C'est une petite dizaine de syndicalistes sud-coréens qui ont été accueillis ce 16 décembre sur le parvis de la gare Part-Dieu par des militants de la CGT et des Jeunesses Communistes. Lyon était l'une des dernières étapes d'un périple européen de deux semaines qui les aura fait passer par la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg, l'Allemagne et la Suisse. Les raisons de ce voyage sont multiples. Kim Sung Hwan, le président du syndicat général de Samsung, aujourd'hui interdit, a écopé de trois ans et demie de prison pour ses luttes syndicales. Un ancien patron de PME qui travaillait pour Samsung a dénoncé les méthodes du géant sud-coréen, qui fixait lui même les prix et a fait fermer plusieurs de ses sous-traitants. Mais le thème le plus souvent évoqué par les syndicalistes a été la santé au travail. Et pour cause. Plusieurs personnes venues témoigner avaient perdu des proches, victimes de leucémies après avoir travaillé chez Samsung.

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Au début de la manifestation, à 16h, il commence à faire froid. Certains passants s'arrêtent pour écouter. Beaucoup ne s'arrêtent pas. D'autres glissent une ou deux phrases racistes, certains crient "Vive le patronat !".
Malgré tout, les témoignages se sont succédés, dignes. A chaque fois ponctué par le slogan des militants "Samsung out !". De leurs voix fortes, empreintes de rage, les syndicalistes racontent être tombé malades, avoir perdu des proches, morts de leucémies après plusieurs années chez Samsung. Kim Ji Sook a perdu sa soeur, puis sa mère, morte de chagrin. Pendant neuf ans, elle a travaillé à domicile avec un poste utilisant du nickel, un métal dangereux. Elle estime qu'environ une soixantaine de personnes avaient des conditions de travail semblables aux siennes. Soixante employés qui travaillent chez eux en ayant recours à des produits toxiques. Cela ne fait que six mois qu'elle sait que la maladie de sa soeur est due à son environnement de travail. Pourtant, la direction de Samsung lui avait garanti le contraire.
Jeaong ae Jung, elle, a longtemps travaillé dans une entreprise fabriquant des semi-conducteurs pour le compte d'une des multiples filiales de la multinationale, son mari ingénieur, lui, été emporté par la leucémie. Samsung n'a jamais reconnu ce mal comme étant une maladie liée au milieu professionnel de ses employés. Le secrétaire général du Syndicat Général de Samsung a lui aussi perdu sa fille, victime de la même maladie. Ce n'est qu'après 7 ans de procédures judiciaires qu'a enfin été reconnu le lien entre la mort de sa fille et ses conditions de travail. Les militants sud-coréens n'ont d'ailleurs pas manqué de rappeler la corruption des médias, des politiciens et même de la justice de leur pays, très infulencés par le géant Samsung.
Les militants de la CGT et des JC, présents sur place, ont profité de l'occasion pour rappeler que la situation Coréenne pourrait être celle de la France dans quelques années. Pour l'instant, comme le dit Amine, membre du Collectif Jeune de la CGT : "La répression qu'on a connu pendant la loi El-Khomri, c'est un minimum chez eux.", mais, soulignent les syndicalistes, avec l'inversion de la hiérarchie des normes et la sape du droit du travail, la situation va empirer. Pour Pierre, membre du Comité des travailleurs privés d'emploi et précaires de Lyon, il est important de faire de la question de la santé au travail une problématique internationale. Il faut qu'elle soit prise en compte aussi bien en Corée du Sud, qu'en France.
A la fin des discours et des témoignages, plusieurs spectateurs ont applaudi, et certains sont venus adresser des mots d'encouragement aux syndicalistes sud-coréens. En tout cas, nous repartons tous chez nous avec cette idée en tête : Derrière les produits qui sont dans les rayons de nos supermarchés et qui seront sous nos sapins à Noël, il y a des gens qui ont donné leurs vies pour les fabriquer.