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Le mouvement féministe existe tout de même, bien que plus minime et s'organise petit à petit pour prendre de plus en plus de place.
Pour ça, j'ai été interroger la militante Jhoselyn Acosta travaillant pour l'association féministe Demus Péru pour mieux comprendre le mouvement mais aussi ses futurs enjeux.
Le féminisme péruvien et ses spécificités
Pour Jhoselyn Acosta, l'une des premières étapes est de : "décentraliser le féminisme des villes et créer des antennes régionales incluant les femmes des Andes et d'Amazonie". Le Pérou étant un pays immense et très disparate avec de nombreuses ethnies, les problématiques sont diverses. Le féminisme urbain, comme elle le définit, n'est pas du tout inclusif des femmes issues des régions rurales.
Jhoselyn Acosta revient sur les privilèges d'être militante à Lima (ville pas du tout représentative du reste du Pérou) : " En tant que féministe, je comprends la colère et le désir d’absolument tout vouloir brûler. Mais je comprends que certaines ont besoin de temps pour réfléchir et assimiler le féminisme." Cette différence d'éducation, de comprendre le sexisme de la société et sa violence qui en découle ne se fait pas de la même manière chez toutes. Comme Jhoselyn Acosta le dit "Tout le monde n'a pas accès aux théories féministes, mais aussi d'identifier la violence du système".
Le mouvement est donc en pleine émergence pour trouver " sa propre identité, tout en apprenant sans cesse".
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Les violences patriarcales, réel enjeux
Le mouvement féministe péruvien se construit sur l'expérience des femmes sur les violences qu'elles subissent. Les féminicides sont une problématique ultra importante et l'inaction des gouvernements précédents et actuels n'arrangent rien. Pour Jhoselyn Acosta "le féminisme est un outil pour combattre la société actuelle". Pour elle, c'est le mouvement ultime qui combat à la fois le patriarcat, le capitalisme et toute forme de violences systémiques de nos sociétés actuelles.
Les féministes péruviennes militent en essayant d'occuper les espaces, de communiquer (par tag dans les rues, sur les réseaux sociaux), mais militent aussi à travers l'art et d'autres formes plus subtiles. Leurs outils diffèrent peu des autres pays. La plupart des militantes sont très présentes sur les réseaux sociaux, cela permet de communiquer entre elle (de se soutenir) mais aussi de faire des actions virales en particulier sur Twitter.
Jhoselyn Acosta admet que sur les réseaux sociaux elles peuvent être "plus agressives et utiliser un langage et des mots plus poussés pour se définir dans le mouvement féministe et en tant que féministe".
Colonisation de la pensée féministe
La plupart des outils sociologiques et la définition même du féminisme ont été pensés et créées par les femmes occidentales. Pour Jhoselyn Acosta "le féminisme urbain, le féminisme occidental colonise les pensées et n'est pas le reflet de toutes les réalités".
Je pense qu'on a notre rôle à jouer pour soutenir les femmes péruviennes, même en Europe. Iels faut qu'on pense plus inclusif, qu'on repense nos bases théoriques et nos croyances car iels ont été avant tout pensé.e.s pour des femmes blanches occidentales. Notre vision du féminisme ne peut pas se transposer à l'échelle mondiale.
Clémence Rio avec la participation de François Perdriau
Interview réalisée en anglais et traduite par Rio Clémence