C’est à une époque et dans un monde rayonnants de leurs belles réalisations, que le film «Notre Monde» sort dans les salles. Le film donne un aperçu de ces réalisations : la salle de la Maison de Métallo est magnifique, les caméras sont ultra-perfectionnées, les écrans flashent, les éclairages sont sophistiqués, le son est profond, le noir et blanc est mis à contribution, etc.
Certes le monde est rayonnant de ses technologies et de ses savoirs. Mais nous, les peuples, les hommes et femmes qui formons peuple, sommes-nous rayonnants ? De vie, d’amour, de bonheur ? De sens et de bon sens de la vie ? Les penseurs qui sont filmés répondent : nous ne sommes pas rayonnants. Et nous sommes même aveugles.
Alors, dans ce billet, prenons un peu de recul pour comprendre ce qui se passe. Focalisons-nous sur en quoi sommes-nous aveugles ?
Reconnaîssons déjà que l’accès au savoir nous a rendu libres. Notre évolution nous a vu sortir de la prison de l’ignorance. Nous sommes sortis de la grotte de Platon où nous étions maintenus enchainés, sans rien savoir. Nous vivons maintenant en plein jour, exposés au rayonnement du savoir. Nous en sommes même avides, comme des rayons du soleil.
Les sources de l’information nous éclairent, accessibles d’un clic par internet ! Il y a aussi la télé, la radio, les panneaux et les écrans publicitaires ici et là dans les lieux publics. Le constat est que l’information foisonne par les multiples canaux de communication se diversifiant toujours davantage. Mais alors, l’information circulant si bien, pourquoi sommes-nous donc aveugles, et à quoi ?
Nous sommes aveugle parce que l’information nous aveugle ! C’est comme l'aveuglement dans les phares d’une auto. Pensons que le total des budgets publicitaires dans le monde ne serait pas loin de la somme des dépenses militaires mondiales, lesquelles sont énormes. C'est dire qu'à coups de milliards de dollars, nos esprits sont formatés par le marketing de toute sorte, par les mots d’ordre manipulateurs. Ainsi, par l’invasion orientée de l’information, nous sommes divertis et notre temps est pris. Nous ne voyons plus ce qui compte vraiment pour nous, ni au dehors, ni en nous. Nos repères sont troublés et nous nous retrouvons pieds et poings liés, aveugles à l’essentiel qui fait une vie pleinement humaine. Et nous nous retrouvons convaincus que nous n'y pouvons rien. On en arrive à la passivité, en se disant « C’est comme ça ! ».
C’est à tout ça que nous sommes aveugles : aveugles à ces processus insidueux. Et ce retournement de la vie contre elle-même nous rend aveugle à une déshumanisation qui ne se dit pas. Les collectifs solidaires végètent, quand ils ne sont pas brisés. Chacun est déraciné de qui il est, hors du chemin personnel et collectif sur lequel il devrait être. Aveugle à soi ! Aveugle aux autres !
Ainsi, par cet aveuglement généralisé, et sans nous en rendre compte, nous sommes comme revenus dans la grotte de Platon. Et nous nous y sommes nous-mêmes enchainés ! Certes, nous sommes libres de nos mouvements, mais notre esprit est prisonnier par un enchainement d’un type autre que physique. Notre esprit a été capté par une pensée dominatrice, irrespectueuse de l'homme.
Le film «Notre Monde» nous invite à réagir.
Patrick Banuls, Paris le 21 mars 2013