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Billet de blog 15 juin 2024

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Non, il n'y a pas de purge à LFI

Le Monde titre aujourd'hui : "L’union de la gauche secouée par la purge à LFI.", "fauteur de division", "purge" ou "autoritarisme", autant d'anathèmes autour des cinq non-investitures de candidat.es sortant.es LFI : un prétexte pour le dénigrement médiatique de la gauche radicale. Brève analyse des frondes et factions à LFI.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Les médias dépendants des milliardaires, comme LeMonde, nous accusent aujourd’hui de purge parce que cinq investitures de député.es n’ont pas été renouvelées. Mélenchon, Dictateur des insoumis, dirigerait d’une main de fer contre toutes critiques. Pire, Clémentine Autain et François Ruffin ont des mots très durs vis-à-vis du comité électoral. Ce dernier écrit ce matin, samedi 15 juin : « Et que font-ils ? Ils divisent. Ils purgent des candidats sortants, sans autre motif qu’ils et elles ont une parole libre, sans laisse ni muselière. Et, dans le même temps, qui protègent-ils ? Adrien Quatennens, auteur de violences conjugales ».

Le motif de l’autoritarisme à LFI est une accusation constante depuis la campagne de 2017.

Les accusations s’inscrivent dans un contexte mondial de dénigrement de la gauche radicale mené par des thinks tanks libéraux. Son prétexte était la supposée proximité avec Maduro. Je -Gabriel- me souviens de la surprise d’Ignaccio Errejon, à l’époque n° 2 de Podemos en Espagne, lors des universités d’été de Le Vent Se Lève en 2018, « vous aussi ils vous ont fait le coup ?! ». Pareillement pour le Labour anglais qui a subi la même attaque en vénézualisme. Plus tard, l’accusation en « ambiguïté » avec l’antisémitisme aura provoqué en 2020 l’éviction de la branche radicale du Labour, aujourd’hui dirigé par un aristocrate libéral. Comme le montre le cas italien, un pays sans gauche radicale, dans le contexte actuel, ne peut mener qu’à la prospérité de l’extrême droit à terme. La gauche libérale, avec son horizon politique incompatible avec l'anticapitalisme, finit par servir de repoussoir, comme l’a démontré l’expérience hollandienne. Est-il nécessaire de rappeler que le PS n’est pas seulement comptable de l’ascension de Macron, mais également de la montée de l’extrême droite au second tour en 2017 ?

Mais alors pourquoi, des camarades, aujourd’hui Ruffin ou Autain, reprennent de telles accusations en autoritarisme ? L’histoire du mouvement donne des éléments de réponse.

La première critique sur le manque supposé de démocratie interne à LFI date des communications de Clémentine Langlois après sa défaite aux législatives de 2017, alors animatrice de mon groupe d’appui. La direction du mouvement avait encore des difficultés à s’extraire de l’influence du Parti de Gauche ; Bompard tentait d’organiser la prise de décision post-campagne autour de groupes d'action thématiques. Les personnes qui rejoignirent le Collectif Insoumis Démocrate de Langlois avaient toutes en commun d’être passées rapidement d’un statut décisionnel de cadre politique à celui de militant. Certains justifiaient leur faction par une prétendue fronde à la ligne politique. C’était le temps des souverainistes de gauche (Kuszanovic, Ventôse...) et des accusations en santé mentale contre Mélenchon. JLM répondit lors de la clôture des AMFIS qu’il n’y aurait pas de titre de distinction chez les insoumis.es, qu’ainsi nous étions tous et toutes militant.es et qu’en conséquence, les responsabilités ne résident pas dans l'occupation de postes mais dans l'action — le mouvement gazeux.

Toute organisation politique a besoin de renouveler les responsabilités. C’est un processus qui se heurtera toujours aux ambitieux. Pour cette raison, c’est le meilleur gage d’efficacité. LFI fait cela très bien, beaucoup mieux que les partis de gauche avec des statuts. La crise actuelle date de la dernière fois que le renouvellement a eu lieu en décembre 2023. Le bureau politique précédent était composé de dix-sept personnes du groupe parlementaire, dont faisaient parti Corbière, Garrido, Autain et Ruffin. Suite à la restructuration de 2023 avec la création de la coordination des espaces et du conseil politique, ces derniers n'ont pas vu leurs places de direction conservées, or certains dirigent déjà leur propre parti (Ensemble ! pour Autain, Picardie Debout pour Ruffin). Il y a dans toute organisation politique des forces centrifuges : lutter pour l’unité nécessite d’écarter les factieux qui se découvrent à chaque renouvellement du bureau politique. C'est ainsi qu'ils prétexteront toujours une fronde politique pour se gonfler d’importance.

Gabriel et Ophélie.

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