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Billet de blog 31 mai 2019

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Mais jusqu’à quelles extrémités faudra-t-il arriver pour bouter les idéologies mal digérées, donc dangereuses, hors de la grammaire...

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   Aussi, j’en rajoute une (petite) couche, en demandant ce que l’on fait de ces métiers –qui ne sont point nouveaux- couvreur... couvreuse ? plombier... plombière ? glacier...glacière ? jardinier...jardinière ? saucier...saucière ? moins présents sur les plateaux-télé, certes, que les autrices, désormais régulièrement citées aux oraux du baccalauréat-sans-gloire-et-sans-savoirs.

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   Mon Aimée, que je lis à l’instant dans une Correspondance de la fin du XIXème siècle –pensez-donc ! est sûrement une insulte aux prescripteurs d’aujourd’hui - mon ne peut, ni ne doit, désigner une femme… et aux néo-précepteurs pour lesquels tout humain de sexe féminin a droit à porter son “e” en bandoulière, ce qui rime avec cartouchière et lanière. Le “e” pourtant si léger, le “e” dont le silence fait signe d’une présence mutine parfois, amuïe souvent, Mon Aimée, le “e” qui en dit long sans avoir besoin d’en rajouter…. Le “e” dorénavant malmené, brutalisé. Maltraitance pour une voyelle douce. Mais comment donc les adjudants ignorants et féroces de l’usage des mots vont-ils supporter que cet adjectif possessif, diantre ! et masculin, précède et nomme un être féminin ? l’insupportable contre-argument de l’obsolescence, de la ringardise, en un mot de la loi naturelle (sic) selon laquelle tout évolue, donc la langue, va-t-il encore nous être opposé ? et que va-t-il falloir inventer pour éradiquer Mon Aimée

  Sauf -et j’avoue que mon aimée, aussi soyeux et velouté que s’il fût distrait d’un alexandrin de Racine, mon aimée me sert évidemment de prétexte- pour attaquer celleZetceux qui ne comprennent toujours pas qu’unE auteurE ou unE écrivainE n’existe pas, tout simplement ! Ou alors, dans la Famille Surérogatoire je demande la danseurE, l’instituteurE… mais rappelle que les (quelques) noms français en -eure de naissance (la prieure, la supérieure…) proviennent des comparatifs latins en or, en plaqué or ? mais pourquoi pas l’auteuse, comme on dit la danseuse.

  J’en appelle donc à nos bien aimés Amis, dont je ne comprends pas qu’ils ne la ramènent pas quand personne n’ose écrire, s’agissant d’une femme, la bandite, l’escrocque ou la malfrate, (parité ! parité !) mais qu’on ose encore s’agissant d’eux, parler d’une victime, d’une personne, ou d’une star, d’une canaille ou d’une proie, j’en passe, j’en passe. Ou comment suspendre le sexe à la conquête de la cinquième lettre de l’alphabet pour faire avancer la cause des femmes et soumettre le monde francophone à cette injonction absurde ! et comment le bon usage, la correction syntaxique, morphosyntaxique, orthographique et grammaticale, deviennent fautifs. D’office. Voilà qui est tout simplement sidérant.

   Qui ne voit que cette idée ridicule selon laquelle une-langue-est-vivante- et ainsi et donc se soumet à l’air du temps, est juste un sophisme, un paralogisme, le contraire même du raisonnement, l’ignorance crasse de la philologie, pire l’inféodation au plus mauvais, à la paresse, l’assujettissement à un prêchi-prêcha détestable. Et que la parité(E?)et l’égalité(E?) se jouent dans la loi, et donc dans les luttes ? Nos amis anglophones n’auraient-ils donc plus de soucis à se faire, ni de problèmes à régler, n’en ont-ils jamais eus, bienheureux qui ne connaissent pas la distinction grammaticale entre le féminin et le masculin, a friend is a friend, et nos cousins italiens ont-ils perdu tout sens commun, qui disent La sabbia (fém.) pour le sable, ou Il mare (masc.) pour la mer… on me rétorquera (pan sur le bec !), qu’il ne s’agit point là d’humains, mais d’objets inanimés et non pensants. Certes, je crois bien que je vois la différence. Je veux juste montrer que la partition grammaticale et syntaxique du monde entre masculin et féminin dans une langue (à condition qu’elle en soit pourvue !) ne recouvre pas systématiquement (dogmatiquement ?) l’idéologie, c’est même l’inverse,  et que l’on est typiquement devant une pitoyable récrimination d’aliborons analphabètes –là je fais pléonasme pour le plaisir de l’allitération-  quand on exige sous peine d’immolation publique que soit dite et écrite rapporteurE, proviseurE, procureurE. Fondre et confondre sexe, genre et fonction est devenu la règle, et résister, une faute contre la moitié de l’humanité, contre une nouvelle réglementation autoproclamée (et totalement … fautive), mais aussi, mais surtout une faute morale, une faute idéologique ! Ah ! où le jugement moral va-t-il se loger de nos jours, et au nom de quoi ? On a le combat féministe léger et court vêtu, qui s’en sort à pas cher, rétréci, sommaire et crapoussin, s’il suffit de mettre en demeure quiconque prend une plume, pardon un clavier, ou un micro, de dire et écrire une écrivainE lui ajoutant un “e” en appendice –substantif masculin qui désigne une partie surajoutée à une autre, en complément, prolongement ou accessoire… pour marque de quoi ? du féminin ou de sa féminité ?

   Et tout le monde obtempère. Sans (se) poser la moindre question… Douce tyrannie de l’air du temps, qui flotte d’autant mieux qu’elle ne repose sur rien, sinon sur elle-même, qu’elle est sa propre justification, sa propre mesure, et qu’un peu de savoir est dorénavant compris comme beaucoup d’arrogance, et l’impéritie pour la norme. J’ai donc lu récemment ces formidables choses : les personnes auteures (devenu adjectif, dorénavant auteur s’accorde avec le nom !) d'agressions ; la pivot de l’équipe (pourquoi, mais pourquoi donc n’avoir pas écrit la pivote…) ; cette médecin (évidemment cette médecine n’avait pas le même sens, j’y reviens) ; sa sauveuse (tiens, point de sauveurE cette fois ?) et autres joyeusetés, comme chauffeure de taxi, la chauffeuse étant déjà occupée. Chacun fait ce qu’il veut. **

   Je voudrai juste rappeler que la marque du féminin, en français, n’est pas le “e”…. On se calme ! j’ai bien dit la marque. Tant de mots féminins le sont sans lui, notamment tous les mots dits de qualité (bonté, imbécillité, vérité, fausseté et sqq… et bonheur, malheur, senteur, sont féminins sans “e”) ; il ne suffit pas d’ajouter inconditionnellement un “e” à la fin d’un substantif pour réussir un changement de sexe indolore, et gagner ce combat. D’autant qu’à l’oral, l’auteure ne dévoile pas son intimité, et si par cumul des guignes son prénom est Camille, Dominique ou Claude… on est mal barré comme on dit aussi ! Mais surtout, il existe des mots masculins qui portent, comme un fardeau, une punition?, ce “e” insupportable, dont il faudrait peut-être les …. châtrer, ou les châtier, qui sait ? un macchabée doit-il s’arrimer un troisième “e” s’il est une femme, même question pour un pygmée, ou un sigisbée… athée ? Certes, voilà des mots qui ne font pas le quotidien de nos écrits, mais le lycée, le musée, le prytanée sont bien des noms masculins, affublés pourtant de ce “e” maudit mais adhérent !

   Restent les cas drolatiques où le passage du masculin à un féminin existant, s’accompagne d’un changement de sens, et confirme ainsi que lorsque l’idéologie l’emporte, le grotesque aussi. Je veux dire que l’obligation, l’objurgation qui nous sont faites de féminiser à tout-va tout ce qui peut l’être est un caporalisme insidieux, dormitif, de ceux qui rassurent mais abêtissent, puisque, n’est-ce pas, c’est devenu l’habitude, et qu’il faut bien être de son époque…

   Aussi, le manœuvre s’use à la manœuvre (!), le mousse dégage la mousse envahissante (?). Et la pluie menaçant, le pèlerin enfile une…pèlerine, ok. Le concours est ouvert. Je me demande si c’est eu égard à sa soutane que le Pape est appelé Sa Sainteté. Suis-je de mauvaise foi ?

   ...et dans cette logique sans raison, il faut donc castrer, émasculer, amputer, tous les noms épicènes –et ils sont nombreux- quand ils désignent des hommes… pour les distinguer des dames. Ainsi, un philosoph, un artist, un mair… doivent renoncer à leur “e” pour mieux en revêtir les femmes. J’exagère ? ah bon ?

  ... reste à dire deux mots du dictionnaire convoqué sans jugeote comme juge de paix, alors qu’il se contente d’entériner l’usage le plus fréquent, en nombre, puisque, dorénavant, le nombre a toujours raison sur tout, même sur la grammaire. Les dictionnaires courants sont des objets marchands, ils présentent ce qui plaît, ce qu’on est prêt à acheter. Ils enregistrent l’air du temps, et vous le vendent. Article “tendance” dont on ne manque pas de présenter le nouveau modèle chaque année, et les 'innovations' qui vont avec. Comme au salon de l’auto !

**surtout dans la presse écrite  -mot sans la moindre épaisseur désormais- en passe de nous dicter nos conduites... l'Education Nationale laissant le champ libre au plus accessible, au plus facile, au plus "ludique" et considérant qu'il faut élever le niveau par le bas.

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