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Billet de blog 28 août 2025

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EN SOMME PAS

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

E N   S O M M E   P A S

Se retrouver là plein chêne séculaire seul

L’écart entre l’infini mer et hauteur cimes

Un col qui n’en est pas

Monter dans l’effraction

Retrouver le plat

Dire la sécante d’espace

Prendre un chemin n’est vraiment pas donné


Une combe un signe

Pas vu

Un pas d’écart

Comme caché pas de sens

La paix stupide       Défaite monumentale

Pas d’abri

l’Ouvert


L’oeuvre comme aveu du désastre

Pas d’oeuvre ou le désaveu

Là demeure colère

N’y rien pouvoir

« Paysages avec figures absentes »


N’être que désabrité


Nous n’y sommes pas

Pas là

Quelqu’un parle là en allemand

Unverborgenheit

Mystère


Demeure le socle

Disposé       Constant

Découvert 

Trop humain ou insupportable


Un failli

Des failles

Il ne s’agissait pourtant pas de se fâcher

Juste mettre nos pas dans un chemin

Un vrai vieux chemin inexorable

Qui croise ou bifurque

Pas de mule ou pas de berger courant


L’empierrement du chemin dit tout

On évoque les Mazzeri annonciateurs de mort

L’huile noire des baies de genévrier cade

La ponctuation des chênes céciles

Faire halte sous l’énorme chêne vert

Cercle sur l’aire à battre

S’arrondir dans l’étable

Voir douze trous passants les entraves au mufle des boeufs

Un verger de poires

Des encoches pour nourrir des ânes et des chevaux

L’épaule de terre était blonde de blés murs


Pas d’autre dessein

Que d’y porter nos pas


La passe dont on parle demeure dans l’absence

Le chemin lui demeure

C’est nos pas


Pas de paix


Comment se nomme cette figure de style

Qui dit ce qui est et ce qui n’est pas

?


Pascal Verrier

Lecture du paysage en descendant à pieds du col de la bataille
À Olmi-Cappella avec le Palazzu Verde accueilli par l’Aria ce 9 août 2025
Avec des gens venus de loin pour le commun, le partage et l’amitié
Avec Wouajdi Mouawad, Philippe Jacottet et Dorothy Carrington

TABULA  GRATULATORIA

    « Notre époque est si gourmande de fanatisme sectaire que le brouillard de la nuance est devenu une forme de résistance. Mais pour arriver au sang entre le philosophe et le poète, privilégions si vous le voulez bien le poète pour stalker et, ce faisant, essayons, le temps de cette leçon, de nous chasser nous-mêmes de la cité, de nous en extraire, de prendre les chemins de traverse, de chercher ces « paysages avec figures absentes » si chers à Philippe Jaccottet, de dévier de nos certitudes, de nous enfoncer dans les broussailles quitte à perdre le sentier pour nous donner au doute, de livrer notre pensée à l’incertitude, à la fragilité, d’en ouvrir les failles et les interstices, et d’éviter à tout prix les intransigeances péremptoires de nos convictions, la brutalité de nos entêtements. Non pas dire ce que l’on pense, mais raconter le chemin qui nous a amené aimer penser comme on pense. Il faut beaucoup de temps pour faire court. Se rencontrer soi-même relève toujours de la clandestinité. On tombe sur soi souvent par hasard. On se présente à soi-même sans se demander la permission. Entre ce que nous sommes et ce que nous croyons être, il y a un abysse dans lequel il faut oser se jeter; c’est pourquoi le véritable miroir est toujours une effraction, jamais un esclavage. »

Wajdi Mouawad
L’ombre en soi qui écrit

Leçon inaugurale prononcée au Collège de  France le jeudi 6 février 2025.
À écouter et surtout à voir sur le site du Collège de France.

Philippe Jaccottet
Paysage avec figures absentes

Paris, Gallimard, Collection « Poésie », 1998.


Dorothy Carrington
Mazzeri, Finzioni, Signori
Aspects magico-religieux de la culture Corse.

Ajaccio, Éditions Alain Piazzola, 2008.

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