La 'neutralité du net', que le gouvernement vient de décider de consacrer par la loi, commence à furieusement ressembler au libre renard du poulailler libre, si l'on s'en tient au point de vue des commerçants distributeurs de contenus.
La décision de Mozilla Firefox d'inclure dans son navigateur un outil de protection - visant à barrer la route aux publicités ciblées basées sur l'usage de cookies communiquant aux fournisseurs de publicité une trace des navigations - provoque un tollé de la part de l'industrie publicitaire, qui avance rien moins que sa mort assurée, si rien n'est fait pour barrer la route à cette initiative.
Tout d'abord, une telle industrie ne mourrait pas, dut-elle affronter un barrage généralisé la ramenant au temps des écrans publicitaires télévisuels: la multiplication des supports ne fait que diminuer le coût de la denrée, et il ne fait pas de doute que les industriels continueraient à dépenser sensiblement le même budget, pour des produits plus impactants par leur rareté.
Ensuite, l'initiative de ces industriels, qui proposent à l'internaute de 'librement' s'abonner au système 'on line choice' de refus des publicités ciblées, est une illustration directe du déséquilibre de la paix armée qu'ils proposent. En effet, face à la liberté - bien réelle - des entreprises de ne pas adhérer (voire de ne pas respecter leurs engagements) à un tel système, l'internaute n'aurait que la liberté de s'astreindre à cocher des cases le protégeant hypothétiquement des intrusions d'un nombre restreint d'entreprises.
Remettons les choses dans l'ordre: nos explorations du net ne regardent que nous, et nous sommes en droit de refuser à quiconque d'en prendre connaissance (qui n'a pas été pourchassé sur le net pendant des semaines après avoir consulté le prix d'une cafetière lève le doigt). La neutralité du net, ce n'est pas la réciprocité (encore qu'il serait interessant de se voir autorisé de pénétrer les serveurs publicitaires à notre tour), ni la mise à disposition obligatoire de données personnelles.
Il n'est pas exclu que les éditeurs tentent de faire valoir à présent quelque argutie juridique basée sur la neutralité du net,ou bien de mettre dans le plateau de la balance l'appauvrissement des contenus diffusés en direction des navigateurs récalcitrants, argumentant qu'il peuvent bien à leur tour diffuser ce qu'ils veulent à qui ils veulent. Ainsi, pour bénéficier de tous les services rendus par Google ou autre, il nous faudrait librement accepter qu'ils nous tracent.
Ceci ne peut que nous inciter - encore une fois - à demander la constitution d'un moteur de recherche européen non commercial (voir plus bas).