La Cérémonie était accorte et chaleureuse. L’histoire personnelle et professionnelle de Françoise Huguier est cette illustration d’une liberté de soi revendiquée trois fois pendant son discours inaugural, marquée singulièrement dès l’enfance par le choc des cultures et des pratiques politiques, quand enlevée avec son frère, enfant, elle se retrouve chez les Viet Minh pendant huit mois avant d’être libérée; non pas sous la pression de la diplomatie française mais par la volonté de ses « ravisseurs » et l’action du bonze de cette communauté. L’ effet assez retentissant de cet enlèvement de l’enfant et de son frère lors de l’attaque sanguinaire (14 morts) de la plantation familiale au Cambodge par les « communistes », la fuite de sa mère et leur détention avec son frère, ont sans doute créé un traumatisme complexe qui aura sur la vie de la photographe une inertie qu’on ne mesure pas toujours et qui parle souvent à travers les sujets qu’elle a photographié, les communautés dans lesquelles elle a vécu et le refuge qu’elle a , semble t-il trouvé au Mali.
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Françoise Huguier semble toujours avoir été une femme de combat, une chercheuse poussant les portes closes, cherchant à voir et à comprendre pour s’éprendre et photographier. Dans la préface de son dernier livre Afrique Émoi, Aya Cissoko, boxeuse et écrivaine française écrit « Amoureuse de l’Afrique, Françoise Huguier a tissé, au cours de ses nombreux voyages, des lien forts avec ce continent. Dans son cher Mali on l’appelle la « duchesse de Bamako ». Elle y crée, en 1994, la Biennale de photographie de Bamako, contribuant à faire entrer Seydou Keita et Malick Sidibé dans l’Histoire de la photographie et à mettre en lumière les photographes africains. »
Sa détermination à voir, voyager, décrire, documenter, photographier tous les continents dont l’Afrique et le Mali n’a jamais été aussi profondément sincère, en témoigne également cette façon de vivre en musique et en dansant au son de la musique de Mama Sissoko, présent sous la coupole avec ses musiciens. Cette réception du côté de l’Académie est en tout point une reconnaissance et un plébiscite pour cette œuvre faite de voyages, de photographies, de causes, de combats, de livres. Françoise Huguier n’a pas reçu comme d’autres académiciens une épée à la symbolique trempée, mais un sceptre, réalisé par son mari, fait d’un œil, d’un globe terrestre et d’une main pointant le ciel et faisant tourné ce globe sur l’index dressé, et dont le sens avéré est assez simple, pour photographier il faut un regard et un doigt qui appuie sur le déclencheur et bien sur un monde à photographier.
Document sonore ci joint: La présentation de Coline Serreau au pupitre, présentant la vie de Françoise Huguier.