Comme vous le savez sûrement, de nombreuses personnes ont souhaité l’interdiction de Bertrand Cantat allant jusqu’à s’infiltrer dans son concert à Montpellier pour déclencher une émeute.
Des pétitions ont tourné, des débats ont eu lieu, et aujourd’hui c’est chose faite, elles ont gagné. L’Olympia dans son immense lâcheté à annulé les deux dates qui auraient dû s’y dérouler par crainte d’un trouble à l’ordre public.
Ainsi je souhaite m’adresser aux personnes qui ont provoqué cette décision.
Vous avez gagné. Je suppose que vous en êtes fiers, que vous êtes certains d’avoir eu un impact bénéfique sur le milieu de l’art, que c’était juste.
Je ne vous félicite pas. Vous venez de porter un coup fatal à l’art et à sa liberté d’expression en créant ce qu’on appelle une jurisprudence.
Car demain, sachant que ça a fonctionné pour Cantat, d’autres artistes ayant fait polémique pourraient se voir à leur tour privés de concert. Ça pourrait toucher Orelsan, Roger Waters, Eminem et tant d’autres, voire même des artistes que vous appréciez. Car quiconque se sentant offensé pourrait exiger l’interdiction de quelqu’un.
Et je me demande maintenant si c’est réellement ce que vous souhaitez.
Souhaitez-vous revenir à l’époque où Jean Ferrat était interdit pour avoir chanté Potenkine ou avoir froissé Jean D’Ormesson avec Un Air de Liberté? Souhaitez vous que l’art devienne tellement restrictif que personne n’oserait dire autre chose que de simples banalités?
Si ce qui vous dérange est le fait que Cantat aie commis l’irréparable et l’impardonnable il y a 20 ans, ce qui est indéniable. Demandez vous aussi s’il faut aussi interdire l’édition de Paul Verlaine pour avoir tiré sur Arthur Rimbaud. Demandez vous si le droit à la rédemption est illusoire, sachant que d’une part Cantat a purgé sa peine et d’autre part le concert qu’il comptait donner n’est aucunement lié à cette affaire.
Si demain un artiste devra se demander avant d’écrire s’il y a une moindre chance que ça dérange quiconque sous peine de se voir interdire, vous féliciterez vous d’avoir tué l’art par votre fanatisme? Ce monde polissé de demain régit par la censure peut nous mener droit à la dictature de la pensée et vous en serez les instigateurs anonymes.
Donc encore une fois, je ne vous félicite pas, je ne vous remercie pas. Étant moi même artiste je conserverai éternellement ma liberté d’écrire comme bon me semble et si ça vous dérange, je vous emmerde avec fierté pour cet art que je défend.
Vincent Lartaud, poète et musicien amateur et passionné d’art.