monde, avec un souci de pédagogie (une forme de talent qui permet de se faire clairement comprendre) ?
Or vous n’invitez pas à la cohérence dans ce fatras historico-atrabilaire dont on ne sait quel est au juste le propos et qui ne semble procéder que d’une posture intellectuelle.
La France Insoumise, c’est l’espoir qu’un monde décent est possible. N’y voyez-vous rien de positif ?
Olivier Foucher