III-3 La politique sur le Caillou de 2017-2018 à aujourd’hui, avec beaucoup de visites de l’État français ne levant jamais la rupture du dialogue et l’incertitude
Ce dernier volet politique, comme annoncé, couvrira donc la période entre début décembre 2017, avec la visite du Premier ministre Édouard Philippe, un peu moins d’un an avant le référendum, et aujourd’hui, en passant, après le XVIIe Comité des signataires de fin mars qui a proposé à Paris la question posée au référendum, par la visite du président Macron début mai. Cette question posée mit fin à toutes les hypothèses politiques, évoquées dans cet ouvrage, d’éventuels compromis (mais avec maints retournements) entre certains loyalistes et certains indépendantistes tentant de contourner la question et la réponse binaire : indépendance, Oui ou Non. Mais feignons de garder encore un peu de suspense…
Le tableau étant brossé, on commencera par le rôle de l’État : malgré sa neutralité théorique, il a, dans un premier temps (grâce au Premier ministre Édouard Philippe) débloqué nombre de situations, singulièrement celle de la question posée en novembre 2018, au premier référendum d’autodétermination. L’UNI-Palika[1] d’abord, Calédonie Ensemble ensuite, venaient de préciser leur stratégie auparavant encore bien floues, sauf sur les principes : deux voies parallèles qui ne sont pas prêtes à se rencontrer, sauf à l’infini ou en géométrie non-euclidienne.
On traitera donc d’abord de la période d’avant le premier référendum de novembre 2018, avec en premier lieu le point de vue de l’État, en second lieu le point de vue des indépendantistes, enfin celui des loyalistes. L’analyse politique de la période de 2018 à aujourd’hui formera le dernier volet et sera présentée à la saison suivante.
Auparavant, il faut cependant expliquer pourquoi le tournant de 2017 est si important : encore des pirouettes de Gomès.
La dernière crise gouvernementale depuis août 2017 (quelques mois quand-même) ne s’est résolue que la veille de l’arrivée d’Édouard Philippe qui avait déjà mouillé sa chemise un mois auparavant au XVIe Comité des signataires : accord de la France à l’inscription automatique (ou presque) des Kanak de statut coutumier et des autres natifs (à certaines conditions). Le Parlement français a approuvé cette modification.
Gomès qui s’était donc fâché avec les indépendantistes pour se faire élire député contre l’indépendantiste Mapou, aura réussi une nouvelle pirouette en décembre 2017. Et une double pirouette : il avait donc rallié une grande partie de la droite pour son élection à l’Assemblée nationale ; mais il aura réussi à obtenir les votes indépendantistes pour la reconduction du gouvernement Germain. Ce fut très fort !
Dans le même temps où le Palika acceptait l’indépendance-association, Gomès allait au bout du bout de ce qu’un loyaliste pouvait proposer sans se faire traiter pour la énième fois d’indépendantiste (ce que ses adversaires n’ont, encore une fois, pas manquer de faire !). Sauf qu’il rallia alors ses nouveaux amis ex-RPCR de la Plateforme en isolant ceux des Républicains calédoniens (Backès et Martin). On n’était plus dans la tentation du Guépard où il faut que tout change pour que rien ne change, mais il y avait une tentative de remake adouci avec un nouveau concept marketing : le nationalisme calédonien (encore lui !) et la Petite nation dans la Grande. Ce qui a probablement permis le soutien des indépendantistes à la formation du nouveau gouvernement Germain, couplé avec leur peur de voir abandonner la politique quasi-social libérale en cas de nouveau gouvernement de la droite unie.
C’est quoi ce bout du bout ? Toujours dans la France (mais ce serait encore plus ou moins le cas avec l’indépendance-association qu’il refuse) avec toutefois plus de compétences régaliennes transférées et calédonisation des emplois régaliens. La justice, la défense et les affaires étrangères resterait régaliennes, mais on pourrait penser à un Caillou intervenant encore plus en tant que tel dans les affaires régionales[2], à un drapeau commun, à un strapontin à l’ONU. On ne serait pas loin d’une indépendance à la rhodésienne où les Blancs rompirent avec la Métropole britannique pour garder le pouvoir, mais ici de façon beaucoup plus cool car fondamentalement différente : avec l’accord de la Métropole et de tout ou partie des indépendantistes et en évitant la guerre civile de la Rhodésie du Sud devenue Zimbabwe (en passant par Zimbabwe-Rhodésie, accolant le nom premier du Pays à celui de la colonie, anticipant Kanaky-Nouvelle-Calédonie ?).
Ce ne serait qu’un copier-coller particulier de l’histoire du Canada, de l’Australie et de la Nouvelle Zélande, colonies de peuplement européen. Qui peut donner les dates de leur indépendance[3] ? Qui sait que le « Président » de ces pays est la reine d’Angleterre, avec son effigie sur toutes les pièces de monnaie ? Qui sait qu’il y a une sorte de Haussaire-Gouverneur sans aucun pouvoir dans ces pays ? Bref, on pourrait passer graduellement de cette autonomie, non pas dans la Couronne mais dans la République, à une indépendance qui ne dirait pas son nom. Cependant, Gomès ne pense probablement pas à ça… Mais allez savoir !
III-31 Le rôle de l’État comme débloqueur de crise, grâce à Édouard Philippe, mais avec une bourde de Manuel Valls et Macron fidèle à lui-même lors de sa première visite sue la Caillou
III-311 Le rôle du Premier ministre et, enfin, le contenu exact de la question posée au premier référendum de 2018
* La nouvelle implication de la France : le discours refondateur du Premier ministre Édouard Philippe au Congrès du Caillou en décembre 2017
Édouard Philippe prend surtout le contrepied de tous les discours d’inquiétude et de peur des institutions de la Métropole présentés plus haut : « N’ayons pas peur de nos peurs[4], ce sont elles qui nous permettent de préparer l’avenir plutôt que de l’affronter ». Il offre une méthode nouvelle « simple et éprouvée » qui peut se résumer en un seul point, les autres[5] n’étant que des satellites : plutôt que de nombreuses commissions et autres missions institutionnelles françaises dialoguant avec les politiques du Caillou, Philippe propose (en fait impose) « Un dialogue resserré autour d’un groupe de travail resserré d’une dizaine de représentants des forces politiques nommément désignés ». Ce groupe sera nommé plus tard le G10 « Sur le chemin de l’avenir » ; il semble renvoyer plus à l’élaboration d’une charte commune des valeurs, quel que soit le résultat du référendum, selon la position de CE et Gomès, qu’à un lieu de négociation sur les modalités et la question au référendum lui-même. Ce groupe aura des « points de rendez-vous » avec Matignon qui gérera, comme du temps de Rocard, la question calédonienne. Le XVIIe Comité des signataires de l’accord de Nouméa sera cependant l’un de ces rendez-vous, fin mars 2018. Autrement dit, la mission Christnacht (qui avait d’ailleurs pris fin en mai 2017 à la demande du Premier ministre de l’époque) est remplacée par un dialogue direct entre le Caillou et Matignon[6] en reprenant et élargissant les thèmes de cette mission Christnacht : « dresser le bilan de la mise en œuvre de l’accord de Nouméa », avec « ses acquis, et ce qui reste à réaliser » ; « les compétences transférées ou à transférer » entre l’État français et la Nouvelle-Calédonie ; « la place de la Nouvelle-Calédonie dans le monde » ; « le socle des valeurs et des projets qui font consensus ».
Contrairement encore à ceux qui pensaient que le Congrès ne pourrait jamais se mettre d’accord ni sur la date, ni sur la question exacte posée, là encore Philippe souhaitait que les choix de la date[7] et de la formulation reviennent « aux Calédoniens ». Ce sera le cas pour la date, moins pour la question. Bref, Philippe tenta de jouer, mais à froid, le rôle de Rocard. Il n’arrêtera pas une quasi-guerre mais stoppera les querelles d’apothicaires des différents camps et partis concernant la formulation exacte de la question posée le 4 novembre 2018.
* Le déblocage de la formulation de la question posée au référendum au XVIIe Comité des signataires de fin mars 2018
Venons-en donc enfin à une première levée du suspense. Je doutais, avant le 27 mars 2018, que la question posée fût du type Voulez-vous, Oui ou Non, l’indépendance ? Point. Dans ce cas, le Non était sûr de l’emporter. Cette hypothèse nous paraissait en effet improbable, sauf échec cuisant de tout le processus de dialogue mis en place de longue date et surtout après décembre 2017. J’étais bien naïf, probablement influencé par d’autres naïfs, dont les diverses commissions ad hoc décrites plus haut : je me suis lourdement trompé. Tout le jeu institutionnel de l’État pour trouver des solutions de compromis, toutes les tentatives, revirements et contre-revirements des acteurs locaux, tout le jeu politique de Calédonie Ensemble et de Gomès pour aller au bout du bout de l’autonomie, mais surtout la prise en compte des conséquences des analyses politique et sociale du vote pour sortir des accords de Matignon-Oudinot et de Nouméa, tout fut par terre. On connut donc alors la proposition de question posée au référendum et le suspense était presque terminé.
Effectivement, après ce marathon de Paris le 26 mars et tard dans la nuit du XVIIe Comité des signataires, notre Premier ministre Philippe a encore réussi à faire admettre un compromis. Les loyalistes de la droite dure voulaient une question du type Oui ou Non à la France et surtout Oui ou Non à l’indépendance. Les indépendantistes pour une fois unis (hors le parti travailliste et son mouvement le RIN qui laissait toujours planer la possibilité de boycott du référendum[8]) exigeaient que le terme pleine souveraineté apparaissent, en référence à la lettre des accords de Nouméa ; rappelons que c’est le seul terme juridiquement valide en droit international. Exit toute tentative de compromis sur le fond de la question, même, répétons-le, la dernière tentative du nationaliste mais loyaliste Gomès avec son autonomie très élargie ; restait un simple jeu sur la lettre…
La question posée fut (validée par le Conseil d’État) celle-ci : « Voulez-vous que la Nouvelle-Calédonie accède à la pleine souveraineté et devienne indépendante ? », avec un bulletin Oui et un bulletin Non. Une question bien binaire et curieuse que n’imposaient pas les accords de Nouméa ; ou alors les conclusions des missions Courtial-Soucramanien et autres étaient bidons. Comme Coluche qui raillait une lessive qui lave plus blanc que blanc, Philippe nous proposa comme compromis entre les partisans du mot indépendance et les adeptes de l’expression pleine souveraineté une question avec la redondance ou pléonasme pleine souveraineté-indépendance ! Le compromis sur la lettre était trouvé ; Gomès[9], avec toujours le même humour, nous indiquait simplement qu’indépendance était un « sous-titre » explicitant, pour ceux qui n’auraient pas compris, la pleine souveraineté. Tout ça pour ça !
La chaîne de télévision Caledonia (assez proche des indépendantistes de la Province Nord) tenta d’apporter une explication à cette bizarre question. Le journaliste[10] cita Tjibaou qui distinguait en effet les deux notions : « La souveraineté, c’est les droits de choisir nos partenaires ; l’indépendance c’est le pouvoir de gérer la totalité des besoins créés par la colonisation par le système en place ». Un « jeune membre du Palika[11] », cité par le même rédacteur en chef, confirma ce qu’écrivait Tjibaou : « La première phase pour les indépendantistes serait d’accéder à la pleine souveraineté, puis il s’agirait de devenir indépendant au bout de 4 ans, en 2022 ». « Une forme d’aveu » continua le journaliste : « Le pays n’est pas prêt à tout gérer tout de suite, par contre s’il accède à la souveraineté, le pays pourra choisir ses partenaires, et l’on pense à la France et aux pays de la région Pacifique, avant dans quelques années de pouvoir gérer la totalité des compétences. Alors pour conclure, continue notre éditorialiste, chers téléspectateurs, cette question ne comporte finalement pas de pléonasme. Le mot important dans cette question est peut-être ce “et“ que les indépendantistes traduisent par “et puis“ : la pleine souveraineté et puis l’indépendance ». Mais, selon cette interprétation, il y aurait alors deux questions en une : on peut accepter la pleine souveraineté et refuser l’indépendance selon ce scénario du jeune membre du Palika…
On comprenait mal cette analyse politique ; était-ce vraiment celle du Palika ? On saura plus tard qu’il s’agissait bien de la ligne de ce parti ; on va y venir. Rien n’indiquait pourtant dans la question le processus de 4 ans mentionné entre la pleine souveraineté et l’indépendance ; en outre la réponse probable étant Non à l’indépendance, on voit mal l’intérêt de l’analyse ; enfin, si le Oui l’emportait, pourquoi déjà annoncer une transition de quelques années ? Sauf pour tenter de ratisser un peu plus large ? Les spécialistes de droit international et de droit constitutionnel jugeront en termes juridiques s’il s’agit bien d’une redondance, d’un sous-titre ou d’une précision… Mais politiquement, l’imbroglio était parfait.
Les habitants du Caillou (des tas de micros-trottoirs l’indiquaient déjà) comprenaient bien ce que voulait dire indépendance mais rarement ce que signifiait souveraineté, malgré le sous-titre à la Gomès La question n’est donc pas si claire que cela… Mais la réponse serait sans doute Non à une telle question. Les jeux étaient faits au lendemain du référendum pour les loyalistes, mais l’incertitude des jours d’après demeurait. Car dans ce cas, sauf bouleversement, les accords de Nouméa restent entiers, avec la possibilité de nouveaux référendums en 2020 et 2022 (ce fut en fait fin 2021 ; on y reviendra).
III-312 La bourde de Manuel Valls en février
* Valls sur le Caillou en février 2018 : le voyage en fait inutile de la nouvelle Mission parlementaire
Une délégation de cette nouvelle Mission désignée à l’automne 2017 et présidée par Valls[12], s’est donc rendue sur place en février 2018. Son rôle, pas du tout évoqué par Philippe lors de sa venue début décembre 2017, semble n’être surtout que « d’informer la représentation nationale du contexte local, à la veille de ce référendum historique ». Rien à voir avec les travaux de la mission précédente, où un dialogue évident État-Caillou avait été mis en place, ou de la mission Christnacht-Merle. Valls considère que c’est le jour d’après du référendum qui n’est pas suffisamment préparé : « Il y a sans doute de la confusion, voire de la peur sur ce qui peut se passer après. Nous concevons cette mission comme un élément d’éclairage sur la suite du référendum », a-t-il déclaré à la presse, en marge d’une rencontre avec le Sénat coutumier. Éclairage des habitants du Caillou ou de la représentation nationale ; et seulement pour le jour d’après ? Il ajoute : « Or, force est de constater qu’à quelques mois de la consultation ni la date, ni la question, même si on l’imagine[13], n’ont encore été choisies ».
Ces déclarations étaient un peu en porte-à-faux avec celles de Philippe qui voulait surtout préparer les jours d’avant, qui voulait surtout éviter les références aux inquiétudes et peurs, qui était convaincu que le Congrès allait choisir tout seul la date du référendum. Jusque-là, rien de bien original, sauf ces petites contradictions avec l’approche de Philippe. Mais ce n’est pas tout.
* Valls : impair, passe, et manque…
Valls, président de la mission, et Christian Jacob (LR) rapporteur ont tous deux exprimé publiquement leur « attachement » au maintien de la Nouvelle-Calédonie dans la République lors d’un débat mardi soir 20 février 2018 avec le public calédonien dans l’enceinte du Congrès. Il faut préciser que ce débat était animé par une radio très Calédonie française souvent mentionnée dans ce feuilleton : Radio rythme bleu[14] (RRB). On n’ose pas penser que si ce débat avait été animé par une radio indépendantiste comme Radio Djiido[15], Valls eût déclaré son amour pour l’indépendance…
La sortie de Jacob est en cohérence avec les déclarations antérieures de Sarkozy ; celle de Valls est plus étonnante alors que Hollande s’était toujours gardé d’émettre le moindre sentiment personnel et encore moins comme Président de la République ; de même que Philippe lors de sa visite. D’autant plus que les socialistes ont toujours été, au moins en paroles, pour l’indépendance. Valls a déclaré exactement : « Je suis très attaché à ce lien entre la Nouvelle-Calédonie et la France et je souhaite que la Nouvelle-Calédonie reste dans la République[16] », rajoutant cependant immédiatement qu’il allait faire grincer quelques dents indépendantistes. Lors de son passage, toujours avec Jacob, à une émission télévisée[17] de Caledonia le 21 février, la journaliste lui demanda astucieusement comment Néaoutyine, qu’il venait de rencontrer, avait trouvé cette déclaration ; un peu gêné il indiqua qu’ils n’en avaient pas parlé. Deux jours plus tard seulement, au JT de Calédonie 1ere, à une question sur sa déclaration qui faisait maintenant le buzz, il restait (comme Jacob, encore là) droit dans ses bottes, assumant ses convictions personnelles.
On imagine la levée de bouclier des indépendantistes. Par exemple Mapou : « … La mission vient de fendre l’armure en prenant position ouvertement contre l’indépendance et de placer ses travaux dans un cadre qui devient partisan[18] ». Le leader indépendantiste continuait en déclarant avoir « l’impression que tout l’appareil d’État va être aligné derrière les loyalistes pour défendre le maintien au sein de la République ». Évoquant la venue en mai du président Macron il s’est enfin interrogé : « Va-t-il venir pour déclencher la campagne du “non“ au référendum ? ». Mais la levée de bouclier, moins virulente, vient aussi de Calédonie Ensemble : c’est un « impair » a déclaré le Secrétaire général de CE (Philippe Michel, également président, à l'époque, de la Province Sud) qui vient « compliquer une situation qui l’est déjà bien assez […] Nous pensons que si l’État marque sa préférence pour une solution ou une autre, on coupe court à toute discussion et on engendre des crispations ».
On ne connaît pas comment Philippe et Macron (dont le buzz a dû faire siffler les oreilles) ont accueilli Valls dès son retour des Tropiques ; notre sentiment c’est qu’en passant en Calédonie, il a commis un bel impair et a manqué (ou réussi) à détricoter la belle ouvrage de Philippe. Les oreilles du Canard enchaîné auraient sans doute permis de répondre rapidement à cette interrogation ; mais rien le mercredi suivant… La réforme de la SNCF apparaît en grand titre ; mais pas même une ligne sur la gaffe de Valls pourtant mentionnée par la presse nationale. Plus tard, Philippe prit acte de cette déclaration, sans plus.
N’y allons pas par quatre chemins : tout le monde en France se souciait comme d’une guigne (une cerise, pas une malchance) de ce qui se passait sur le Caillou[19], sauf en cas de malheur ; et Macron avait déjà fort à faire avec Daech, Trump et Poutine ainsi qu’avec Mayotte…
III-313 Le président Emmanuel Macron et le Caillou : d’abord l’art du « en même temps » en 2018
Macron était assez ambigu : il avait apparemment, comme de Gaulle, compris[20] les loyalistes, en se prononçant pour une Nouvelle-Calédonie dans la France : « Quel que soit le choix qui sera fait, la République sera aux côtés de la Nouvelle-Calédonie, car il ne peut y avoir de rupture dans notre histoire commune », avait-t-il affirmé pendant l’entre-deux-tours de l’élection présidentielle au quotidien local Les Nouvelles Calédoniennes. Applaudi par les loyalistes ; on peut trouver une autre interprétation, si les mots ont un sens : même en cas d’indépendance, la France ne rompra pas son histoire commune avec la Calédonie devenue Kanaly Nouvelle-Calédonie ; autrement dit, tout était possible selon Macron, en même temps de l’indépendance-association à la pleine souveraineté.
Pas de déclaration fracassante en fait lors de sa visite début mai où chacun y trouva son compte ; et en fait rien de bien nouveau. Presque un non-événement, mais une communication très réussie.
* L’art des commémorations réussies…
À Ouvéa d’abord. Malgré le rejet annoncé par les familles des morts kanak de la grotte d’Ouvéa qui menaient campagne depuis mi-avril pour s’opposer à la venue présidentielle, qualifiée de « provocation » (campagne menée par Macki Wea, le président du Comité du 5 mai[21]) notre président a osé[22] aller sur l’île, passant du monument aux militaires tués à Ouvéa aux plaques commémorant l’assassinat des deux leaders indépendantistes, mais sans oublier celle du mémorial de Wadrilla où sont enterrés les 19 Kanaks tués lors de l’assaut de la grotte de Gossanah. Il n’y a cependant pas déposé de gerbe (il l’avait annoncé mais y renonça : c’était un accord avec les protestataires[23]) « pour apaiser tout le monde… compte tenu de cette voix dissidente » ; il est resté en outre en retrait, de l’autre côté de la route.
Au Centre culturel Tjibaou de Nouméa ensuite. Comme annoncé, Macron a remis au gouvernement[24] l’original des deux actes de prise de possession de ce territoire, les 24 et 29 septembre 1853, au nom de Napoléon III : « En décidant de remettre ces deux actes de possession, je voulais signifier que nous ne sommes plus au temps de la possession, nous sommes au temps des choix et d’une prise de responsabilité collective ». Ce geste fut en général salué, sauf par quelques loyalistes durs qui y voyaient un quasi-reniement à la prise de possession de la New-Caledonia de James Cook par Napoléon Le Petit.
* … avec peu de couacs
Plus généralement, Macron fut partout salué par tous les bords politiques. Mais il n’alla pas discuter à Ouvéa avec le Comité du 5 mai en passant par le barrage de gendarmes.
La droite (mais pas toute…) avait fait auparavant une grande manif « Bleu blanc rouge » à Nouméa pour la Nouvelle-Calédonie française. Le Figaro écrit, le 5 mai : « Une vague “bleu blanc rouge“ a déferlé dans les rues de Nouméa. Ce vendredi, quelque 4 000 personnes selon la police, plus de 10 000 selon les organisateurs ». Cela fait du monde. « Une marche, continue le journal, sans le principal parti politique Calédonie Ensemble, le principal parti non indépendantiste de centre droit, qui représente[25] 30 % des suffrages calédoniens, n’avait en revanche pas appelé à soutenir la marche. Au second tour des élections présidentielles, ce parti avait appelé à voter Emmanuel Macron, à l’inverse des deux formations LR qui n’avaient pas donné de consigne de vote. De son côté, le Front national avait quant à lui appelé à se rendre à la manifestation ».
On a un trou : qui avait lancé en France les rassemblements et défilés Bleu blanc rouge ?
* Indépendance ou non ? Macron ne prit pas parti en 2018, mais…
Sur la même ligne que son Premier ministre, le président ne prendra pas parti : « Ce n’est pas au chef de l’État de prendre position sur une question qui est posée aux seuls Calédoniens […] C’est aux Calédoniens qu’il revient de prendre position ». Cependant, en même temps, le jeu d’équilibriste (il avait souhaité que l’archipel reste « dans la communauté nationale ») fut surjoué.
D’un côté la repentance : « Pour parler d’avenir, il faut d’abord parler des racines », avait-t-il déclaré dans un lieu inédit pour sa déclaration politique finale : le Théâtre de l’île, à Nouméa. Ce lieu ayant été tour à tour une église, un entrepôt, et une infirmerie avant de devenir un théâtre, il fut défini par Macron comme un « lieu palimpseste[26], à l’image de la Nouvelle-Calédonie », rappelant ainsi que « l’histoire n’est jamais figée». « Jamais nous n’oublierons la ségrégation des Kanak parce qu’ils étaient Kanak. Sans terre, sans droits, sans services publics, sans honneur […] La Nouvelle-Calédonie porte la mémoire de ces révoltes matées dans le sang, et de ces divisions entre tribus organisées par le colonisateur pour asservir chacun ». Belle envolée lyrique mais devenue banale sur le Caillou, sauf pour les ennemis de trop de repentance[27].
De l’autre, l’appel à « … ne pas faire reculer l'Histoire », et l’insistance sur les autres victimes de cette histoire : en saluant « les dizaines de milliers d’hommes et de femmes, de l’Hexagone ou d’Algérie, qui ont abreuvé cette terre de leur sueur et de leur sang sous l’administration pénitentiaire. Ils ont connu un enfer de chaleur et de fatigue en Nouvelle-Calédonie ». Ce qui résonne avec une quasi-lamentation sur la France qui « ne serait pas la même sans la Nouvelle-Calédonie » ; cependant, il rajouta, mais un peu plus tard dans son discours : « … elle serait moins belle ». Cette remarque, somme toute banale, fera plus tard plus de bruits quand elle sera répétée (et pas sur le Caillou, mais à Papeete, en Polynésie française, fin juillet 2021) quand il déclarera que « La France serait moins belle sans la Nouvelle-Calédonie »[28].
Synthèse, il ne pouvait pas ne pas faire référence au fameux destin commun : « Kanak, Caldoches, Zoreils, Polynésiens, Tonkinois, Javanais, Japonais, et tous les autres, qui ensemble ont construit la Calédonie d’aujourd’hui » ; avec aucune mention spéciale aux Wallisiens-Futuniens, il est vrai polynésiens, qui comptent pour environ 10 % de la population du Caillou. Banale synthèse là encore.
Il n’a en outre pas oublié la géopolitique : un tableau enthousiaste fut brossé du rôle que le Caillou devrait jouer dans le cadre de sa nouvelle stratégie d’Axe IndoPacifique « face à l’hégémonie de la Chine » ; l’idée était toute chaude : elle venait d’être définie lors de la visite de Macron en Australie quelques jours auparavant. À ce tableau fut rajouté le rôle de l’État face aux défis du réchauffement climatique. Ces deux aspects seront répétés en boucle jusqu’à aujourd’hui.
Et Macron a, pour le coup, mis tout le monde d’accord, de Backès, des Républicains calédoniens (« Un discours magnifique ») à Wamytan, de l’UC-FLNKS (« Des propos rassurants ») en passant par Gomès de CE (« Le président a trouvé les mots justes pour enjamber le référendum du 4 novembre, et réconcilier les Calédoniens avec leur avenir »). Sauf le RIN qui voulait lui rappeler ses propos de campagne de 2017 en Algérie, sur « la colonisation, crime contre l’humanité » ; Macron s’est contenté, à Nouméa, de parler de crime…
III-32 Les Kanak de l’UNI-Palika : une sorte de révolution dans la révolution
L’unité des indépendantistes, affichée par tous les partis de gouvernement n’était qu’une façade (on le sait mieux maintenant) : l’UC maintenait sa revendication de pleine souveraineté en refusant l’indépendance-association. Seul le Palika avait passé le Rubicon en tentant de rallier les tendances progressistes du camp loyaliste : dernier petit jeu avec Gomès ?
III-321 Le programme de l’UNI-Palika précisé, et surtout la période de transition
Il s’agit d’une contribution de l’UNI[29], l’union électorale du Palika, à la détermination de l’avenir politique et institutionnel de la Nouvelle-Calédonie : « Identité, Nation pluriculturelle, démocratie, laïcité, solidarité, système institutionnel décentralisé et pluriel, transfert des compétences, période de transition, accord de partenariat avec la France, L’après 2018 : les grands chantiers et prises de position de l’UNI pour l’accession à la pleine souveraineté de la KNC ». La KNC, la nouvelle Nation, c’est la Kanaky-Nouvelle-Calédonie selon les indépendantistes, notre Kanaky (sans tiret…) Nouvelle-Calédonie.
On a là l’ébauche (mais déjà très élaborée dans la forme) du programme politique du Palika au cas où l’indépendance serait sortie des urnes le 4 novembre 2018, mais débouchant sur l’indépendance-association (pardon la pleine souveraineté avec partenariat…)[30]. Ce programme est peu différent pour ses aspects institutionnels de celui du FLNKS présenté plus haut. Il comporte cependant des développements préalables importants ainsi que deux nouveautés : le partenariat (avec la France, mais aussi avec d’autres pays, quoique le partenariat avec la France soit le seul développé) ; une période de transition de 2018 à 2022, cette dernière date correspondant à celle de l’éventuel troisième référendum prévu par l’accord de Nouméa[31]. Ce qui est assez astucieux, car la Constitution du Pays KNC devrait, selon le projet, être approuvée également par un référendum. On comprend mieux maintenant le « et » remplacé par le Palika par « et ensuite » concernant la question posée au référendum.
* Des rappels généraux…
Une citation de Tjibaou apparaît en exergue : « Les hommes ont lié la paille pour n’en faire qu’un seul toit » (Chroniques du pays kanak, tome 3, 1978). Le texte de ce programme a été élaboré par l’UNI avec l’aide d’experts zoreils depuis 2013, suite à un accord à un Comité des signataires (dont la date n’est pas donnée). Le texte insiste sur les analyses du Rapport Courtial-Soucramanien pour fonder l’acceptation de la pleine souveraineté avec partenariat.
Dans l’introduction, l’analyse économique globale indique que KNC était déjà en plein développement depuis les années 1990, mais avec aussi un fort développement des inégalités, pour montrer que l’indépendance est économiquement viable. Les limites du modèle sont cependant indiquées : « Les potentialités sont neutralisées, une forme d’assistanat organisé gagne et cultive le manque d’initiative et de prise de risque. Il est tellement plus confortable de transférer en permanence la responsabilité sur la Métropole et l’État central ». « Le PIB a doublé de 1999 à 2015 (407 à 956 GCFP) » ; mais c’est en CFP courants : aucune référence au ralentissement puis à la crise économique du nickel n’est donnée. Par contre, le rebond futur est prévu et mis en relief, mais sans référence aux cours du nickel ; seule la référence à l’utilisation des pleines capacités des usines (pas bête, on l’a vu) sur 2018-2022 est indiquée. Le tourisme apparaît également comme un atout maître ; on peut continuer à rêver avec l’arrivée des Chinois (des touristes, s’entend)…
La « surévaluation de la monnaie » (en fait de la devise) est aussi indiquée ; on peut y lire en creux une volonté de dévaluation ou de dépréciation favorisant les exportations, l’autre volet d’une telle mesure (le renchérissement des importations) étant à peine évoqué. On botte en fait en touche : « Le projet d’indépendance se place dans un contexte international de souveraineté qui se conjugue avec interdépendance » (toujours la référence au couple indépendance-interdépendance de Tjibaou).
Gros problème selon nous : les nationaux vont s’appeler Kanak, comme dans le projet de 1986 soumis à l’ONU en 1987. Ce n’est pas forcément très malin… Je proposerais plutôt CalédoKanak ou KanakCalédonien, lourds mais plus destin commun... Mais je dis rien ! On attend les réactions des loyalistes, on les devine… Nommer Kanak les Kanak, Caldoches, Wallisiens et autres minorités, c’est de plus en contradiction avec la constatation soulevée par le projet d’une « Nation pluriculturelle » ; il est même indiqué que le chemin sera long pour obtenir une identité commune. Restent : la devise du Pays (« Terre de parole, terre de partage », adoptée par le Congrès) ; son hymne (« Soyons unis, soyons frères ») ; la langue officielle (le français plus les langues kanak enseignées) Et quid du wallisien ? Quant à la Nationalité, nous n’avons pas tout compris…
La démocratie proposée sera celle d’une nation laïque et solidaire, mais d’un État souverain avec partenariat(s). Le projet mentionne le danger d’une partition du Pays, rappelant que certains indépendantistes (LKU, PC) ont évoqué cette possibilité ; le projet de programme s’y oppose. Les institutions seront une sorte de reprise de celles qui existent actuellement, avec des modifications (comme dans le projet du FLNKS) : bref une copie de la IVe République. Le Sénat coutumier serait élargi aux autres communautés et deviendrait une Chambre des représentants, le CESE serait probablement supprimé. Les transferts de compétences régaliennes sont proches de ceux donnés par le projet du FLNKS ; la justice devra sans doute faire appel à coopération ou partenariat ; le maintien de l’ordre sera unique (police, gendarmerie et police municipale unifiées) ; défense avec accords ; monnaie-devise (pas l’euro, maintien du CFP ou panier de monnaie, dont l’euro) ; relations internationales (accords privilégiés avec la France et les Nations du Pacifique).
* … mais surtout une période de transition
Cette période de transition (en cas de Oui au référendum de 2018…) s’étalerait de 2018 à 2022, permettant d’élaborer une Constitution pour une pleine souveraineté avec partenariat. Tout ne changera donc pas le jour d’après si l’indépendance était votée ; et l’UNI-Palika est le seul mouvement à traiter explicitement cette question de la plus haute importance. Après le référendum, l’État devrait garder ses prérogatives : « Or, dans le cadre d’un vote favorable à l’indépendance, l’État doit continuer à assurer la sécurité en attendant que le nouveau pays se dote de ses propres moyens ». Discrètement, il est proposé de garder également les transferts de fric de la Métropole... Enfin, reconnaissant que le pays n’est pas encore tout à fait prêt à s’autogérer, ce programme propose un large effort sur la formation des cadres (Kanak et/ou Calédoniens ?).
Quant au point concernant la « définition du partenariat avec la France et d’autres pays », il est de la plus grande importance : « Ce point est un sujet de la période de transition même si des discussions sur les termes du partenariat peuvent être préparées et esquissées avant le référendum avec les pays concernés ». Mais, répétons-le, seul le partenariat avec la France est précisé, toujours en référence avec le Rapport Courtial-Soucramanien : « Cet accord lierait les deux États souverains sur des bases nouvelles… ».
Pendant cette période, la Constitution sera préparée (avec ou sans Assemblée constituante ?) mais avec référendum pour l’approuver ou non. C’est en effet très astucieux sinon fort malin ; la période de transition serait donc tout sauf un chaos (et avec la sécurité restée à la Métropole et les transferts pérennes) c’est comme si les indépendantistes donnaient aux loyalistes une seconde chance après la pleine souveraineté et avant l’indépendance : « C’est donc un enjeu politique majeur et un atout en faveur de l’accession de KNC à la pleine souveraineté de 2018 ».
L’UNI-Palika joue ainsi le jeu de l’apaisement avec une nouvelle version, complètement et doublement inversée, de la tentation du Guépard : il faut que tout change, cependant progressivement, pour que tout change.
III-33 Les loyalistes : toujours l’hégémonie de Calédonie ensemble et du Líder máximo Gomès (plus pour longtemps…)
III-331 Avant le 4 novembre 2018
Résumons et répétons-nous encore. Gomès était depuis une dizaine d’années et surtout depuis 2014-2015, le personnage central de la vie politique du Caillou. Cela n’allait pas durer, mais n’allons pas trop vite… Son rôle central pouvait apparaître comme la conséquence d’un biais de nos analyses : nous en aurions fait le principal héros (ou anti-héros) de notre roman policier. Il fut sans aucun doute central à plus d’un titre : il était au cœur de l’échiquier (loyaliste de centre-droit affilié à l’UDI, mais progressiste au niveau économique et social) ; il était depuis 2012 député et fut réélu en 2017 en devenant Macron compatible ; il était incontestablement le patron d’un parti loyaliste dominant (jusqu’en 2019 ; on y reviendra) de la tête et des épaules les droites traditionnelles éclatées. Bref, il avait joué sur le Caillou un rôle analogue à celui pris en France par Macron, mais sans se dire ni de droite ni de gauche, quoique s’assumant du centre dont tout le monde sait qu’il fut toujours de droite. Il l’a en fait précédé de quelques années. Avec cependant à la fois plus de ruse et de franchise : il avait tiré un nombre incroyable de bords pour remonter les vents contraires et y avait réussi (c’est un fin politique) ; il était resté loyaliste malgré les accusations de la droite traditionnelle qui le taxait d’indépendantiste et de socialiste (il était franc).
* Le vacillement de la Plateforme
Certes, déjà avant mars 2018, la Plateforme vacillait : les oppositions en matière de politique économique et sociale entre Calédonie ensemble et les ex-RPCR, talonnés par les Républicains calédoniens, étaient trop fortes.
Surtout, leurs conceptions du dialogue avec les indépendantistes étaient bien éloignées. Frogier, du Rassemblement-LR avait toujours eu du mal à digérer la notion de Peuple calédonien avancée par Édouard Philippe en décembre 2017. Fin février 2018, le G10 était en crise, et seulement pour la date du référendum, car Gomès (encore lui…) avait publié un accord de ce G10 signé par tous les représentants des partis, que les Républicains calédoniens (Backès), évidemment, et même les LR locaux (Thierry Santa) avaient ensuite dénoncé. Gomès était encore accusé de collusion avec les indépendantistes : Selon Backès « la repentance coloniale est beaucoup trop forte à notre goût ». Le nouveau groupe réduit continuait cependant son travail « sur le chemin de l’avenir », mais avec un troisième homme de la droite (Gaël Yanno) de plus en plus réticent. Ce G8 se sentit cependant obligé de préciser une nouvelle fois « qu’aucune discussion n’est engagée sur une quelconque indépendance ou indépendance association ou tout autre statut post-référendaire ». Un véritable fixette, ce refus de l’indépendance-association !
Le vacillement avait donc commencé ; à moins que la Plateforme ne fût déjà par terre ; Thierry Santa, de LR estimait cependant encore qu’elle n’était pas morte. Le Premier ministre Philippe, encore lui, semblait avoir redonné vie au G10 après le dernier Comité des signataires de mars, cependant en présence non plus du seul Haussaire mais accompagné d’un représentant de Matignon ; il s’agissait toujours de proposer une charte des valeurs calédoniennes. Les contestataires freinaient des quatre fers. On voit mal à quoi aurait servi cette charte si la question binaire proposée était validée. De toute manière, Les Républicains Calédoniens de Backès ont été très clairs : « Cette petite charte n’est commune qu’aux indépendantistes et aux nationalistes[32] et par conséquent qu’elle ne peut avoir l’ambition de représenter l’ensemble des valeurs calédoniennes » ; pour Frogier et le Rassemblement-Les Républicains, ce travail sur les valeurs communes se justifiait dans la perspective d’un troisième Accord, cette solution n’ayant pas été retenue, il n’avait plus de raison d’être. Sauf, peut-être, après 2018.
Cette charte venait cependant de sortir[33] (encore un des nombreux miracles du Caillou), mais ressemblait au préambule de l’accord de Nouméa assorti d’une sorte de Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, et avec quelquefois des interprétations divergentes explicitement écrites. Là encore, l’insistance de CE et l’abnégation de notre Premier ministre auront gagné. Mais fin mai, les bisbilles reprenaient de plus belle… Et la droite dure de remettre le couvert accusant « CE et le Palika d’alliance politique [...] résolue à obtenir un accord quel que soit le résultat » du référendum. Et là, ce furent tous les partis loyalistes hors CE qui sortirent du G10. La Plateforme loyaliste était-elle enterrée ?
* L’enterrement de la tentation du Guépard
Cette tentation, c’était pourtant bien fini. Comme Saint Antoine, Gomès, s’il eut cette tentation, aura résisté jusqu’au bout ; il affirmera même certainement qu’il ne l’a jamais eue, même en rêve. Il faut lui reconnaître, répétons-le, qu’il n’a jamais exprimé publiquement son moindre doute envers le loyalisme à la République française et avait toujours rejeté l’indépendance association. De la théorie du complot de Martin à toutes nos hypothèses développées dans ce livre et étayées par des remarques du Haussaire Vincent Bouvier, il ne reste rien.
Nous continuions à estimer en 2018 que c’était bien dommage ; et nous avions montré pourquoi : la Kanaky Nouvelle-Calédonie est économiquement et socialement viable dans la perspective de remontée des cours du nickel si des réformes économiques et sociale, déjà lancées par Calédonie ensemble, étaient développées. Début 2024, on persiste et signe.
Alors, une seule solution à cette énigme : le jeu du dialogue, du rapprochement d’idées avec les indépendantistes sur de nombreux points (les 51 % de la SLN en particulier et la doctrine nickel en général, la politique économique assez progressiste ; le développement de la repentance envers les Kanaks) n’était probablement qu’un jeu politique permettant à CE et à son leader d’acquérir le rôle central qui ne faisait en 2018, répétons-le encore, aucun doute. Depuis 2015 (mais avec des trous d’air) accord en bonne et due forme ou simple conséquence de la responsabilité des indépendantistes, CE gouvernait (certes dans un gouvernement collégial) avec leur soutien. Le centrisme (encore le nationalisme calédonien…) était devenu une arme redoutable face au loyalisme extrême et à l’indépendantisme et à une gauche impuissantée[34] ; et pas seulement sur le Caillou. Mais le député du Caillou Macron-compatible aura précédé Jupiter.
III-332 Après le 4 novembre 2018
* Encore plus loin sur le bout du bout, mais toujours dans la République
CE, en cas de Non à l’indépendance (dont la probabilité autour de 60 % à 70 % et plus de Non fut martelée de nombreuses fois[35], et avec gourmandise) précise la nature du dialogue avec les indépendantistes le jour d’après sur la base de la ligne déjà développée par Gomès : le bout du bout de l’autonomie donc, avec un certain partage[36] des pouvoirs régaliens et la fameuse calédonisation, mais toujours bien sûr dans la République. Le clivage avec les indépendantistes devrait toujours être apaisé par une déclaration commune le jour d’avant sur le socle des valeurs partagées. Et la décolonisation serait achevée, sans indépendance ; ce qui est en effet admis par l’ONU[37]. Mieux, Gomès propose maintenant l’octroi d’un « pouvoir d’auto-organisation », évidemment sous le contrôle du Conseil constitutionnel et sous l’autorité du président de la République. Et, après un vote du Congrès, le Pays (qui gardera son nom) pourra arborer un drapeau commun à côté du drapeau Bleu-Blanc-Rouge, ce drapeau commun se substituant donc à celui de Kanaky.
Cette ligne politique avait été actée par CE au conseil politique de Koné le 28 avril dont le thème était « Dialoguer pour un avenir dans la France aux couleurs de la paix ». Fut proposée l’adoption d’une déclaration solennelle sur le patrimoine commun du peuple calédonien avant le référendum, signée par tous les acteurs politique locaux ; cette déclaration semble être un doublon à la charte des valeurs, maintenant approuvée. Dunoyer[38] précisait ce projet ; il répondit non (un peu gêné) à la journaliste qui lui faisait remarquer que cette déclaration solennelle était la même chose que la charte des valeurs communes. Il précisait encore la « nouvelle organisation politique non limitée dans le temps », après accord avec les indépendantistes ; la journaliste lui parlant du « partage des compétences régaliennes », il s’opposa à l’expression partage, et, reprenant le thème de la calédonisation, il affirmait que le projet était d’être « plus largement associé et de participer à ces compétences, sous l’autorité de l’État ». Le mot associé était peut-être malvenu pour un parti qui restait vent debout contre l’indépendance-association : autonomie-association donc ? Enfin, à la journaliste qui lui rappelait que les loyalistes durs allaient encore lui reprocher « avec un tel programme de glisser vers l’indépendance », il réitérait en substance la déclaration habituelle de CE : « Depuis toujours, nous appelons à voter Non à l’indépendance ».
Gomès tentera donc la stratégie plus douce du Guépard-Raminagrobis[39] : il faut que peu de choses change pour que rien ne change.
* Le pari (risqué) de Gomès : à long terme, la revendication indépendantiste devrait s’estomper puis disparaître
Mieux (ou pire, c’est selon) à plus long terme, CE pensait en 2018 que la lutte indépendantiste allait progressivement s’estomper avec la disparition des vieux et l’apparition des nouvelles générations : ces loyalistes ne jouent plus la montre mais la grosse horloge du temps très long, au moins trente ans, sinon plus. L’exemple québécois étant censé démontrer, selon CE, cette perspective : au référendum de 1995, les indépendantistes n’avaient perdu que de justesse (avec 49,75 % des voix) ; en 2018, ils semblaient nettement plus minoritaires, autour de 30 % selon Gomès (36 à 39 % en fait). Rajoutons cependant que ces pourcentages fluctuent d’ailleurs au gré des disputes avec les anglophones et que la situation historique, économique et sociale des Kanak n’a rien à voir avec celle des Québécois du Canada.
Les Francophones du Canada ne sont pas des Kanak peuple premier, mais des ex-colons de l’empire français comme les anglophones ex-colons de l’empire britannique (mais ceux-là ayant abouti à l’indépendance de façon plus graduelle[40]). La France de Louis XV a simplement abandonné aux Anglais la Nouvelle-France (« quelques arpents de neige ») au traité de Paris de 1763 qui mit fin à la guerre de 7 ans, européenne (en fait déjà mondialisée) ; mais la guerre (que les anglais et les colons anglophones appelaient French and Indian War) était militairement perdue depuis 1760 en Nouvelle-France. Pour beaucoup d’historiens, 1763 est à l’origine de la guerre d’indépendance des Treize colonies d’Amérique du Nord contre les Britanniques, de 1775 jusqu’à un autre traité de Paris de 1783, avec au milieu la déclaration d’indépendance du 4 juillet 1776. Bien sûr, il y eut Lafayette et une petite vengeance française contre les Anglais, mais cette guerre d’indépendance fut plutôt une guerre civile entre loyalists et patriots.
Revenons de la Nouvelle-France à la Nouvelle-Calédonie.
Enfin, certains de gagner le référendum avec une large, sinon très large majorité de Non à l’indépendance, tous les loyalistes, CE compris, affirmaient tenter d’éviter, par un nouvel accord avec les indépendantistes, les deux référendums prévus en 2020 et 2022 ; ils n’étaient effectivement qu’optionnels : ils devaient être demandés par un tiers du Congrès. Cependant, Gomès ne remettait pas en cause le droit à l’autodétermination ; mais pour beaucoup plus tard[41]. On voyait mal en outre les indépendantistes, après l’éventuelle claque annoncée, désunis sur cette demande le jour d’après.
Le FLNKS n’avait pas tardé, réponse du berger à la bergère, de réagir, mais sans rebondir sur la colère, bien au contraire. Son porte-parole Daniel Goa indiqua : « Les pro Français sont pressés car ils veulent revenir dans la France. Nous avons le temps et nous sommes les gardiens du temps, le corps électoral réajustera mécaniquement cette injustice d’être minoritaire dans notre pays »[42]. Goa semblait avoir fait, avec cette sortie, son deuil du résultat du référendum de novembre : ce n’était pas très malin cette humble position, sauf à vouloir donner un sursaut aux Kanak indécis, pour éviter la catastrophe, pour aller voter.
En outre, il rêvait sans doute que le dégel du corps électoral ne se ferait jamais ; et c’est encore le débat central début mars 2024, entre l’UC d’un côté, Les loyalistes et l’État de l’autre.
En attendant, les élections provinciales de 2019 allaient pousser Calédonie ensemble vers la sortie ; et beaucoup d’autres choses curieuses…
Notes
[1] UNI, Union Nationale pour l’Indépendance (2018) Kanaky-Nouvelle-Calédonie (KNC), un État souverain en Océanie, Contribution de l’UNI à la détermination de l’avenir politique et institutionnel de la Nouvelle-Calédonie ; publié sur la Toile le 20 mars 2018. Voir :
https://issuu.com/l.mapou/docs/uni_projet_politique_032018_vf
[2] On pense à la Communauté du Pacifique, la CPS, présidée à l’époque par Germain.
[3] L’Australie est officiellement indépendante depuis 1901 quand les colonies se sont fédérées en Commonwealth of Australia ; mais il n’y eut jamais de déclaration d’indépendance ; en politique étrangère, elle resta toujours assujettie au Royaume-Uni jusqu’aux années 1930. La Nouvelle-Zélande fut indépendante en 1907 en devenant un dominion ; elle n’accèdera à la pleine souveraineté qu’en 1947.
[4] La peur et n’ayons pas peur n’est pas qu’une formule à la Jean-Paul II : Sarkozy l’employa lors de son voyage sur le Caillou, en réponse au Sénat coutumier : « Monsieur le président, n’ayez pas peur des Kanak », lança le président du Sénat coutumier au chef de l’État ; « Monsieur le président, n’ayez pas peur de la République française » lui répondit Sarkozy. Voir la scène :
Nicolas Sarkozy au senat coutumier de NOUVELLE - CALEDONIE - YouTube
[5] Dont la mise en place d’une Commission des sages qui veillera « à ce que les propos de la campagne référendaire ne viennent pas blesser la société calédonienne en violentant ses valeurs » pour assurer la sérénité des « jours d’avant ». Philippe fait résonner ces jours d’avant avec le fameux jour d’après de Gomès (que nous utilisons ici).
[6] Et quid de la mission parlementaire de Valls ? On va également y revenir.
[7] La date du dimanche 28 octobre 2018 était proposée, mais le Congrès ne l’avait pas encore approuvée ; il s’agira en fait du 4 novembre, une semaine plus tard.
[8] Ce sera en effet le boycott; ce qui explique en partie un score du Oui à l'indépendance inférieur en 2018 à celui de 2020 où le parti travailliste appela à voter.
[9] Dans les nombreuses interviews télévisées à la sortie du marathon.
[10] Éditorial du JT du 29 mars 2018 du rédacteur en chef Jaimie Waimo ; la veille, la présentatrice parlait bien, comme tout le monde, d’un pléonasme. La citation de Tjibaou serait tirée, nous indiqua Waimo, du « livre intitulé Les Temps modernes de 1985 » ; en fait d’une interview de Tjibaou par la revue Les Temps Modernes de mars 1985, n° 464, Gallimard, le 13-03-1985. Cet éditorial semble avoir été préparé dans la précipitation…
[11] Pourquoi un jeune membre et pas le Palika ?
[12] Dont il ne restait surtout que la polémique à l’automne 2017, lors de la création de cette nouvelle mission, avec Mélenchon. Fallait-il caser Valls ? Cette mission devenait en fait de peu d’objet après la nouvelle stratégie du Premier ministre. Ces déclarations de Valls sont parues dans la presse calédonienne, écrite, audio- et télévisuelle ainsi que dans la presse française.
[13] Valls imaginait donc la question… Ces deux problèmes furent alors résolus.
[14] Radio créée au moment des Événements, d’abord nommée Radio Riposte Bis (un clin d’œil à l’une de premières radios libres illégales animée par le PS avant 1981).
[15] Également créée à la même époque.
[16] Son propos fut souvent rapporté par « Je souhaite que la Nouvelle-Calédonie reste dans la France » ; la différence avec « dans la République » est subtile mais n’a rien d’anodine.
[17] Émission intitulée Bienvenue dans la bande.
[18] Les Nouvelles calédoniennes.
[19] Nos amis bobos de Métropole, pourtant lecteurs assidus de Libération, du Monde et de Médiapart, n’étaient au courant de presque rien ; par exemple au sujet de Valls, ils n’avaient retenu que ses divagations récentes sur l’interdiction de la religion salafiste mais n’étaient pas au courant de son impair sur le Caillou. Elle est loin la Nouvelle-Calédonie…
[20] C’est plus compliqué… Les lecteurs assidus de mes billets auront compris ; et on y reviendra.
[21] Ce comité serait lié aux gauchistes du RIN, mouvement de masse, rappelons-le, du parti travailliste et de l’USTKE de LKU. Macki serait le frère de l’assassin de Tjibaou et Yéwéné Yéwéné en 1989 : Djubelly Wea.
[22] « Amateur de premières, il voudrait réaliser ce qu’aucun président français n’a risqué avant lui, sur une terre où certains considèrent toujours l’État comme l’ennemi » écrivait Libération le 2 mai.
[23] Cependant, ceux-ci furent dissuadés de venir à Wadrilla par un barrage de gendarmes.
[24] Mais ces documents restent la propriété de l’État.
[25] C’était en 2018, avant la déroute de 2019.
[26] Ce mot que tout le monde a bien sûr appris à l’école primaire (du grec ancien gratté de nouveau) désigne un parchemin déjà utilisé dont on a fait disparaître les inscriptions pour y écrire de nouveau. C’est également, par extension, un objet qui se construit par destruction et reconstruction successive, tout en gardant l’historique des traces anciennes (c’est le cas du Théâtre de l’Île : ancien bâtiment du bagne du XIXe siècle).
[27] On peut écouter et voir ce discours bien fichu, émouvant mais Malin (je tiens à la majuscule…) : de Macron à ce Théâtre de l’île, à Nouméa le 5 mai 2018 (date cruciale : tout est dit dans ce discours et les reportages qui suivent dans l’édition spéciale du JT) ; on notera l’analyse de l’historien Olivier Houdan, plutôt rare dans les médias, et le reportage sur l’EPK, l’École populaire kanak :
https://www.youtube.com/watch?v=7x0MJT2CYjg
[28] Le lecteur l’avait déjà compris dès le début du livre, quand Macron déclara, le soir du troisième référendum du 12 décembre 2021, répétons-le : « Ce soir, la France est plus belle car la Nouvelle-Calédonie a décidé d’y rester ». Le négatif de moins belle sans devenait le positif de plus belle avec. Rajoutons une hypothèse (bien personnelle) : cette histoire de belle (plus ou moins) devrait être soumise à des psys et renvoie à notre écriture de Malin avec une majuscule. Pourquoi ? Dans son discours de remise (et non de restitution) des deux actes de prise de possession de la Nouvelle-Calédonie de 1853 par Le Contre-Amiral Febvrier-Despointes, il dit, avec un toussotement et une élocution peu claire, les choses autrement : « …si vous m’y autorisez, avec l’amour que porte la République pour la Nouvelle-Calédonie… ». Érotisme envers le corps féminin de la belle presque endiablé...
[29] Kanaky-Nouvelle-Calédonie (KNC), un État souverain en Océanie… (2018), op. cit.
[30] On se demande cependant si l’UNI ne refait pas l’histoire en affirmant que, concernant la proposition en 1985 d’indépendance-association de Pisani « … le mouvement pour l’indépendance n’avait pas exclu cette solution qu’il a toujours réitérée, notamment lors des différentes négociation de 1988 et 1998 ».
[31] Ce sera en fait en décembre 2021 ; on reviendra sur ce changement qui n’a rien d’anodin.
[32] C’est ainsi que CE et Gomès étaient alors définis par la droite loyaliste dure ; et ça continue, surtout depuis fin 2023 et début 2024 où la guerre est de nouveau ouverte des loyalistes radicaux contre Calédonie ensemble.
[33] Groupe de dialogue Sur le chemin de l’avenir, Propositions de valeurs calédoniennes partagées, le 25 mai 2018 ; et elles seront diffusées dans le public ; voir le site du gouvernement de Nouvelle-Calédonie :
https://documentation.outremer.gouv.fr/Record.htm?idlist=3&record=19138021124919562039
[34] Nouveau verbe utilisé par notre président Macron.
[35] Lors du meeting du 17 avril : méthode Coué risquant cependant de remplacer la participation des Caldoches au scrutin par des coups de pêche ou des coups de chasse, et humiliation contre-productive des indépendantistes qui ne sera guère adoucie avec la charte des valeurs communes des jours d’avant.
[36] Nous avons bien entendu le mot partage ; on y reviendra.
[37] Gomès le rappelait astucieusement dans son interview de septembre 2018.
[38] Dunoyer, reçu à Politique Direct(e) sur Calédonie 1ère le 29 avril.
[39] En référence, mais en chamboulant tous les rôles, à la fable de Jean de La Fontaine Le Chat, la Belette et le petit Lapin (Livre VII - Fable 16) ; nous en recommandons fortement la lecture pour comprendre cette stratégie. Le principal chamboulement étant d’ailleurs celui du chat : plutôt que de croquer les deux plaideurs (fin tragique) il les met d’accord.
[40] Comme pour l’Australie et la Nouvelle-Zélande, Wikipédia nous apprend que « Trois colonies se fédèrent le 1er juillet 1867 et forment le dominion du Canada, nation indépendante sous domination partielle de la Couronne britannique. Sa souveraineté totale est ensuite garantie par la déclaration Balfour de 1926, le Statut de Westminster de 1931 et le rapatriement de sa Constitution en 1982 ». 100 ans après 1867, le général de Gaulle sortit son « Vive le Québec libre ! ». Le chef de l’État canadien était toujours, répétons-le, Élisabeth II, reine du Canada, représentée par le gouverneur général qui nomme le Premier ministre (mais il n’a pas le choix) : le Canada est en fait régi dans une sorte d’indépendance-association...
[41] Voir son interview du 20 avril.
[42] Déclaration projetée en écrit par Calédonie 1ère (sans source) lors du Politique Direct(e) du 29 avril avec Dunoyer. « Ils veulent revenir dans la France » peut paraitre curieux ; Dunoyer indiquant qu’il n’avait pas à revenir dans la France, y étant.