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Économiste, sociologue et HEC à la retraite (maître de conférence à l’Université Dauphine et membre du Cabinet Syndex, expert-comptable spécialisé dans le conseil aux Comités d'entreprise et aux syndicats de salariés), il s’occupe, depuis une dizaine d’années, de promouvoir l’Indépendance de la Kanaky Nouvelle-Calédonie. Il s’est mis en outre à écrire autre chose que de savants traités...

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Billet de blog 1 juin 2025

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Macron s’est sans doute demandé "Que faire ?" de cette foutue Calédonie...

Continuer à ne rien dire, sauf à laisser fuiter quelques râleries contre Valls ? Le désavouer ouvertement en rappelant que la "France serait moins belle sans la Calédonie" ? Annoncer enfin, ce que vient de faire l’Élysée fin mai, une réunion à Paris de toutes les parties prenantes du "Caillou" au milieu de juin 2025. Mais pour dire et faire quoi ? Attendons donc...

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Économiste, sociologue et HEC à la retraite (maître de conférence à l’Université Dauphine et membre du Cabinet Syndex, expert-comptable spécialisé dans le conseil aux Comités d'entreprise et aux syndicats de salariés), il s’occupe, depuis une dizaine d’années, de promouvoir l’Indépendance de la Kanaky Nouvelle-Calédonie. Il s’est mis en outre à écrire autre chose que de savants traités...

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Le feuilleton de l’absence de réactions du gouvernement et du chef de l’État au compromis (raté…) proposé aux élus calédoniens par Valls, au grand hôtel de Déva à Bourail, continue depuis les 9 et 10 mai ; c’est un peu long, non ?

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Valls avait proposé une souveraineté partagée avec la France (mais pas dans la France) ; quelque chose qui ressemble plus, après hésitations puis éclaircissements ultérieurs (voir notre billet précédent) à un État associé qu’à une Pleine souveraineté avec partenariat dite Indépendance-association : tous les pouvoirs régaliens, d’abord offerts en totalité, seraient immédiatement rétrocédés à La France, précise maintenant Valls (ce qu’il avait oublié d’indiquer lors de sa proposition...).

Hurlements, malgré tout, des loyalistes radicaux emmenés par Nicolas Metzdorf qui a un avantage comparatif sur ses concurrents (par exemple Sonia Backès et Virginie Ruffenach) : il est député macroniste. Les indépendantistes, mais après hésitations, se sont déclarés ravis, un peu moins ceux du FLNKS que ceux de l’UNI-Palika, plus modérés. Les autres, centristes (Calédonie ensemble et L’Éveil océanien) semblent toujours le cul entre deux chaises, malgré les affirmations de Charles Washetine (de l’UNI-Palika) qui prétend, Invité du dimanche dernier (25 mai) sur NC 1ère, la chaîne télé la plus suivie du Caillou, que tout le monde, sauf les loyalistes radicaux, sont pour le projet de Valls...

Le plus drôle, c’est que l’annonce de Macron avait été annoncée par Metzdorf lui-même reçu à l’Élysée le 23 mai : le président « prendrait une initiative dans les prochains jours afin de relancer les discussions », avec, dans l’article,  une photo où le second tient le premier par l’épaule... Et ils n’ont pas l’air de se chamailler... Certains interprètent cette annonce comme un possible désaveu de Valls par Macron. Toujours est-il que Macron vient[1] (le 27 mai) de convoquer à Paris pour la mi-juin les « parties prenantes de la Nouvelle-Calédonie » pour « clarifier les sujets économiques, politiques et institutionnels en vue de parvenir à un accord partagé sur l’avenir de l’archipel » ; Valls fera-t-il partie de ces parties prenantes ? Pas un mot de Macron concernant son ministre...

Valls a rapidement et très vivement répliqué à Metzdorf en réaffirmant[2] qu’il n’était pas désavoué par quiconque et que c’est lui qui gérait le dossier pour le gouvernement Bayrou : « Celui qui s’occupe, à la demande du chef du gouvernement, c’est le ministre des Outre-mer. C’est moi. Il n’y en a pas d’autre ... Que Nicolas Metzdorf s’exprime. Il n’est pas porte-parole, que je sache, du président de la République, ni du gouvernement ».

Et une rumeur (mentionnée dans l’un des commentaires d’un article sérieux publié sur la Toile) circulerait selon laquelle c’est le Premier ministre néo-zélandais qui aurait soufflé à Macron la solution d’un État associé, comme ce qui a été fait aux Îles Cook : Macron ne désavouerait ainsi, ni son Premier ministre, ni son ministre des Outre-mer, dont la proposition, rappelons-le, était d’ailleurs couverte par le Conseiller spécial de Bayrou, Éric Thiers. Fake News ou pas ?

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Le plus désopilant, et surtout désolant, est cette longue indécision au sommet de l’État dans une période où, certes, la guerre en Ukraine et à Gaza préoccupe plus le monde, et sans doute Macron, que ce petit caillou dans la chaussure de ce dernier ; mais quand même... Suspense torride donc.

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Bref ajout du 6 juin

Voir une petite nouveauté, publié le 6 juin (AFP, LNC) :

https://www.lnc.nc/article/nouvelle-caledonie/france/politique/valls-ecarte-les-risques-d-explosion-du-gouvernement-sur-le-dossier-caledonien

Le ministre des Outre-mer Manuel Valls a ainsi écarté, jeudi, nous conte cet article, les risques d’ « explosion » du gouvernement national sur le dossier calédonien, assurant que « le risque, c’est l’explosion sociale, économique et de violences en Nouvelle-Calédonie si aucun accord n’est trouvé ». Rien que ça... « Manuel Valls, indique l’article, a répété avoir la confiance du Premier ministre François Bayrou et du président Emmanuel Macron, en dépit de l’initiative de ce dernier, qui souhaite réunir à Paris d’ici le 2 juillet divers représentants calédoniens pour aboutir à un accord. […] "Si je n’avais pas la confiance du Premier ministre, si je ne travaillais pas avec le président de la République (…), je ne serais pas devant vous. Je ne continuerais pas à m’exprimer", a-t-il dit, assurant qu’ils étaient tous "alignés sur l’idée qu’il faut un accord politique pour l’avenir de la Nouvelle-Calédonie" ».

Mais quel accord, le sien ou un tout nouveau sorti du chapeau de Macron ? « Concernant la proposition de rencontre d’Emmanuel Macron, continue l’article, "nous sommes en train de le préparer mais s’il doit y avoir un rendez-vous, il faut qu’il soit bien organisé et bien préparé et il faut qu’il y ait les bases d’un accord", a indiqué le ministre des Outre-mer, prônant la "discrétion" dans le dossier ».

La seule véritable nouveauté est le passage de mi-juin à début juillet…

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Bref ajout du 7 juin : le curieux (et presque regrettable…) retour de Louis-José Barbançon

Voir l’article de NC 1ère du 7 juin 2025

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/province-nord/kone/de-la-fracture-du-13-mai-il-restera-toujours-une-felure-estime-l-historien-et-auteur-louis-jose-barbancon-1593540.html

Et surtout son interview au JT de NC 1ère du 6 juin :

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/programme-video/la1ere_nouvelle-caledonie_journal-de-19h30-de-nouvelle-caledonie/diffusion/7200875-edition-du-vendredi-06-juin-2025.html

Il avait disparu des écrans peu après sa géniale prémonition (de fin avril 2024) de l’insurrection du 13 mai, avec son écrit 1984-2024 Il est encore temps

Voir :

1984-2024-jose-barbancon-.pdf

Malheureusement, il semble avoir bien changé depuis plus d’un an. Sa conférence du 5 juin 2025 à l’Université de Nouvelle-Calédonie (à l’antenne de Koné, en Province Nord) a pour objet son dernier bouquin publié... en janvier 2023 mais déjà présenté fin 2022 (écrit avec son copain, et ex-journaliste kanak, Walles Kotra). Pas un mot (mais pas une question non plus…) sur ce qu’il pense de la proposition de Manuel Valls et des réactions qui ont suivi (et surtout de l’absence de réaction de Macron). Il insiste sur la fracture-fêlure du 13 mai 2024, tout en lançant une toute petite pique contre Sonia Backès, en prononçant ces mots : « On peut définir le "nous" par son contraire : c’est "l’huile et l’eau ne se mélangent pas" [citation de la présidente de la province Sud le 14 juillet 2024]. Les choses vont être extrêmement difficiles après le 13 Mai, parce qu’il a créé une fracture. Une faille dans laquelle s’est engouffré un torrent qui charrie du ressentiment, de la méfiance, du racisme, de la colère. Ça va être très difficile de vivre avec cette faille parce que trop de gens se sont sentis trahis. Le choix de la société calédonienne est de faire en sorte de réduire cette fracture. Mais on sera obligé de vivre avec. De cette fracture, il restera toujours une fêlure ».

Bref, ce n’est plus le battant se prononçant enfin pour l’indépendance-association de fin avril 2024...

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Ajouts du 8 juin (et on va continuer ainsi jusque début juillet…) : une lueur d’espoir

Sur CNews, le 8 juin, Valls ne dit pas grand-chose de nouveau (voir : https://www.cnews.fr/videos/france/2025-06-08/manuel-valls-sur-les-tensions-en-nouvelle-caledonie-sans-un-accor ). Idem pour Sonia Backès deux jours plus tôt (voir : https://www.cnews.fr/france/2025-06-06/comment-manuel-valls-peut-arriver-en-nouvelle-caledonie-et-proposer-ca-sinterroge). Et pareil pour le FLNKS (toujours sans l’UNI-Palika) qui se tâte encore, à sa Convention de Dumbéa le 8 juin, pour savoir s’il ira à Paris début juillet  (voir : https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/province-sud/dumbea/apres-deva-avant-paris-le-flnks-en-convention-a-dumbea-1593786.html).

Le seul qui a un peu, même beaucoup, éclairci sa position, est le patron de Calédonie ensemble, Philippe Gomès lors de son interview au JT de NC 1ère le soir du 8 juin (heure de Nouméa) ; voir : https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/programme-video/la1ere_nouvelle-caledonie_journal-de-19h30-de-nouvelle-caledonie/diffusion/7216700-edition-du-dimanche-08-juin-2025.html

Langue de bois au début, il annonce cependant que les dissensions entre Valls et Macron sont peu probables ; mieux, il pense que le projet de Valls est un bon point de départ. Il ne dit pas qu’il est pour un projet d’Indépendance-association ou même d’État associé (ce sont des gros mots pour lui, et il s’y est toujours opposé, toujours !) mais ça y ressemble fort, en précisant que toutes les compétences régaliennes données dans un premier temps à la Nouvelle-Calédonie, indépendante donc, seront toutes rétrocédées.

Bref, cependant toujours faux-cul, il semble passer le Rubicon ; ce que je lui demande (avec beaucoup d’autres…) et avec insistance depuis des lustres.

Cette (éventuelle) bonne nouvelle n’arrivant jamais seule, Christian Téin va peut-être sortir de prison et de sa déportation.  (voir : https://www.lnc.nc/article/nouvelle-caledonie/justice/christian-tein-maintenu-en-detention-jusqu-a-une-decision-en-appel-le-12-juin-sur-sa-remise-en-liberte). Sa remise en liberté avait été ordonnée le mardi 3 juin par les trois juges d’instruction mais contestée par le parquet de Paris ; il faudra attendre l’audience de la cour d’appel du 12 juin pour en savoir plus.

Fin bien barrée la Kanaky Nouvelle-Calédonie ? Le rêve se rapprocherait de la réalité ? Mais ne vendons pas la peau du Caillou-Calédonie française avant de l’avoir assommé. Tout est encore possible...

Notes

[1] En fait depuis très loin : depuis l’Indonésie ; voir l’article de RFI du 28 mai :

https://www.rfi.fr/fr/france/20250528-nouvelle-cal%C3%A9donie-e-macron-annonce-une-relance-du-dialogue-au-moment-de-la-visite-de-marine-le-pen-%E2%80%93-enrob%C3%A9-delvolv%C3%A9

« L’Élysée, note l’article, fait cette annonce au moment où Marine Le Pen est justement sur l’archipel ». Il y eut et il y a du monde sur le Caillou  : après LFI, Bellamy et Le Pen… Bellamy s’oppose à toute forme d’indépendance ; Le Pen (d’ailleurs chahutée là-bas par plus à droite qu’elle, propose, après un remarquable changement de pied,  un référendum d’autodétermination… Mais dans 40 ans.

[2] Dans une interview de plus de trois-quarts d’heure sur la télé LCI, dimanche 25 mai. Le plus amusant, c’est que seulement quelques minutes ont été consacrées, en fin d’interview, au dossier calédonien : pour tout le reste (La question de Frères musulmans, le danger islamiste, etc.) on a retrouvé le vrai Valls...

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