Avec ajouts successifs du mardi 18 novembre... et fin du billet le 22 novembre.
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Introduction-incipit : un duel à fleurets non mouchetés, le 2 novembre 2025 (avec deux vidéos de BFMTV) entre Mélenchon et Zemmour, avec au centre le Parti socialiste mais aussi, pour le second, le Rassemblement national qui serait politiquement situé « à gauche »…
Selon Mélenchon, le PS aurait changé d’alliance, passant à un rapprochement avec « le centre gauche » d’Attal. Tout simplement, et répété à l’envi : le PS hésitait, il n’hésiterait donc plus.
Zemmour, récent auteur du livre (sorti le 22 octobre, chez Fayard, – qui a bien changé depuis que Bolloré s’en est emparé – Collection Pensée Libre…) La messe n’est pas dite, sous-titré Pour un sursaut judéo-chrétien, taxe, dans la seconde partie de sa longue interview, LFI de « parti de l’étranger ».
Au début de l’interview étaient analysés : les rapports avec l’Algérie ; puis l’accord de fait, selon lui, entre le RN (« de gauche », et « profondément marxiste ») et LFI ; ensuite les sondages donnant Bardella largement en tête du premier tour des présidentielles (avec plus de 35 % des suffrages) ; enfin (après la charge contre LFI où les Musulmans, les alliés électoraux que Mélenchon recherche, agiraient comme « une armée d’occupation ») l’histoire récente du musée du Louvre (où Zemmour y prônait la suppression du ministère de la Culture).
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Saison 1 – Semaine se terminant le 8 novembre (suite)
Le 3 novembre 2025, le débat à l’Assemblée nationale s’enlisait, notait La Dépêche (de Métropole) qui résumait la journée de lundi. On y trouvait quelques informations qui nous avaient peut-être échappées dans le billet précédent.
Puis, selon un article du 4 novembre, huit syndicats de retraités appelaient à manifester dans toute la France le 6. Ils demandaient (dont CGT, CFTC, CFE-CGC, FSU, Solidaires, FGR, LSR et Ensemble et Solidaires) l’abrogation de la réforme des retraites 2023, pas seulement sa suspension, et dénonçaient la suppression de l’abattement fiscal de 10 % (qui augmenterait leur impôt sur le revenu) ainsi que le doublement des franchises médicales.
https://mesinfos.fr/le-6-novembre-les-retraites-dans-la-rue-contre-le-budget-2026-233248.html
Le 4 novembre en fin de journée, Public Sénat nous apprenait qu’il y avait de l’eau dans le gaz entre Larcher et Lecornu.
Ce long article, où était indiqué que ça tirait au Sénat de tous les côtés contre le Premier ministre, peut se résumer ainsi (début de l’article) : « Depuis "un mauvais départ", le courant passe mal entre la majorité LR-centriste du Sénat et le gouvernement. Discussions avec le PS au détriment des LR, députés invités à Matignon sans les sénateurs, qui aimeraient "être dans la boucle"… Les causes de fâcheries se multiplient. Pour tenter de retisser des liens dégradés, Sébastien Lecornu invite les présidents de groupe du Sénat à Matignon ce mercredi, avant de se rendre en conférence des présidents. "Il y a quelque chose qui ne va pas". L’histoire pourrait être anecdotique. Mais elle illustre comment les relations se sont dégradées entre la majorité sénatoriale de droite et du centre et le gouvernement, avec l’arrivée de Sébastien Lecornu à Matignon. Tout a en effet dérapé depuis le gouvernement Lecornu II et le départ tonitruant des LR de l’équipe gouvernementale ».
Nous n’irons pas plus loin dans le détail des récriminations ; la réaction de Lecornu ne s’est pas fait attendre : le 5 novembre, il se rendait (avec un jour de retard) à la conférence des présidents du Sénat. Un article de la presse française (Actu.fr du 6 novembre, avec l’AFP) résumait l’ambiance[1] : « Le Sénat incité à voter le budget, "sinon"… […] "Je ne veux pas de 49.3, je ne veux pas d’ordonnances". Il a confirmé qu’il ne voulait pas non plus de la loi spéciale… ».
« Le chef du gouvernement y a longuement pris la parole, selon plusieurs participants, pour défendre sa vision et appeler le Sénat à la "responsabilité" en vue des débats budgétaires, selon l’un d’eux, évoquant la "gravité" avec laquelle Sébastien Lecornu s’est exprimé. "S’il y a censure sur le budget alors il y aura démission et donc dissolution", aurait menacé Sébastien Lecornu. "Je ne serai pas le Premier ministre qui fera une passation de pouvoir avec Jordan Bardella" […] "Il n’y a pas de deal avec le Parti socialiste" ».
Lecornu évoque peut-être une possible « censure » (qui n’existe évidemment pas, juridiquement, dans la Constitution) du Sénat ; mais le mot est fort et vise peut-être à tenter de revaloriser la Chambre Haute du Parlement. D’où le titre et le sous-titre peut-être surprenants de ce billet.
Lecornu était ainsi maintenant pris entre deux feux ; la censure, la vraie, de gauche, du PS à l’Assemblée nationale ; la « censure » de droite au Sénat ! Le suspense devenait de plus en plus torride…
Mais la vie continuait son petit bonhomme de chemin. Le mercredi 5 novembre, l’Assemblée nationale avait voté contre la taxe exceptionnelle sur les mutuelles de santé ; LCP (La Chaîne parlementaire) nous narrait cet épisode le 6. (En bas à gauche, en cliquant, à la fin du résumé du jour, sur Le fil info Assemblée, on pouvait en voir plus sur le passé).
Le 6 novembre, le buzz concernait surtout la présence de jeunes filles (sans doute musulmanes) non pas en fleurs mais voilées, dans le public de l’Assemblée nationale : haros de l’extrême-droite et de Braun-Pivet ; défense de LFI et des Écolos (la loi ne l’interdirait pas ; pas encore ; à vérifier).
L’Assemblée continuait ses examens les 7 et 8 novembre, et jusqu’au dimanche soir avant un break de 2 journées pour le 11 novembre ; voir quelques détails.
Mais allons au principal : qu’allait faire le groupe (encore macroniste ?) de Gabriel Attal à l’Assemblée nationale concernant la suspension de la réforme des retraites ? Le quotidien Le Monde en avait une petite idée le 6 novembre : l’abstention.
« Les députés Renaissance sont tiraillés entre les partisans du compromis, ceux qui hésitent, et ceux qui refusent de détricoter leur bilan. Le jour du vote, le 12 novembre, le président de leur groupe, Gabriel Attal, compte présenter un projet de réforme alternatif, pour aller de l’avant. […] L’épineux moment approche. Alors que l’Assemblée nationale a commencé l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), les députés devraient être appelés à se prononcer sur la suspension de la réforme des retraites mercredi 12 novembre – sous réserve que la partie du texte sur les recettes soit adoptée en amont. Même si leurs voix ne devraient pas être décisives, les macronistes redoutent ce vote à forte portée symbolique ».
Dernières nouvelles ; selon LCP.fr, la partie « recettes » du PLFSS pour 2026 a été adopté, de justesse, samedi soir 8 novembre, partie largement modifiée vers la gauche par rapport à la version présentée par le gouvernement.
Scrutin serré : 176 voix pour, 161voix contre (52 - 48 % des suffrages exprimés). Les groupes Socialistes et LIOT, ainsi que l’ex-majorité présidentielle (Ensemble pour la République, Les Démocrates, Horizons) ont voté pour ; les groupes Rassemblement national, La France insoumise et Union des droites pour la République ont voté contre. Et, à noter, 15 % d’abstentions (surtout la Droite républicaine, mais aussi la plus grande part du groupe Écologiste et social et le groupe Gauche démocrate et républicaine). C’est donc le nouveau modèle de l’Assemblée : plus de gauche-droite, mais surtout trois blocs maintenant éclatés.
Ce qui permet cependant d’examiner la partie « dépenses » dont la suspension de la réforme des retraites.
On arrête là pour aujourd’hui et pour la semaine.
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Aparté.
Je reviens (mais, bien sûr, c’est encore hors sujet) sur l’histoire de ces jeunes filles voilées. On a peut-être enfin le fin mot de l’histoire de l’inacceptable et honteuse polémique lancée par l’extrême-droite le 5 novembre (mais malheureusement reprise par la présidente de l’Assemblée nationale...) contre la présence de jeunes filles voilées dans les tribunes du public de cette assemblée, grâce à un post sur X d’un ex-ministre et président actuel du groupe les Démocrates de l’Assemblée, Marc Fesneau (le 6 novembre).
Elles étaient en fait invitées ; et donc pas par n’importe qui ! Par Marc Fesneau lui-même, et qui plus est organisée par son équipe parlementaire, (« comme c’est l’usage pour toutes ces visites pédagogiques et donc, de facto, placée sous ma responsabilité », écrit le ministre) à la demande de deux établissements scolaires privés, dans le cadre d’un projet de l’un des établissements « Démocratie et citoyenneté ». Malheureusement, il ajoute aussi : « Je comprends que la présence en tribune d’élèves portant un voile puisse choquer. Je n’ai jamais transigé avec les règles communes qui sont celles de la République et cette situation ne me semble pas acceptable. À cet égard, nous devons effectivement faire preuve de davantage de vigilance et à l’application effective par notre assemblée de l’article 8 de l’instruction générale du Bureau sur la tenue du public » ; il ajoute cependant (comprenne qui pourra) : « La loi n’interdit pas le port du voile par des mineures dans l’espace public. Ces élèves qui ont été accueillis par mes équipes puis par celles de l’assemblée ont effectué leur visite sans difficulté et ont pu aborder tous les sujets y compris ceux ayant trait à la laïcité. Ces polémiques sont inutiles et viennent surtout jeter des enfants à la vindicte populaire ».
Enfin (comprenne encore qui pourra) il estime que les règles du droit commun ont été respectées et que ces visites sont une contribution utile pour que chaque enfant puisse s’approprier les valeurs de la République.
En outre, de fait il n’y eut rien d’illégal, semble-t-il (publié le 7 novembre).
Comme disait Jean Seberg à Jean-Paul Belmondo filmé par Godard : « Qu’est-ce que c’est, dégueulasse ? ». Dans ce monde de brutes, quelques vers de mirliton en prose (penser à Chine et à Shein, le grand chinois qui fait débat, elle-She in : Jeunes filles voilées à l’assemblée ? Poupées pompeuses et caresseuses ? Il faut choisir mais sans plaisir !
Fin de cet aparté ; et en avant pour la deuxième Saison !
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Saison 2 – Semaine du 9 au 15 novembre
Le lundi 10 novembre, LCP indiquait, dans son article Retraites : à 2 jours des débats sur la suspension, Gabriel Attal prône une "véritable révolution", que le groupe EPR de Gabriel Attal s’abstiendrait probablement en majorité lors du vote de la suspension de la réforme des retraites et allait déposer une proposition de loi visant à bâtir un nouveau système des retraites « universel, clair et compréhensible »[2]. Celui-ci intégrerait une part de capitalisation et avec ce qu’il faut bien qualifier de gadget : « Chaque enfant recevrait [à sa naissance] 1 000 euros versés par l’État, placés sur un compte de capitalisation ».
L’article laissait cependant planer le suspense sur le vote de mercredi 12 : « Il n’empêche : mercredi, les députés EPR devront se prononcer sur la suspension de la réforme des retraites. "La messe est dite. (...) La suspension sera votée quel que soit notre vote", a répété Gabriel Attal ce lundi, estimant que l’addition des voix de gauche et du Rassemblement national suffiront à faire adopter la mesure. Sauf que La France insoumise a annoncé qu’elle se prononcera contre cette suspension de la réforme des retraites et que les élus écologistes et communistes pourraient, eux, s’abstenir ».
Le lundi 10 novembre au soir, la porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, annonçait que le gouvernement allait déposer un amendement pour débattre de l’inclusion des carrières longues dans l’éventuelle suspension de la réforme des retraites.
« À ce stade, la mesure ne concerne que les retraités de droit commun, mais écologistes et communistes réclamaient l’inclusion des carrières longues via un amendement gouvernemental ».
Après cette réjouissance de la gauche, passons de l’autre côté. Le RN allait voter la suspension (en fait, selon Sébastien Chenu dans son long entretien à BFMTV le 11 novembre, son décalage) de la réforme des retraites.
Il en dit bien d’autres ; et Chenu de rappeler aussi l’histoire récente de la fameuse lettre secrète de Le Maire à Macron l’alertant en 2024 du dérapage budgétaire (mais c’est hors sujet ici, et il s’agit d’un secret de Polichinelle : Éric Coquerel Face à Face à Apolline de Malherbe, l’indiquait le 11 novembre).
Le Huffington Post apportait ce 12 novembre quelques précisions sur les difficultés d’Attal.
« Certes, le deal entre le gouvernement et le Parti socialiste paraît entendu. Et certes, Élisabeth Borne en personne a planté le premier clou sur le cercueil de la réforme qu’elle a portée face à la mitraille. Il n’empêche : ce mercredi 12 novembre est un drôle de jour pour les députés macronistes, qui vont devoir avaliser la suspension de la réforme des retraites ».
Le suspense restait donc entier : « Du côté de l’aile droite du parti, certains sont catégoriques : hors de question de revenir sur le seul acquis de l’ère Macron. "Je voterai contre la suspension de la réforme des retraites, quel que soit le rapport de force politique. Parce que je pense que c’est une erreur" », a prévenu le macroniste de la première heure Marc Ferracci dans une interview accordée à L’Opinion. Une position partagée par Éric Woerth. D’autres, particulièrement sur l’aile gauche, plaident au contraire pour le vote en faveur de la suspension, histoire de montrer au PS que le bloc central est capable de tendre la main. Afin de ménager les troupes, et de trouver une formule qui convienne au plus grand nombre, Gabriel Attal prône l’abstention. "Certains souhaitent voter contre la suspension tout en soutenant le PLFSS. D’autres pensent qu’il faut s’abstenir pour marquer le compromis. Le Premier ministre a semblé favorable à une abstention, qui permettrait de défendre notre projet sans bloquer le compromis" », a déclaré ce lundi 10 novembre l’ex-Premier ministre devant la presse. C’est donc cette position médiane qui devrait dominer, avec tous les risques qu’elle comporte. Car si le PS et le RN ont prévu de voter pour cette suspension, la France insoumise (qui réduit la concession à un simple "décalage" de la réforme) ne veut pas en entendre parler, tandis que les communistes et les écolos prévoient de s’abstenir. Du côté de la droite, Horizons et Les Républicains devraient voter contre. Il n’est donc pas certains que cette concession aux socialistes passe si facilement. À moins que l’ultime geste consenti par le gouvernement, qui ajoute un amendement visant à inclure les carrières longes dans la suspension, réussisse à engranger suffisamment de votes à gauche pour éviter le crash ».
Le suspense était encore là...
La suspension de la réforme des retraites avait enfin été votée le mercredi 12 novembre à l’Assemblée nationale ; plein de détail dans l’article suivant. On peut se contenter de notre résumé.
255 voix pour, 146 contre et 104 abstentions, mais aussi 72 qui n’ont pas pris part au vote. Large majorité absolue certes ; mais... On peut traduire ce vote par les deux camemberts qui suivent dont celui de gauche n’est bien sûr par très orthodoxe (577 députés, 505 ayant pris part au vote seulement, 411 suffrages exprimés).
Agrandissement : Illustration 1
Le détail par groupe est lui aussi parlant (on laisse le lecteur calculer les ratios...) : Rassemblement national : 112 pour ; Ensemble pour la République (le parti d’Attal) : 3 pour, 5 contre, 67 abstentions ; La France insoumise : 60 contre ; Parti socialiste : 67 pour ; Droite Républicaine : 8 pour, 25 contre, 9 abstentions ; Écologiste et Social : 30 pour, 4 abstentions ; Modem : 11 pour, 1 contre, 18 abstentions ; Horizons : 29 contre, 1 abstention ; LIOT : 17 pour, 3 abstentions ; Gauche Démocrate et Républicaine : 1 pour, 11 contre ; Union des Droites pour la République : 14 contre ; Non-inscrits : 6 pour, 1 contre, 2 abstentions.
Résumons les principales informations : inventaire à la Prévert.
« Entamé la semaine dernière, l’examen du budget de la Sécu en première lecture à l’Assemblée nationale doit s’achever mercredi soir à minuit, alors que plusieurs centaines d’amendements restent encore à étudier. Le texte ira ensuite au Sénat ». « Olivier Faure s’est dit "heureux pour celles et ceux qui vont [en] bénéficier ", affirmant que ce "totem de la macronie" avait désormais "plus que du plomb dans l’aile" ». « … la CFDT a salué une "excellente nouvelle" et s’est félicitée "du premier coup d’arrêt donné" à la réforme des retraites, après sa "suspension" votée largement par les députés mercredi soir, tandis que la CGT continue de réclamer son abrogation ». « … l’article qui prévoit le gel des pensions de retraites et des minimas sociaux − c’est à dire leur non indexation sur l’inflation l’année prochaine − a été supprimé ». « Comme s’il dévoilait un bout de programme de candidat à la présidentielle. Après l’adoption de la suspension de la réforme des retraites, l’ancien Premier ministre Gabriel Attal (EPR) assume vouloir "changer le système". Il appelle à un système de retraite universelle… ». « Bruno Retailleau est fâché. […] … l’ancien ministre de l’Intérieur a vu rouge sur X, dénonçant une "capitulation" et une "décision irresponsable, prise sous le diktat du PS avec la complicité du RN", qui "va coûter des milliards à la France". "Je suis effaré par la lâcheté du gouvernement qui vient de sacrifier l’avenir de nos jeunes générations sur l’autel de sa survie politique", s’est ému celui qui en faisait encore partie il y a quelques mois ». « Ils ont voté [LFI] contre la suspension de la réforme des retraites, qu’ils considèrent plutôt comme un "décalage", pour ne pas "entériner" le texte. […] … le président de la commission des finances de l’Assemblée, Éric Coquerel, fustige quant à lui une "arnaque" du gouvernement ». « Pour le chef des députés PS Boris Vallaud, "c’est une excellente nouvelle". Après l’adoption de la suspension de la réforme des retraites, les cadres du Parti socialiste ont salué une "victoire importante". Le chef des roses, Olivier Faure, a par ailleurs affirmé qu’il attendait désormais l’élection présidentielle de 2027 pour définir la direction à donner au système des retraites. "C’est à ce moment-là que les Français auront la parole", a-t-il assuré, n’écartant pas l’option d’un retour à la réforme Touraine ».
On arrête là ce florilège. Ouf !
Le projet de censure du PS me semble mal partie…
Pour les amateurs d’images de ténors de la politique, on offre, pour terminer cette séquence.
Pour terminer cette Saison 2, voir et entendre d’abord l’édito de Patrick Cohen sur France Inter le 14 novembre, plein d’humour anti-socialiste ; et surtout plein de défense de la réforme des retraites.
Et pas un mot sur ce qui allait sans doute se passer au Sénat.
Ensuite et surtout, le samedi 15 novembre, le Sénat proposait, évidemment (en Commission) de rétablir la réforme des retraites (par exemple, Le Télégramme avec l’AFP, mais le quotidien Le Monde, toujours avec l’AFP, racontait la même chose). Ce n’était pas une surprise !
Mais pas que : « Réforme des retraites rétablie, prestations gelées en 2026… Les sénateurs de la commission des Affaires sociales ont proposé samedi de revenir sur de nombreuses mesures votées à l’Assemblée nationale sur le budget de la Sécu… ». « La gauche a vivement dénoncé cette décision. "La majorité sénatoriale se met dans une posture de refus de tout accord et de tout compromis" », a regretté Bernard Jomier (groupe socialiste), s’inquiétant d’un "raidissement très net" de la droite et des centristes. "Quand on détruit dans une chambre tout ce qui a été fait dans l’autre chambre du Parlement, ce n’est pas une démarche de construction", s’est insurgée l’écologiste Anne Souyris ».
Le reste, dont l’avenir du texte, est connu (voir plus haut).
Le HuffPost racontait les choses le même jour, un peu autrement, en insistant sur les divisions de la gauche (comme à l’Assemblée nationale d'ailleurs).
« Un plat de lentilles », dénonçait le PCF dont le vote paraissait incertain. « Le président du groupe socialiste Patrick Kanner estime que ce sera "l’épreuve de vérité" pour les sénateurs de gauche. Il dit ne pas comprendre comment la gauche pourrait "s’abstenir ou voter contre une mesure majeure que nous avons toujours demandée, et que nous avons sollicitée dès le départ de François Bayrou". "Il ne s’agit pas d’une suspension de la réforme mais d’un décalage de trois mois pour une classe d’âge. Je ne me fais pas acheter pour un plat de lentilles. De notre côté, nous continuerons de demander l’abrogation de la réforme des retraites", lui a répondu la patronne des communistes Céline Cukierman sur Public Sénat ».
« D’autres dispositions, comme le gel des pensions de retraite qui avait été supprimé par les députés, ont également été rétablies en commission des Affaires sociales au Sénat. Sur ce sujet, les sénateurs ont choisi, à ce stade, de ne pas toucher aux pensions inférieures à 1 400 euros. Les débats dans l’hémicycle commenceront le 19 novembre. Sur ce texte comme sur les autres, si le processus législatif suit son cours normal, l’Assemblée nationale aura toutefois le dernier mot ».
Cependant, l’article omet l’importance de la CMP (voir plus haut).
Saison 3 – Semaine du 16 au 23 novembre
Plus politique, toujours selon Le Télégramme et l’AFP, le 16, la social-démocratie est en train de s’unir pour 2027, avec en photo Glucksmann au centre et Hollande à sa droite que le titre de l’article omet de nommer. Et olivier Faure et les autres n’étaient pas là…
« La gauche sociale-démocrate s’est retrouvée ce dimanche à Pontoise dans l’optique de la présidentielle de 2027. Bernard Cazeneuve et Raphaël Glucksmann refusent l’idée d’une primaire à gauche. […] Un évènement qui se voulait être en opposition à ce que souhaite la gauche "unitaire"… ».
« Mais la présence de Raphaël Glucksmann aux côtés de Bernard Cazeneuve et François Hollande "ça dit quelque chose de sa ligne. Il n’a pas choisi le cœur de la gauche", a critiqué la députée ex-insoumise, Clémentine Autain, qui fait partie des "unitaires". Olivier Faure, le patron des socialistes concède, sous forme de critique déguisée, que M. Glucksmann a "le droit de vouloir incarner ce qu’il veut, si ça lui convient le mieux" ». Il est vrai que cette nouvelle union est plutôt celle de la droite de la gauche.
Pourtant, tôt le matin sur France Inter, dans Histoires politiques, Yaël Goosz mettait l’accent sur la rareté de la présence médiatique de Glucksmann, tout en notant la réunion de Pontoise du dimanche… On peut l’écouter.
Le Front populaire était déjà bien mal barré…
Mal barré aussi le vote du budget ; c’était du moins l’analyse, le 17 tôt le matin, de l’édito d’Alba Ventura sur TFI. (Les autres vidéos sui suivent sont plus anciennes).
Les députés ont pris leur week-end (« … si ça continue, ils vont prendre leur RTT », ironise l’éditorialiste !). Même la réforme des retraites n’est pas acquise.
Le budget sera-t-il adopté par Ordonnances ou par la Loi spéciale (reconduction du budget 2025) ; c’est ce dont rêvent à la fois le RN et LFI, car serait une baffe au PS.
Est indiqué par ailleurs : « Face à l'impasse qui se profile, l’hypothèse d’une loi spéciale ou d’un budget par ordonnance est dans toutes les têtes, même si le gouvernement continue d’assurer que ce n’est pas son plan. "Aucune ordonnance n’est en cours d’écriture à Bercy", promet la ministre des Comptes publics Amélie de Montchalin, quand la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon décrit les ordonnances comme une "forme de super 49.3" ».
Roland Lescure (ministre de l’Économie, des Finances, etc.) était reçu sur TFI un peu plus tard.
Après des points un peu hors sujet (voir par exemple le titre ci-dessus) il en venait au fond : 5 % de déficit budgétaire, c’est trop ; et pas de vote par ordonnance (pour le moment).
Le quotidien Le Monde donnait aussi son point de vue le 17 novembre.
« Alors que plus de 1 500 amendements restent à examiner, les élus ont jusqu’à dimanche 23 novembre pour voter le texte ».
Concernant le Sénat, la machine à Niet était déjà en marche (voir plus haut) ; l’article suivant de l’Échiquier social du 16 novembre continuait l’analyse.
https://www.lechiquiersocial.com/plfss-2026-le-budget-de-la-secu-examine-en-seance-au-senat/
« … la majorité sénatoriale entend bien "décaper" un budget qualifié par elle de "cryptosocialiste". […] Le texte qui va être examiné en séance publique à partir de ce mercredi, a fait l’objet samedi, d’une première discussion en commission des Affaires sociales, au cours de laquelle la majorité sénatoriale a lancé une révision en profondeur du projet de loi, qualifiée de "nettoyage" par ses membres ». Les mots sont forts, le rabotage du budget "cryptosocialiste" le sera aussi.
Profitons du même média pour voir (article du 17, avec quelques coquilles, ici corrigées…) ce qui allait se passer à l’Assemblée nationale.
« Une nouvelle semaine de débats budgétaires s’ouvre à l’Assemblée nationale, ce lundi. Les députés poursuivent l’examen de la partie "recettes" du projet de loi de finances, sans même être sûrs de pouvoir la boucler. [Je souligne : la partie "recettes", bien sûr…, PC] Or, l’ensemble du texte incluant la partie "dépenses", doit être transmis au Sénat le 23 novembre à minuit, selon les délais constitutionnels ».
« La décision du gouvernement de ne pas faire siéger les députés le week-end dernier a relancé le débat. En invoquant "la fatigue des députés", le ministre des relations avec le Parlement, Laurent Panifous, a rav[ivé] les accusations des oppositions de gauche, qui soupçonnent le gouvernement de jouer la montre, pour à la fin imposer sa version du budget, par son adoption in fine par ordonnances ».
La vidéo (donnée par l’article) de Manuel Bompard (LFI) s’en insurgeant est intéressante ; de même que celle de la ministre Amélie de Montchalin qui affirmait encore qu’aucune ordonnance n’était en cours d’écriture à Bercy. Pour le moment, peut-on ajouter : ça ne doit pas être si long que cela à écrire ; on verra bien…
Enfin, last (peut-être) but not least pour cette journée (et cerise sur la gâteau) la presse du 17 novembre aura réjoui les patrons (ici La Tribune) avec cette sortie du Premier ministre : « On fait peur actuellement à une partie du pays avec des taxes qui n’auront jamais d’application [le gras est de l’article, PC] parce qu’elles ne sont pas constitutionnelles, parce qu’elles n’ont pas d’assiette ».
Cette bonne nouvelle pour les patrons (au sommet Choose France) a été reprise en boucle par la presse, par exemple Sud Ouest qui la précise.
Le Premier ministre était bien sûr assis entre deux chaises (ce n'est pas dans l’article...) : « L’absence de budget à la fin de l’année est le véritable "péril", a déclaré lundi Sébastien Lecornu devant des entrepreneurs… […] c’est l’absence de budget […] "J’ai besoin, […] les ministres ont besoin, d’avoir des acteurs du monde économique qui parlent clairement. Qui rassurent leur base sur des problèmes qui n’existent pas" […] Il a notamment évoqué "ceux qui ont soi-disant gagné 26 milliards d’euros sur une taxe qui n’existe pas", en référence à une taxe sur les multinationales censée rapporter ce montant, adoptée fin octobre à l’initiative de LFI. Le Premier ministre, qui s’exprimait face à des représentants du patronat, d’entreprises comme Airbus ou de fédérations professionnelles, a aussi déclaré qu’il saisirait le Conseil d’État sur plusieurs mesures ».
Lecornu était donc plutôt assis sur la chaise droite…
L’article continuait : « Alexandre Saubot, président de France Industrie, a évoqué la "gravité" de la situation des industries, et s’est inquiété de projets fiscaux "délirants". Mais il "faut arrêter de faire comme si tout ce qui était voté était réellement voté", a pointé Lecornu, alors que le parcours législatif du budget est loin d’être terminé. "Ce qui malheureusement peut avant tout se produire […] c’est le fait qu’il n’y ait pas du tout de budget, avec tout ce que ça peut vouloir dire sur la part d’incertitude politique, économique, financière", a-t-il alerté ».
Lecornu a donc ménagé la chèvre et le chou, avec une préférence pour la première, mais en expliquant clairement aux patrons de ne pas en rajouter.
Depuis, ça n’avançait guère. Bref, mon sentiment était que si la partie « recettes » du budget de l’État sera bien votée (mais avec une écrasante majorité contre ! Ce fut le cas 1 pour ...) le Sénat reprendra donc le budget initial et votera contre la suspension de la réforme des retraites et les avancées sur le PLFSS. Autrement dit on filerait vers la loi spéciale (reconduction du budget 2025) et, donc l’abandon de la fameuse suspension... Et, enfin, la motion de censure.
On va conclure ici avec le quotidien Le Monde (avec l’AFP) du 21 novembre au soir modifié le lendemain, Budget 2026 : ce qu’il faut savoir après le rejet du texte à l’Assemblée nationale. Cet article n’évoque ni l’abandon de la suspension de la réforme des retraites ni la motion de censure.
« Après des semaines de débats parfois houleux sur la fiscalité du patrimoine, ou sur celle des grandes entreprises, 404 députés ont rejeté la partie concernant les recettes du texte (un député a voté pour, 84 se sont abstenus), emportant ainsi l’ensemble du projet de loi, sans même étudier la partie sur les dépenses.[Je souligne, PC] Les groupes de gauche et le Rassemblement national (RN) ont voté contre, ceux du camp gouvernemental se sont divisés entre votes contre et abstentions. Harold Huwart, le député Libertés, indépendants, outre-mer et territoires (LIOT) d’Eure-et-Loir, a été le seul à voter pour le texte. "Je veux un budget pour la France. Je ne comprends pas par quelle logique vous arrivez à trouver une majorité sur chaque article et une unanimité contre le texte. (…) C’est inouï, inédit. Heureusement que le ridicule ne tue pas, on aurait 577 morts à déplorer", avait expliqué l’élu centriste avant le vote. L’Assemblée avait déjà rejeté en 2024 le budget de l’État, de manière inédite sous la Ve République. Mais c’est une première qu’il le soit avec une telle ampleur ».
« Le budget risque de ne pas pouvoir être soumis à un vote définitif avant Noël, en raison d’un calendrier surchargé et de désaccords persistants. Le Sénat a notamment acté, jeudi 20 novembre, qu’il ne pourrait pas procéder au vote solennel sur ce budget avant lundi 15 décembre. […] Le gouvernement aura alors deux options : déposer une loi spéciale (avant vendredi 19 décembre) pour prolonger le budget actuel de l’État sur les premiers mois de l’année 2026 afin de laisser le temps aux parlementaires d’aller au bout de l’examen, ou adopter le budget par ordonnances. Sébastien Lecornu s’est plusieurs fois prononcé contre cette seconde option. L’hypothèse d’une "loi spéciale" est la "plus probable", a estimé samedi le président "insoumis" de la commission des finances de l’Assemblée, Éric Coquerel. Une telle procédure signifie que le Parlement se relancerait en début d’année dans un nouveau débat budgétaire. Quant au budget de la Sécurité sociale, actuellement examiné au Sénat, il devrait faire l’objet, à la fin de novembre, d’une CMP que personne n’envisage conclusive. Les députés devraient alors procéder à une deuxième lecture, avec le risque de ne pas y parvenir dans les délais constitutionnels fixés à vendredi 12 décembre à minuit ».
« Le PS continuera toutefois à "chercher le compromis" ».
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À suivre, encore… Non ! Comme pour le billet concernant la Kanaky Nouvelle-Calédonie et l’accord de Bougival, j’arrête là ce billet. Je me lasse de suivre au jour le jour, sinon heure par heure l’actualité du vote du budget 2026 : exténuant pour un petit journaliste amateur.
J’attends un scoop ou la fin de l’histoire (motion de censure ou pas) pour le reprendre.
Notes
[1] Un article sur le même sujet était d’ailleurs publié en Nouvelle-Calédonie : si ça dérapait au Parlement, l’accord de Bougival serait fin mal barré comme on dit là-bas. Voir notre billet-feuilleton parallèle sur l’Accord de Bougival. On redonne ici cet article de LNC du 7 novembre2025.
Quelques mots sur l’histoire des Nouvelles calédoniennes. Ce fut d’abord un quotidien papier apparu en juin 1971, le seul quotidien d'informations générales du pays, du lundi au samedi. Le Groupe Hersant devenait propriétaire du titre en 1987 et devenait, en 2006, GHM (Groupe Hersant Média ) ; le groupe Melchior local (holding regroupant les grandes familles locales Jeandot, Montagnat et Lavoix) l’avait racheté en 2013 à GHM, sans jamais réussir à trouver l’équilibre financier ; il fut liquidé en mars 2023.
Je l’ai bien connu, du temps de GHM et Melchior, étant, avec d’autres, l’expert économique et social de son Comité d’entreprise.
LNC, sous la dénomination LNC.nc est réapparu en version numérique gratuite quelques mois plus tard, en octobre ; il appartient maintenant au Groupe Holdennha/Groupe Dang, d’André Dang. André Dang Van Nha est le fils d’un pauvre mineur, un Chân Dăng (« engagés sous contrat » vietnamiens) qui meurt d’un accident du travail alors qu’il n’a qu’un an ; il deviendra plus tard riche homme d’affaires et se liera d’amitié avec Jean-Marie Tjibaou et fut et est encore compagnon de route des indépendantises du Caillou. Il a ainsi participé en premier plan au développement de secteur minier et métallurgique de la Province Nord, mais s’est effacé depuis quelques années (il a maintenant 89 ans !)
La ligne éditoriale de LNC.nc est cependant « totalement neutre » (selon un communiqué de sa direction ; et ce n’est, selon moi, pas faux) contrairement à celle d’un concurrent lancé en version numérique par abonnement et papier (payante) lancé en juin 2023, La voix du Caillou qui revendique une ligne éditoriale anti-indépendantiste et fort libérale en économie.
[2] Ce n’est pas nouveau dans la bouche d’Attal : voir la myriade d’anciens articles sur ce sujet ; voir aussi l’autre myriade d’articles de ce jour.