Il n'y a qu'une question qui vaille, à propos de la 'renonciation' de Benoit XVI: cela renforce-t-il l'indépendance du pape, ou bien l'affaiblit-elle ?
Lorsque Jean-Paul II expirait en direct sur nos écrans, il signifiait au monde qu'il était là par Dieu, aussi longtemps que celui-ci en déciderait. Instrument, il était aussi la toute puissance, son pouvoir n'étant lié à aucune contingence matérielle, sa raison, son corps, dussent-ils le quitter avant sa mort. Les détracteurs de la méthode avancent que ce corps déchu est alors le jouet des intrigues de palais, que le temporel s'empare en fait de la chrétienté, le temps de l'agonie médiatique.
Lorsque Benoit XVI renonce, il explique que la faiblesse de son corps ne lui permet plus de gouverner, qui plus est dans le sens réformateur qu'il indique à son successeur. Il est clair que la décision lui parait être inspirée de Dieu lui-même, qu'il consulte dans le secret de sa conscience. Les détracteurs de la méthode lui reprochent d'ignorer le pouvoir de Dieu, et d'abaisser au rang de mandat la divinité de sa charge, qui plus est durablement car ouvrant la porte aux pressions qui s'exerceront alors sur les prochains papes.
D'un côté le miracle de cet homme mort qui marche encore; de l'autre la finitude humaine, qui fait renoncer à parler pour Dieu, dès lors que le corps lâche ?
Pencher pour l'une ou l'autre hypothèse est sans doute faire preuve d'une foi bien faible: Dieu, après tout, peut bien inspirer à l'un d'offrir son calvaire à la foule, et à l'autre sa conviction qu'Il inspirera le successeur autant qu'il le fit de lui même. Ne craignons donc pas que la décision d'un seul homme puisse changer si peu que ce soit le royaume de Dieu (s'il existe)!
