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Billet de blog 28 juillet 2016

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La maman et Daech

Les attentats s’enchaînent et c’est toujours la même consternation face à l’horreur, la même impuissance que j’éprouve, la même colère aussi. Le dernier attentat, l’assassinat d’un prêtre dans son église à Saint-Étienne-du-Rouvray, m’a renvoyée, de sinistre mémoire, à tous les autres attentats mais aussi aux moines de Tibhirine lâchement assassinés en 1996, en Algérie.

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La maman © HK & les Saltimbanks, citoyen du monde

Mais ce qui a fait écho à mon cœur de mère, ce sont les paroles de cette autre mère rapportées ce matin dans le journal. La mère du deuxième assaillant de l'église qu’on n’avait pas pu identifier tant son visage était défiguré. Elle lui avait laissé ce message sur son téléphone :
Malik, c’est maman, je ne sais pas où t’es. J’ai une mauvaise nouvelle. Rappelle-moi, c’est la police qui est venue. Elle raconte des conneries. J’espère qu’il ne t’est rien arrivé mon fils. Je t’aime, tu me manques grave.
« J’espère qu’il ne t’est rien arrivé mon fils. Je t’aime, tu me manques grave. » Combien de mères à travers le monde ont prononcé cette dernière phrase devenue presque banale à force d’être répétée ? Peu importe dans quelle circonstances et à quelle occasion, nous l’avons toutes murmuré un jour ou l’autre à nos fils quand ils étaient dehors et qu’ils oubliaient de nous faire signe, signe de vie.
J’imagine la souffrance de cette femme, de cette mère confrontée à la douleur de la perte d’un enfant et en même temps à une insupportable culpabilité.
On nous parle déjà ici et là de guerre des religions. Guerre contre qui au juste ? Contre nos propres enfants ? Religions, lesquelles ? Celles qui opposeraient, comme au bon vieux temps, les catholiques et les musulmans, les catholiques et les juifs, les catholiques et les protestants ? Ou mieux encore les catho-musulmans-protestants, tous ensemble pour une fois contre les athées, ces mécréants ? Et quoi d’autre encore ?
Parmi toutes les définitions étymologiques du mot « religion », celle que je préfère vient du latin « religare » qui signifie « relier ». Relier tous les hommes entre eux pour permettre le vivre ensemble dans n’importe quelle société. Cela, je crois, est, ou devrait être le socle commun à toutes les religions qui ont souvent tendance à l’oublier.
Daech, acronyme de « état islamique » comme l’a si judicieusement rappelé notre président, n’a pas spécialement ciblé des catholiques en profanant une église et en y égorgeant l’un de ses représentants. D’ailleurs, on ne compte pas le nombre de mosquées qu’il a également profanées de ses crimes dans beaucoup de pays musulmans. Il n’y a pas de symbole à y voir là hormis celui de nous narguer encore et encore. Hormis celui d’utiliser nos enfants psychologiquement fragilisés, en quête d’identité ou d’idéal, pour mener à bien ses entreprises de destruction massive.
Je suis d’accord avec François, je veux dire l’autre François, le Pape, qui nous dit que ce n’est pas une guerre de religions. Personnellement, et ça n’engage que moi, je pense que Daech n’est pas moins qu’une de ces monstrueuses multinationales du genre Monsanto qui veut mettre à genoux la terre entière, agrandir son territoire, étendre son pouvoir insatiable qu’il veut absolu et peu importe les moyens utilisés pour l’atteindre. Où est la religion là-dedans ?
Qu’on arrête donc d’associer le mot ISLAM à ces être sanguinaires qui n’ont fait que le prendre en otage. Non seulement l’islam ne leur appartient pas mais ils ne le méritent pas car ils sont à des années lumière de son message de paix et d’amour.
Autant je n’étais fichtrement pas d’accord pour la déchéance de nationalité (que je n’ai toujours pas digérée), autant je réclame à hauts cris la déchéance de l’islam pour eux ! Pour que des millions de musulmans n’aient plus à rougir de leur religion, pour que nos enfants ne les voient plus non pas comme des héros détenteurs de je ne sais quelle vérité mais comme ce qu’ils sont réellement : des assassins et des imposteurs.
Daech (en attendant de lui trouver un autre nom plus approprié) se joue de nos failles, de nos manques, de nos contradictions, de nos erreurs, et de nos peurs, autant de brèches dans lesquelles il s’engouffre avec avidité pour y semer le chaos et la division.
La démocratie, la république que ces assassins ont en horreur, sont certes notre trésor national mais nous avons aussi un autre trésor : notre jeunesse, fougueuse, impatiente, force vive qui ne demande qu’à éclore. A nous de la protéger contre tous les Daech. A nous de lui faire place, toute sa place. Reconnaissons-là, regardons-là, écoutons-là, respectons-là, donnons-lui de bonnes conditions de vie. Nommons-là par son nom plutôt que par sa religion. Arrêtons de la contrôler au faciès plusieurs fois par jour. Donnons-lui de quoi rêver, aimer, rire, partager, et même s'indigner. Donnons-lui l’espérance.
Empêcher Daech de recruter nos enfants comme de la chair à canon bon marché et ne plus le nommer « État islamique » mais « Grand Imposteur de l’Islam » seraient peut-être un début de réponse, qu’en pensez-vous ?

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