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Billet de blog 10 octobre 2023

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Israël-Palestine, la seule alternative : un État binational

L’attaque menée par le Hamas contre des civils israéliens, a permis à Netanyahou de sortir grandi de la violence politique qu’il infligeait à son propre peuple par son projet d’affaiblissement de l’autorité judiciaire et de sa capacité constitutionnelle à limiter le pouvoir de l’exécutif.

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Le piège de la guerre


Ce lundi 9 octobre un post sur les réseaux sociaux du premier ministre israélien où il proclame fermement sa volonté exterminatrice de la population de Gaza n’a manifestement pas beaucoup choqué les commentateurs médiatiques (je n’ose pas leur attribuer le qualificatif de journalistes), pourtant unanimes, et légitimes, à dénoncer les bains de sang menés par les terroristes du Hamas.


Il y a ici un piège odieux.


Tout d’abord un piège contre celles et ceux qui moralement ou politiquement soutiennent le peuple palestinien dans son calvaire quotidien, et dans son droit à l’intégrité territoriale et à la sécurité.


C’est le piège du « deux poids, deux mesures », cette logique qui depuis trente ans traite inégalement la mort d’un israélien et celle d’un palestinien.


Cette logique qui fait détourner le regard des dirigeants occidentaux et des communicants des violations permanentes du droit international par l’exécutif israélien. Car Israël emprisonne, sans procès, des femmes, des hommes, des enfants palestiniens. Car Israël ne respecte aucune des résolutions de l’ONU condamnant l’apartheid, l’occupation, le nettoyage ethnique dont sont victimes les populations palestiniennes. Car Israël bombarde sans discrimination des populations civiles. Car Israël laisse faire les colons les plus fanatiques quand ils détruisent des maisons palestiniennes, participent à des pogroms, mettent en place un nettoyage ethnique.


Révoltée par cette injustice flagrante, une partie de la gauche tombe dans le piège, et même sans exprimer de joie à l’annonce des massacres perpétrés par les commandos du Hamas, elle semble oublier que si les Palestiniens subissent une situation indigne et inhumaine, les Israéliens, eux-aussi sont les otages de leurs dirigeants, des juifs intégristes, et la cible des islamistes du Hamas.


Car voilà l’autre aspect du piège. Un piège que les sionistes ont tendu aux juifs du monde entier, et à la population Israélienne. Un piège sécuritaire et identitaire. Alors qu’en 1993, Yitzhak Rabin offrait de rencontrer Arafat pour engager un processus de paix, c’est bien le Likoud de Monsieur Netanyahou qui torpillait en sous-main les négociations en finançant les actions terroristes du Hamas et du djihad islamique.


Le premier ministre israélien qui avait signé les accords de paix à Oslo avec Arafat n’était pas une colombe. Il a en son temps fait la guerre, traqué les militants de l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP), qui elle-même pratiquait le terrorisme, avec comme chef, Yasser Arafat.


Les citoyens israéliens, qui dans les années 90 pouvaient espérer vivre enfin en sécurité avec leurs voisins palestiniens ont été aussi les victimes et les otages d’intérêts politiques qui se dissimulent derrière le fait religieux.

Le piège identitaire


En 1993, Yigal Amir un jeune juif intégriste de 23 ans assassinait Rabin, et avec lui le processus de paix. En 1996, Netanyahou remportait les législatives par une campagne basée sur la sécurité et les préjugés racistes, et devenait une première fois premier ministre.

En trente ans, le piège identitaire s’est refermé sur les Israéliens comme sur les Palestiniens.

D’un côté, la société israélienne subit continuellement les progrès des groupes juifs intégristes qui imposent le strict respect du shabbat, ciblent les femmes aux mœurs « trop légères », et ont désormais obtenu de la Knesset une réforme de la constitution qui ne donne la pleine citoyenneté qu’aux israéliens « juifs ».

De l’autre côté, la corruption du Fatah (parti politique laïc de Yasser Arafat), l’éternelle instrumentalisation et trahison des dictatures arabes de la « cause palestinienne », et la passivité criminelle de la « communauté internationale » ont renforcé les partis religieux intégristes musulmans.

Dorénavant un Israélien est un « juif » et un Palestinien un « musulman ». Exit la riche histoire multiculturelle, et multiconfessionnelle de ce territoire.

Désormais l’ignorance, l’obscurantisme et les vils intérêts de quelques entrepreneurs en identités ne promettent que la guerre, ne promeuvent que la haine, et ne répandent que la violence et la mort.

Exit aussi la promesse d’une vraie démocratie au Proche-Orient, car en attaquant massivement des civils israéliens par des massacres immondes, le Hamas a offert à Netanyahou de sortir des difficultés politiques dans lesquelles sa coalition d’extrême droite s’était empêtrée.


Unité nationale, sacrifice du droit


Depuis le début de l’année en Israël, des manifestations de masse s’opposaient aux projets de suppression de la capacité des juges à limiter les appétits monstrueux de l’exécutif. La séparation des pouvoirs, fondement de toute démocratie, était dans la ligne de mire de la coalition extrémiste issue des dernières élections.

L’inégalité de traitement que subissent les Palestiniens se trouvait même mise en cause par des manifestants israéliens qui tout d’un coup, percevaient dans la dérive de leur État l’envers de la médaille de l’apartheid et de l’occupation.

Dans l’armée, dans les services de renseignement, même chez les colons, l’heure de la rupture, de la révolte sociale semblait arriver inéluctablement.


Puis, soudain, prise en otage du discours nationaliste du gouvernement et des assassinats perpétrés contre des civils, hommes, femmes, enfants innocents, les yeux brouillés de larmes, et la bouche pleine du goût du sang, la société israélienne bascule dans l’unité nationale contre le terrorisme.

Un terrorisme manifestement sans visage, sans responsable, un terrorisme collectif qui conduit à la déshumanisation des palestiniens, à leur châtiment collectif, indiscriminé, barbare, aveugle, comme l’a si souvent été la politique d’Israël à leur égard.

Des ruines de Gaza ne surgiront que de nouveaux « monstres », des rangs de Tsahal ne sortiront que des criminels, et du rêve d’une paix assassinée ne survivront que des « traîtres » à leur nation, leur « race », leur religion.

Un État binational, seule issue au conflit

Si les accords d’Oslo constituaient une paix fragile et inégale, c’est d’abord que les concessions de l’OLP aux dirigeants Israéliens étaient trop dangereuses. Israël ne reconnaissait pas de facto un État Palestinien à ses frontières, mais simplement une autorité palestinienne, en charge de la sécurité des territoires palestiniens et entièrement dépendante de la bonne volonté de son voisin pour ses relations économiques avec le monde extérieur.

Dès lors, la moindre crispation, le moindre attentat venaient suspendre « l’autorité » palestinienne, et mettre à nu l’absence de souveraineté de son peuple et de ses dirigeants. Cette comédie ne pouvait durer longtemps, et au bout de quelques années, c’est le Hamas qui incarna la lutte contre l’occupation, apparaissant, à tort certes, comme plus intègre et plus efficace que le vieux Fatah d’un Arafat discrédité et vieillissant.

Désormais qui peut croire à la paix ? Peut-être les seules âmes sensées, les seuls cœurs purs qui vomissent à la vue du sang et de l’injustice sans distinction de couleur de peau, de religion ou de nationalité.

Palestiniens et Israéliens vivent sur une même minuscule bande de terre au bord du précipice géopolitique qu’est le Proche-Orient. La colonisation israélienne n’est pas le fait d’une métropole, un départ des populations juives est inenvisageable et inacceptable. Il en est de même pour les Palestiniens, dont les réfugiés de 1948 et 1956 continuent de pourrir dans les camps jordaniens et libanais depuis quatre générations.

Les deux populations subissent, certes de manière inégale, une situation de psychose, traumatique et liberticide. La solution à deux États est impossible, tant les enchevêtrements de peuplement et le réduit géographique de la région mèneraient à des conflits permanents.

Un seul et même État pour deux peuples, dotés des mêmes droits politiques, des mêmes protections juridiques, des mêmes droits sociaux, voilà la seule et unique solution à ce conflit de 70 ans.

On ne fait pas la paix avec ses amis, on fait la paix avec ses ennemis. L’Europe, continent de tant de conflits, l’Europe qui a connu les guerres de religion et Auschwitz n’est que l’ombre d’elle-même lorsqu’elle continue aveuglément de soutenir les crimes d’Israël. France et Allemagne se sont longtemps fait la guerre, et qui aurait pu imaginer en 1870, 1914, ou 1939, qu’aujourd’hui les jeunesses des deux pays vivraient fraternellement sans la moindre once de haine ?

Au-delà des questions religieuses, politiques, nationalistes, la seule chose à laquelle sont condamnés Israéliens et Palestiniens, c’est à vivre ensemble.

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