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Patrick Castex

Économiste, sociologue et HEC à la retraite (maître de conférence à l’Université Dauphine et membre du Cabinet Syndex, expert-comptable spécialisé dans le conseil aux Comités d'entreprise et aux syndicats de salariés), il s’occupe, depuis une dizaine d’années, de promouvoir l’Indépendance de la Kanaky Nouvelle-Calédonie. Il s’est mis en outre à écrire autre chose que de savants traités...

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Billet de blog 9 juin 2025

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"L’évangile" selon "l’ange" Philippe Gomès : la très "bonne nouvelle" du 8 juin

La presse locale n’insiste pas, pourtant le double message de Gomès est clair : Macron et Valls "tirent tous les deux la charrue calédonienne dans le même sens" ; et la proposition de Valls présente des "avantages majeurs". Le mot "indépendance-association", il ne le prononce pas ; et ce ne serait qu’un "État associé" (qui s’appellerait comment ?). Mais quelle avancée ! Comment va réagir Backès ?

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Je change mon fusil d’épaule : contrairement à ce que j’annonçais dans le billet précédent, il faut en publier un nouveau pour annoncer cette bonne nouvelle. Rappelons que les deux mots évangile et ange présentent la même étymologie : message, news comme on dit maintenant. Je ne crois pas aux Évangiles concernant Jésus (mais je peux me tromper) ; et je reste prudent concernant Gomès qui juste avant la Pentecôte (du grec pentêkostê qui signifie cinquantième) bénéficia peut-être aussi de la descente du Saint-Esprit sur les apôtres cinquante jours après la résurrection de Jésus-Christ.

Dans l’article[1] qui donne cependant à revoir et réentendre l’interview de Gomès déjà indiqué dans le billet précédent, tout n’est pas écrit ; et ce n’est sans doute pas un hasard.

Par exemple, à la question de la journaliste posée à  l’encore patron de Calédonie ensemble qui rappelle que l’Élysée appelle à une réunion « pour clarifier politiquement, économiquement et socialement les sujets calédoniens, les loyalistes l’ont interprétée déjà comme un recadrage de Manuel Valls et le qualifie d’homme isolé politiquement ; est-ce votre avis ? », Gomès répond, avec un petit sourire et sentant probablement le piège, « Non pas du tout ; dire clarifier, ça veut pas dire recadrer… la langue française, elle a plus de 60 000 mots, si le terme recadrage avait dû être utilisé, il aurait été utilisé… ».

Ce morceau à l’oral n’est traduit à l’écrit que par la conclusion de Gomès et avec une malicieuse question à l’interviewé et une remarque discrète que je souligne, PC : « Une recherche d’accord avec le ministre des Outre-mers à la barre ? Malgré la prise de parole du président Emmanuel Macron, Philippe Gomes n’en doute pas. "Il est normal que le président de la République se préoccupe du dossier, analyse le fondateur de Calédonie ensemble. Le seul qui peut convoquer le Parlement au Congrès à Versailles pour modifier la Constitution et pour intégrer l’accord, c’est le président de la République. Mais je sais [je souligne, PC] que (lui et Manuel Valls) vont tirer tous les deux la charrue calédonienne dans le même sens" ».

Pas un mot non plus à l’écrit, en fin d’interview, contrairement à la vidéo à ce qui suit. À la question (Facebook) reprise par la journaliste : « Envisagez-vous une coalition Calédonie ensemble, indépendantistes et Éveil océanien pour les provinciales ? », Gomès se contente de rappeler le « refus de la radicalité, sinon on creuse la tombe du pays » : il ne répond en fait, en substance, que « peut-être… ». La journaliste repart ainsi à la charge : « Vos positions, notamment sur le projet Valls, notamment sur la souveraineté partagée, sont quand même assez proche entre vous, l’Éveil océanien et l’UNI ». Là, Gomès, avec cependant une légère hésitation au début de ses propos (il faut l’écouter, car la réponse est un peu longue) déclare trouver le projet Valls équilibré avec un « avantage majeur » : il répond à la volonté de souveraineté des indépendantistes, cependant (il ne le dit pas comme ça) avec la France, mais répond également à la demande des non-indépendantistes qui souhaitent la protection de la France ; le tout  développé en trois volets : 1/ (compétences régaliennes cédées puis « instantanément » rétrocédées à la République ; 2/ la loi fondamentale sera intégrée dans la constitution de la République française ; 3/ la nationalité françaises reste de droit.

Tout cela n’existant nulle part, par exemple pas dans les États associés avec les USA ; et Gomès complète en mettant en avant, d’une part que le FLNKS est toujours d’accord pour poursuivre ces discussions (à confirmer, cependant) d’autre part que Valls était prêt (« dans sa dernière lettre ») à discuter de la mise en œuvre et des délais de sa proposition.

Je n’ose imaginer les noms d’oiseaux qui vont fuser de Sonia Backes qui fait actuellement, avec Virginie Ruffenach, la tournée à Paris de la droite et de l’extrême droite. Rappelons que Backès, comme tous les loyalistes radicaux,  est convaincue que Macron ne soutient pas Valls et passe le message en boucle depuis un mois.

Bonne nouvelle, donc, de la part de Gomès, mais prudence. Attendons encore Godot où Macron remplace maintenant Valls.

Rêvons que ce qu’affirme aujourd’hui Gomès devienne réalité. Il se serait grandi à prendre depuis longtemps l’initiative, lui qui centriste aux actions économiques progressistes, mais restant toujours loyaliste et l’assumant, clama sans répit que proposer l’indépendance-association « serait un suicide politique » mais  « parla » avec le vieux Paul Néaoutyine du Palika (qui, lui, passa d’une indépendance très dure à cette proposition de solution) en lui faisant croire que lui, Gomès la prendrait peut-être (ce que certains murmurent ) avant que Néaoutyine comprenne qu’il le baladait ! Gomès, pourtant taxé depuis belle lurette de « socialiste et d’indépendantiste » par les loyalistes radicaux (ce qui lui coûta sa large défaite électorale en 2019) ne prit jamais cette initiative, malgré quelques recommandations de rares connaisseurs proches du camp indépendantiste qui avaient pourtant un certain poids politique (et ma pomme qui n’en n’avait aucun !) : il s’est contenté, lui et son parti Calédonie ensemble (cependant avec combien d’hésitations ; voir nos billets précédents) de suivre le sens du vent donné par Valls. Malin comme un singe, Gomès, souvent nommé le Líder máximo, vient sans doute de prendre peu de risque en suivant Valls, car pensant, bien ou mal informé, que Macron le suivra. Voilà encore une autre bonne nouvelle.

Il ne manquerait plus que notre Président fasse un discours intitulé « Je vous ai compris ! », avec, cerise sur le gâteau, discours accompagné d’un bras d’honneur à Backès et Metzdorf, et ce serait le paradis... Mais l’apocalypse (dans son acception vulgaire) pour certains... 

Enfin, Valls, le roi des traitres pour beaucoup de sa gauche irréconciliable, va peut-être se refaire une santé chez les islamo-gauchistes et ceux qui parlent volontiers d’islamophobie plutôt que de critique de l’islamisme. Mais, ça, ne nest pas sûr...

...

Dernier ajout par Macron, le mardi 10 juin : mais on n’est pas beaucoup plus avancé…

Voir, sur le Portail des Outre-mer avec l’AFP, l’article[2] ouvert par une photo de notre Président avec un petit air indéfinissable.

Au sommet de Nice entre la France et les pays du Pacifique, en marge de la Conférence de l’ONU sur les océans, le président de la République a déclaré que « ni la culture océanienne ou mélanésienne ne sont totalement faites pour les référendums [car ] ce sont des cultures de concertation ». Ce n’est pas méprisant pour ces cultures  (il n’a pas dit cultures de palabres) mais pas très gentil pour Rocard, Jospin et les Présidents du moment qui n’avaient donc rien compris. Il faut ainsi un « projet nouveau » pour ne pas refaire les « erreurs » liées aux référendums, pas « adaptés », à ses yeux, aux cultures locales.

En creux, les Caldoches et Zoreils seraient-ils en dehors de ces cultures locales ? Et rappelant toutefois à ces derniers, note l’article, que « trois référendums "prévus par les processus que nous avions pensé dans les années 80 et 90" avaient "permis une expression de maintien dans la République française" du territoire ultramarin ». Pas un mot, évidemment, sur le caractère au moins très particulier du troisième. L’article continue : « "Nous tiendrons dans les prochaines semaines un sommet à Paris pour pouvoir rassembler toutes les parties prenantes et réussir à (...) avoir un projet nouveau", a-t-il déclaré mardi à Nice, sans annoncer de date précise ».

On passera peut-être de mi-juin au 14 juillet en évitant le 2 juillet… 

Ce dernier son de cloche fait tinter la bonne nouvelle de ce billet de façon moins claire, encore du suspense donc...

Notes

[1] Voir l’article du 9 juin de NC 1ère  :

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/pour-philippe-gomes-de-caledonie-ensemble-un-non-accord-serait-la-tombe-du-pays-1593987.html

[2] Voir donc :

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvelle-caledonie-macron-promet-un-projet-nouveau-sans-refaire-les-erreurs-des-referendums-1594314.html

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