Cher Monsieur Mabanque,
La Banque, ce n’est pas vraiment le lieu où l’on fait des banquets, ni où l’on observe la Banquise depuis sa banquette, c’est pourtant le parent en ligne directe du banc sur lequel s’asseyaient, italiens probablement, vos ancêtres, Monsieur Mabanque. Et dans cette grande famille, je n’oublie pas Monsieur Saltimbanque, bien qu’on ne sente plus chez vous cet esprit de légèreté qu’il y a nécessairement chez lui, qui n’a jamais songé à faire sauter la banque ni provoquer la moindre banqueroute. Pourtant, Monsieur Saltimbanque, cousin oublié de tous, n’est pas le mieux aimé de la maison, je veux dire la bancaire.
Je n’ai pas, Cher Monsieur Mabanque, vraiment le choix. Je suis tenue de vous confier toute ma vie. Mais non, me dites-vous, je suis juste dépositaire de votre argent. Que nenni, de ma vie ! j’insiste et je le montre. Ce que j’ai, en terme banquiers, bancaires et autres bancelles et balancelles, ce dont je dispose et que je dépose en vos murs, ce ne sont pas des chiffres, mais des choix. Pas des avoirs mais de l’être. Et vous en laisse l’usufruit, puisqu’à m’empêcher de payer tel ou tel, à me refuser telle manœuvre, à ne pas m’écouter ni me répondre, c’est de ma vie dont il est question, c’est de moi.
Quand les vacances, les maladies, les formations, et autres arrêts cumulés de ma banquière, que vous vous obstinez à nommer conseillère, ont des effets négatifs voire nocifs sur mon compte, je me demande, Monsieur Mabanque si je suis à la bonne adresse, celle qui promet –à des dizaines de milliers de compteurs comme moi –je veux dire de détenteurs de compte- qui logent chez vous, une relation personnalisée.
Banco !
J’énumère : je ne peux jamais vous joindre au téléphone. Un numéro m’amène à ‘une’ voix, en plateau, plateforme, plat pays de l’inconnu(e) mais que je dois rémunérer si je veux qu’on se parle, je ne vous dis pas le mot qui me vient…. Mes courriels restent lettre morte si la banquillère (banquière/conseillère) ertétise ou s’absentise. Et je réalise moi-même-personnellement toutes les opérations par l’internet, pas si net que ça d’ailleurs, comme ça je ne vois plus sa voix… En fait d’explications à la raison-du-comment-du-pourquoi- vous décrivez le système, ça s’appelle de la paraphrase. Et en guise d’excuse –pour ce désagrément ! euh… ça c’est un… euphémisme …. vous rappelez que vous gérez un établissement commercial. Et le sourire qui va avec (commercial) et le petit café, grand merci. Je vous rappelle avec désespoir, dépit, déception, désenchantement, et autres décompositions de tout mon être déconfit, que dans un commerce, j’aime qu’on me chouchoute et me connaisse…. sinon je le quitte.
Mais je vous aime bien quand même, Monsieur Mabanque. Vous êtes le chef. Aussi vous avez sorti toutes les ficelles pour que je ne sorte pas la corde pour vous pendre. Ou moi. Montée sur le petit banc de ma colère, que j’aurais balancé d’un coup de pied rageur pour me balanstiquer dans le vide, histoire de vous donner mon compte. Et nous nous en sommes bien sortis. Pour autant nous ne partagerons pas demain les bancs publics, ni les bans publics d’ailleurs. Ce mariage n’est que de raison, et celle du plus fort étant toujours la meilleure, je balance encore pour savoir, qui de vous ou de moi s’est satisfait de l’autre. J’ai les lettres, vous avez les chiffres. Relation bancale, je le redis. Vous le savez. Mais s’il vous plait, ma vie vaut plus que mes dé-comptes qui vous rendent mécontent.
Au fait, le nouveau banquiller personnalisé dont vous m’avez gratifiée, gratis, est vraiment un jeune homme formidable et gracieux. Je vous le conseille.
moi, décomptable de contes en banque