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Billet de blog 11 mars 2013

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Le retour de la raison d'Etat

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La raison d'Etat, comme réponse à la crise, semble à présent constituer à elle seule une gouvernance.

Elle est à l'oeuvre - littéralement - dans l'attitude du gouvernement face aux prises d'otages: il faut que l'on sache que ni l'action du gouvernement (la guerre au Mali) ni les cordons de sa bourse (le financement de groupes terroristes) ne seront plus d'actualité. D'ailleurs, nombre de commentateurs pointent une opinion publique qui aurait évolué: moins sensible, et plus raisonnable. Un Etat fort vaut bien, à présent, quelques civils tués.

Elle est partout présente, avec des formes moins littérales, dans l'action du gouvernement: le cap des 3 millions de chômeurs est franchi, mais c'est pour la bonne cause; le diesel vous pourrit la santé, mais c'est pour l'industrie française; le développement des connaissances est asservi aux finalités industrielles, mais peut-on faire autrement ?; des dictatures s'invitent à nos tables (Quatar, Russie, Chine ...), mais comment les tiendrions-nous à l'écart ? je renie mes promesses, mais l'Etat serait englouti si je ne m'adaptais pas; naguère, je constatais que le progrès des connaissances allègeait le travail de chacun, aujourd'hui je proclame que le travail doit être piqué au voisin ("compétitif", je dis) ...

La raison d'Etat est comme les lois de la physique: elle n'obéit pas à des valeurs, mais à des équations, tandis que le peuple est mu par des pulsions, des affects sans raison, des appétits incontrôlés qui l'amènent - littéralement - à se goinfrer en temps d'opulence, et à le regretter en temps de disette. Face à ces excès, l'équation de la raison d'Etat est celle qui équilibre le système, plutôt que de le voir sauter. Ainsi des chômeurs: comme les gaz, ils ne sont explosifs qu'à une certaine concentration, encore à déterminer empiriquement, mais qui se situerait aux alentours de 30 à 40% (cela dépend de l'âge). On peut - on doit - donc conduire le pays équilibré d'un côté par la pression des marchés, de l'autre par la limite explosive. Certains observent, effarés, un gouvernement socialiste mener un politique semblable à celle de son prédécesseur. Mais qu'il y -t-il de surprenant à constater que la même physique conduit aux mêmes résultats, et ce d'autant que se trouve à la barre un expert en synthèse, en équilibres, en compromis, en résolution d'équations ?

Parfois, le peuple perd toute raison: c'est une révolution. Pensant impossible d'extraire de la mécanique quoi que ce soit qui lui paraisse raisonnable, le peuple pète les plombs. Il brûle tout, ravage la maison. Ainsi, on commence à crier ici ou là qu'il serait salutaire de brûler la maison Europe; qu'on la mettrait dans un bateau, avec tous les politiciens - fatalement corrompus. Et ceux qui gardent l'Etat, de pointer le chaos qui s'ensuivrait; de prétendre, même, que compter sur l'échec serait déjà engloutir la raison.

Pourtant, à y regarder de près, l'explosion elle-même fait partie du système. Seuls les moins informés peuvent la confondre avec quelque occurence aléatoire. Les autres savent qu'il ne s'agit que d'une erreur de calcul, qui leur fit dépasser le périmètre où la raison se garde.

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