La France a connu dans son histoire plusieurs guerres de religion. Les croisades lancées contre les musulmans, désignés alors comme païens, s’en sont suivi les guerres entre catholiques et protestants. Ces derniers étaient désignés comme hérétiques.
Ces guerres ont endeuillé plusieurs contrées à cause de l’intolérance, des visées hégémoniques de certains dirigeants de l’époque et de la place accordée à une seule religion : la catholique.
Ces discordes ont duré plusieurs siècles et ce n’est qu’en 1905 que la loi sur la laïcité a pu supprimer la mainmise de l’Etat sur le culte et inversement. La séparation entre l’église et l’Etat est alors sacralisée.
La France est arrivée à ce résultat à l’intérieur de ses frontières. La volonté du peuple, aidée par la clairvoyance d’une classe politique progressiste a offert à ce pays une loi très importante. Cette loi est l’expression d’un peuple et d’un pays. Il a fallu plusieurs décennies pour accompagner et éduquer un peuple à cette séparation de l’église et de l’Etat et aux principes de la laïcité.
Cette laïcité, fait partie des exceptions même parmi les pays démocratiques. Dans les pays anglo-saxons, la laïcité n’est pas du tout perçue comme en France. Les citoyens et autres sujets de sa majesté, peuvent se vêtir comme ils le souhaitent même dans les établissements scolaires et dans les administrations. Mais personnes n’a le droit d’imposer son culte à autrui.
- Ne voit-on pas des policiers sikhs en Angleterre arborant un turban au lieu d’un casque ?
- Ne voyait-on pas des militaires algériens pendant les deux guerres mondiales, porter des turbans, alors qu’ils étaient français à l’époque ?
La mondialisation à laquelle nous assistons, nous apprend que les discours traversent les frontières instantanément. Tous les pays n’ont pas eu le même vécu que la France. Ils n’ont pas eu de guerres de religions comme la France. Ils ne comprennent pas ce qu’est la laïcité.
La France en affichant son droit au blasphème des symboles religieux se heurte inéluctablement à cette incompréhension.
- Doit-on ignorer ces manifestations par le monde qui expriment toutes la même chose : la caricature du prophète Mohammed est la provocation suprême ?
- Doit-on mettre la vie des français dans la métropole ou ailleurs en péril sous prétexte que le droit d’expression doit primer et doit être sans limite quitte à heurter les convictions des autres peuples ?
- A-t-on le droit d’exiger que le monde entier doive intégrer les principes de laïcité ?
- La France s’installe comme le seul pays qui a tout compris, les autres sont stupides et intégristes ?
- N’y a-t-il pas eu assez de drames au nom de la liberté que la France défend ? De quelle liberté parlons-nous ? De celle qui consiste d’abord à respecter les convictions d’autrui ? Ou de celle qui bafoue toute croyance, toute différence et qui s’érige en modèle unique ?
La France se défend d'être le pays de liberté d’expression et de conscience. Mais permettez-moi de rappeler que l'hebdomadaire Charlie Hebdo qui se nommait naguère Hara-kiri*, a été censuré en 1970, après la publication de caricatures jugées par le ministre de l’Intérieur injurieuses à l’égard de la « sacralité de Charles de Gaulle », lors de ses obsèques.
Le pays de la liberté de conscience accorde la sacralité à un homme politique et la refuse à un prophète ! Tous les prophètes, juif, chrétien et musulman, sont sacrés pour les musulmans.
Offenser leur sacralité est perçue dans les pays musulmans, plus un milliard et demi d'individus, comme une atteinte aux fondements des droits de l’Homme.
Les valeurs de la laïcité ne doivent pas s’écarter de leurs objectifs initiaux : séparation de l’église et de l’Etat et liberté des cultes. Il n’y a pas lieu de s’attaquer à tel ou tel commerce, kebab ou pas, halal ou pas ... Il n’y a pas lieu d’exiger tel ou tel accoutrement pour exprimer sa laïcité. La tolérance et la laïcité ne doivent pas céder le pas à l’intégrisme laïcard.
C'est un point de vue comme un autre.
* Le titre était : Bal tragique à Colombey, un mort.