Nous vivons une atmosphère fabriquée d’assignation à résidence dans un camp ou dans un autre et vous n’en parlez pas. L’ombre abominable de la Shoah plane au dessus de nos têtes et se mêle désormais de manière abrupte aux atrocités subies par les Palestiniens, mais vous n’en parlez pas. Vous vous cantonnez dans une position de confort qui exclut toute interrogation dérangeante quant à la réalité du champ de bataille en Palestine et aux affrontements qui en découlent ici. La haine produit des actes impardonnables que vous avez du mal à démêler quand la politique de Macron souffle sur les braises racistes de la discorde pour désunir, stigmatiser, brouiller les pistes.
Qu’un esprit universaliste, juif ou non, musulman ou pas, soit sommé de prendre parti dans un antagonisme inextricable où une souffrance en exclurait une autre est proprement invivable pour tous et produit une violence rebondissant indistinctement sur tous les juifs, tous les musulmans du monde et sur tous les universalistes. Et ça nous dit : débrouillez-vous avec ça !
Que faut-il penser des idéologies qui ont pu nourrir, de Hertzel à Balfour et à la brutalité militaire de Ben-Gurion, l’idée en elle-même monstrueuse du transfert de population toujours déchirant, tant des juifs d’Europe vers l’Orient que du nettoyage des Palestiniens qui en résulte ?
Où dès lors se situer si ce n’est par rapport aux faits ?
Les voix dissonantes dans les nations dominatrices sont toujours les plus éclairantes. Et la dissonance, quoique vous prétendiez, n’est pas dans vos moyens lorsque vous oubliez de faire intervenir Shlomo Sand, Ilan Pappé, Avi Shlaïm ou Norman Finkelstein, tous intellectuels juifs de renom attachés à déconstruire un récit biaisé de l’Histoire de la Palestine et qui sont beaucoup plus cruels pour Israël que la « partie de la gauche » que vous fustigez à tout propos dans une parole vaguement consensuelle qui finalement ne dérange personne parmi les tenants de la voie du milieu, les frileux tous bien d’accord pour ne surtout pas faire de vagues là où ça fait mal.
A qui donc faire porter le chapeau de l’antisémitisme qui a toujours rampé dans notre société travaillée par la xénophobie ?
A quel dessein mystérieux répond alors l’accusation floue et insidieuse d’ambiguïté de cette « partie de la gauche » dans l’exercice vicieux qui consiste à regarder à la loupe des petits bouts de phrases méticuleusement détachés de leur contexte ?
Quel est le but, Monsieur Plénel, s’il n’est de masquer votre propre ambiguïté sur un sujet où les déferlements de mépris médiatique sont à sens unique ? On peine, comme souvent, à vous situer, tant vous cultivez l’image d’un pur esprit presque pontifical qui délivre un brouillard intellectuel somme toute bien pensant, à gauche mais pas trop, antiraciste mais pas tant que ça, sans réelles convictions si ce n’est dans un entre-deux tiède, mollasse et verbeux qui est le propre d’une pensée bourgeoise.
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