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Billet de blog 17 décembre 2012

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La France si loin de Newtown (Connecticut)? Pas sûr.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Depuis le nouveau massacre survenu aux Etats-Unis, cette fois dans une école du Connecticut, la tonalité globale ici est celle de cet étonnement élégamment distancié qui surgit à chaque fois que se produit un fait similaire Outre-Atlantique. Et la télé de nous présenter ces foires aux armes ou ces magasins d'armement peuplés, semble-t-il, d'obèses avec Stenson sur la tête ou de mémères se défoulant dans des stands de tir. Puis, inéluctablement, un type déroule un commentaire sur "le puissant lobby des armes à feu" là-bas et sur l'extrême difficulté à en combattre l'influece, même quand on s'appelle Obama et que l'on vient d'être réélu.

Pour l'instant, personne, en France, du moins à ma connaissance, n'a officiellement fait campagne pour libéraliser notre législation sur l'achat et la détention d'armes. Devons-nous, pour autant, nous estimer à l'abri d'une évolution en ce sens? On peut craindre que non, et je m'appuierai juste sur deux exemples récents:

- 2008: dans un village de Haute-Saône, un type tue le simple d'esprit (et, dit-on, "souffre-douleur") du village à coups de couteaux parce qu'il s'était introduit (pour voler?) dans un cabanon. Assez naturellement, le meurtrier est condamné à de la prison et à une amende. Et voilà le village qui se mobilise pour aider à verser l'amende, on organise une tombola et, cerise sur le gâteau, la municipalité vote une aide de 1 000 euros.

- Décembre 2010: dans la Drôme, un voleur de truffes est abattu à coups de fusil à pompe. Rebelote: une marche réunissant 200 personnes est organisée pour soutenir le coupable, un jeune agriculteur.

Nous sommes, en France, protégés par une législation restrictive. En revanche, sommes-nous certains de ne pas faire preuve de condescendance en suggérant que ces Américains ne sont que des "cow-boys attardés"? Le concept de légitime défense, qui fonde la relation des citoyens des Etats-Unis aux armes, est assez populaire chez nous, quoi qu'on en dise. Les deux cas mentionnés ci-dessus n'en sont que des illustrations marquantes parmi des dizaines d'autres possibles. "Plus il y a de violence, plus il est légitime de s'armer pour y faire face", a-t-on entendu depuis vendredi comme propos fréquemment tenu chez nos amis yankees en guise de justification à la détention privée d'impressionnants arsenaux. 

La question de l'accès aux armes n'est pas qu'un problème juridique. Ou, plus exactement, nous nous trouvons dans un cas typique où la législation reflète à merveille un état d'esprit, le Droit n'en étant que la traduction technique.

Je fais le pari que le premier qui osera poser la problématique dans notre cher vieux pays révélera une tendance nous rapprochant fâcheusement de nos cousins d'Amérique dont, les yeux fermés et les oreilles closes, sur ce point, nous aimons nous sentir éloignés.

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