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Billet de blog 16 novembre 2010

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Le PS et les nouvelles securités

Au grès des réformes jugées injustes, des « affaires » qui touchent des cercles proches du pouvoir, ou d’un remaniement gouvernemental témoignant du mépris du chef de l’Etat envers l’ensemble des citoyens mais aussi des membres de son propre gouvernement, le mécontentement et la frustration des français grandissent.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Au grès des réformes jugées injustes, des « affaires » qui touchent des cercles proches du pouvoir, ou d’un remaniement gouvernemental témoignant du mépris du chef de l’Etat envers l’ensemble des citoyens mais aussi des membres de son propre gouvernement, le mécontentement et la frustration des français grandissent. Dans de nombreux domaines (social, éducation, ou encore sécurité…), de plus en plus de français attendent des propositions nouvelles et une réelle alternance politique. Dans le domaine de la sécurité comme dans beaucoup d’autres, les socialistes doivent éviter un « 2007-bis », et ne pas laisser à la droite le monopole d’un débat qui lui a trop souvent servi pour masquer l’échec des politiques menées dans d’autres domaines, notamment le social, et à déchaîner les passions identitaires et xénophobes les plus abjectes au prétexte qu’aucun tabou ne doit exister en politique.

Le PS se refuse, aujourd’hui comme hier, à susciter l’adhésion à un projet politique en agitant le spectre de l’étranger et en jouant de la haine et de la frustration. Il ne s’agit évidemment pas d’opposer les français les uns aux autres pour donner l’illusion de l’efficacité d’une action politique dont on sait qu’elle ne peut s’inscrire que dans le long terme et ne convient donc pas au « temps médiatique » qui semble trop souvent présider aux choix gouvernementaux. Mais s’il ne s’agit pas de singer les méthodes électoralistes bien connues du sarkozysme, mêlant discours inspirés de la rhétorique FN et humanisme ambigu, il est tout à fait essentiel qu’à la prochaine élection présidentielle, le PS présente des solutions crédibles, fortes et justes aux problèmes majeurs que près de 10 ans de politique sécuritaire de droite n’ont fait qu’exacerber.

Force est de reconnaître que, depuis la gifle de la présidentielle de 2002, le PS a semblé déserter le terrain de la sécurité. Alors qu’il s’agit d’une des préoccupations majeures des français, et surtout des plus modestes d’entre eux, les socialistes ont semblé s’interdire d’affronter cette question en gardant à l’esprit les valeurs humanismes qui sont les siennes et avec le sens de la responsabilité qui s’impose. Conscients des enjeux et de l’importance du sujet dans le débat politique actuel, les socialistes ont, depuis déjà plusieurs mois, engagé une réflexion sans tabou, basée sur la consultation et le dialogue avec tous les acteurs concernés, pour être en mesure de présenter aux français des propositions fortes, justes et crédibles sur la sécurité.

Mercredi seront dévoilées les grandes lignes de la politique que le PS défend en matière de sécurité. Parmi les dix propositions retenues pour figurer dans le « Pacte de protection et de sécurité publique » du PS, figure l’engagement de faire de la protection des plus vulnérables la première ambition du parti. Pour cela, il s’agira de redonner aux gendarmes et policiers la capacité d’exercer leur fonction première, et la question des moyens (humains et matériels) ne peut évidemment pas être escamotée (ainsi que la droite l’a fait ces dernières années, en nous faisant croire qu’on peut toujours améliorer l’efficacité des politiques de sécurité tout en supprimant des postes et en réduisant les moyens accordés aux policiers et aux gendarmes pour faire leur travail correctement).

Il ne s’agit pourtant pas de promettre simplement « plus de moyens », car un gouvernement responsable est tenu de prendre en compte les contraintes budgétaires énormes qui pèsent aujourd’hui sur tous les choix politiques. Les socialistes doivent donc énoncer clairement les priorités qui seront les siennes. Par exemple, on peut proposer que les moyens financiers soient dirigés en priorité vers les zones et les programmes désignés comme prioritaires au terme d’une concertation étroite, réalisée à l’échelle de chaque territoire, entre les responsables des forces de sécurité, le parquet et les élus locaux.

Adapter les schémas de sécurité publique aux besoins spécifiques de chaque territoire est indispensable pour orienter les moyens là où tous les acteurs concernés – notamment les conseils municipaux et communautaires, qui sont aux premières loges pour identifier les problèmes de sécurité - s’accordent pour dire qu’ils sont les plus nécessaires. De plus, des « zones de sécurité prioritaires », qui feront l’objet d’une attention particulière de la part des responsables politiques locaux et nationaux, seront définies pour débloquer des situations insupportables que l’on a laissé perdurer trop longtemps sur notre territoire.

Il s’agira également de déployer, dans ces zones, une « police des quartiers » placée sous la responsabilité opérationnelle des commissaires de police ayant pleine autorité pour coordonner l’ensemble des effectifs de toutes origines employés dans leur ressort territorial. Elle aura pour mission de restaurer un climat de confiance avec la population, de témoigner de l’engagement durable de l’Etat, et d’appuyer l’action quotidienne des différents services publics en reprenant la philosophie qui avait présidé à la création de la « police de proximité ». Pour clore ce bref exposé qui ne fait qu’esquisser le programme du PS en matière de sécurité, rappelons que c’est sans doute en matière de sécurité que la « politique du chiffre », cette technique inspirée des méthodes managériales pratiquées dans de nombreuses entreprises avec les conséquences humaines désastreuses que l’on a parfois pu constater, a été la plus utilisée.

Or, comme de nombreux experts l’ont souligné, ces méthodes créent une confusion de la fin et des moyens et mènent à des dérives insupportables. Il convient donc de remettre les choses à leur juste place, en redéfinissant des objectifs clairs et en mettant un terme à dix années de dérives. n effet, au lieu de mettre en œuvre tous les moyens nécessaires afin de protéger les citoyens, et en particulier les plus vulnérables, on en vient trop souvent à une focalisation sur le contrôle des populations, sur la gestion comptable et organisationnelle de ce contrôle, et sur l’évaluation du résultat de la mise en œuvre des politiques de sécurité au regard d’indicateurs qui nous cachent la réalité humaine des problèmes de sécurité.

Ces dérives, qui ont amené une inflation incroyable des textes législatifs et une multiplication des fichiers et bases de données divers et variés, sont particulièrement nocives pour les libertés et les droits fondamentaux qui constituent pourtant la base de notre Etat de Droit. Si le résultat est indispensable pour juger de la qualité d’un programme ou d’une mesure, le culte des indicateurs chiffrés, détachés des réalités humaines et des expériences de vie, a fait la preuve de son échec au cours des dix dernières années. Tous les moyens nécessaires doivent être donnés aux forces de l’ordre pour qu’elles fassent leur travail, et l’objectif fondamental de la politique sécuritaire ne doit plus, comme c’est le cas aujourd’hui, être noyé dans la masse des textes, des procédures, des effets d’annonce et des postures purement idéologiques qui ne font qu’entraver la politique sécuritaire et affaiblir son efficacité réelle.

Dans le projet sécurité du Parti Socialiste, il s’agit donc de faire preuve de responsabilité, de fermeté et de justice, en plaçant la sécurité pour tous au cœur de ses priorités. Tout en tenant compte des contraintes budgétaires extrêmement lourdes qui pèsent aujourd’hui sur l’Etat, il faut que cet objectif ne soit pas sacrifié sur l’autel de l’orthodoxie budgétaire ou en raison de considérations idéologiques.

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