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Billet de blog 26 janvier 2014

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Gouvernance des collectivités rurales: le recul de la démocratie

Si on ne sait si la méthode Hollande pour réformer les collectivités locales aura une quelconque effet sur les dépenses qu'elle prétend faire évoluer, on peut déjà constater que la méthode sera une illustration de la stratégie de l'édredon mise en oeuvre, partout ailleurs.

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Si on ne sait si la méthode Hollande pour réformer les collectivités locales aura une quelconque effet sur les dépenses qu'elle prétend faire évoluer, on peut déjà constater que la méthode sera une illustration de la stratégie de l'édredon mise en oeuvre, partout ailleurs.

Résumons d'abord la stratégie Hollandaise: plutôt que des réformes annoncées, supposées génératrices de débats longs, parfois douloureux, pour lesquelles on évaluerait patiemment les effets, qui de surcroit se verraient apparentées à une politique ou à une autre, souffriraient du risque de s'avérer inefficaces et de devoir être revues, signant l'échec de la politique présidentielle, l'option adoptée jusqu'à présent est de manoeuvrer boutons, vannes et robinets disponibles dans l'espoir d'étouffer la crise, sans tout à fait occire le patient.

Parfois, le patient semble au bord de l'asphyxie: alors on donne à l'édredon un semblant de forme, qu'on nomme "social-démocratie", ou "pacte de responsabilité", expressions totalement creuses qui permettent de reprendre le cours de la stratégie de l'édredon (après tout, que contient le pacte et comment sera-t-il mis en oeuvre - nul n'en sait vraiment rien, sinon qu'il devrait mobiliser 'au moins' 50 milliards d'économies).

En matière de réforme des collectivités locales, c'est la même stratégie qui est mise en oeuvre. Plutôt que de proposer une réforme des institutions (qui serait débattue, provoquerait la révolte de tels ou tels barons locaux, nécessiterait une large majorité pour une réforme constitutionnelle ...), il convient, selon F. Hollande, d'inciter fortement à ce que les choses se fassent d'elles-mêmes, autrement dit d'appuyer avec conviction sur l'édredon.

S'il ne faut pas nier à cette politique la nécessiter de parvenir à des résultats en dépit de profonds blocages de l'institution, il faut cependant souligner le grave effet secondaire de la méthode: celui de saper la démocratie, et pas seulement en escamotant le débat. Le danger est en effet que se mettent en place des pouvoirs s'éloignant du contrôle citoyen.

L'exemple des communes et des communautés de communes est symptomatique de la méthode (et montre qu'elle n'est pas le seul fait du présent mandat). S'agissant essentiellement de collectivités rurales, il laissera peut-être froids ceux qui ont pour habitude de penser que les métropoles seules seraient l'alpha et l'omega de l'action politique, en dépit de ce que ces collectivités recouvrent le quart de la population.

Ce qu' on y voit à l'oeuvre est le grignotage des différentes prérogatives communales, au profit de la communauté de communes: écoles, aménagement urbain, implantations industrielles, options écologiques, maîtrise de l'espace en général. Parallèlement, la proximité des administrés et des administreurs - matérialisées par l'élection du maire - n'a pas son équivalent dans cette nouvelle organisation: ce sont les grands électeurs des conseils municipaux qui procèdent à l'élection du président de la communauté de communes (ou pour les communes de plus de 1000 hab.  les représentants eux-mêmes grands électeurs), et l'expression d'une commune ne se fait plus qu'au travers d'un conseil communautaire, dont la pratique interdit d'affirmer qu'il s'agisse d'autre chose qu'une chambre d'enregistrement où d'éventuelles voix singulières sont rapidement étouffées sous l'édredon d'un intérêt supposé partagé, et ce d'autant plus efficacement que la présidence de la communauté se trouve souvent être aussi un influent conseiller général.

S'il venait à quiconque l'idée de défendre que l'élection d'un président par des grands électeurs serait une évolution favorable de la démocratie, prenons un exemple concret. Supposons qu'un industriel veuille ériger sur votre commune une ferme de 1000 vaches. Supposons que les habitants riverains, pour des raisons d'environnement local, mais aussi de leur conception de l'agriculture ou de la condition animale, ne veuillent pas de ce projet. Leur action aura-t-elle même poids suivant que le permis est délivré par le maire, qu'ils élisent, ou par la communauté de communes, dont la plupart n'auront pas à subir l'impact direct du projet  ?

On n'épuisera pas ici le sujet de l'équilibre entre la représentation démocratique et l'intérêt général (il est pourtant d'actualité, en témoigne le projet de Notre Dames des Landes, et inclut, rappelons-le, le problème du respect des minorités). Pour autant, ce simple exemple permet déjà de conclure sur un point: ces réformes se font sans qu'on prenne le soin préalable de réformer les mécanismes démocratiques - et c'est peut-être même leur principal intérêt. Quant aux efforts du patient pour se dégager de l'édredon, ils prennent parfois la forme d'un bulletin Front National ...

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