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Patrick Castex

Économiste, sociologue et HEC à la retraite (maître de conférence à l’Université Dauphine et membre du Cabinet Syndex, expert-comptable spécialisé dans le conseil aux Comités d'entreprise et aux syndicats de salariés), il s’occupe, depuis une dizaine d’années, de promouvoir l’Indépendance de la Kanaky Nouvelle-Calédonie. Il s’est mis en outre à écrire autre chose que de savants traités...

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Billet de blog 9 octobre 2025

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Braun-Pivet à Matignon le 10 octobre 2025 ? Pourquoi pas ! Mon petit doigt insiste….

Ce fut raté il y a environ un mois : échec de mon petit doigt et échec de la présidente de l’Assemblée nationale. Mais une option sérieuse que Macron devrait prendre maintenant après la récente pantalonnade du très éphémère gouvernement Lecornu due aux dommages collatéraux des bisbilles internes à LR (Retailleau, Wauquiez, Le Maire).

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Je peux encore me tromper[1], ça m’arrive souvent… La présidente de l’Assemblée nationale n’est pas ma tasse de thé, j’espère que les lecteurs l’auront compris mais je persiste et signe. Mais si Macron n’a pas compris ses trois précédentes erreurs de nomination d’un premier ministre compatible avec sa ligne de droite d’une politique économique dite de l’offre (en plus claire, favorable aux grands et petits capitalistes et aux classes très aisées, ces 10 % de salariés gagnant plus de 4 000 €  - nets ou bruts, avant ou après impôts, qu’importe) et qu’il rechigne (c’est probable, mais qui sait) de passer à gauche, Élisabeth Borne comprise qui a aujourd’hui l’audace de demander au moins la suspension de la réforme des retraites, la solution soufflée encore par mon petit doigt serait une porte de sortie.  

Mais il n’y a pas que mon petit doigt, il y a aussi un article des Échos[2].

Yaël Braun-Pivet n’était pas candidate il y a un mois, juste « disponible pour faciliter ». Elle en rêve sans doute ; et en tant que présidente de l’Assemblée nationale qui retrouve tous ses pouvoirs de compromis malgré sa division en trois blocs, elle serait peut-être la seule candidate idéale. L’article ne tire pas toutes les conséquences de ce qu’il mentionne ; d’ailleurs, sauf erreur, très peu de commentateurs politique ce soir du 9 octobre, n’évoque curieusement son nom et jamais mon hypothèse.

Il y a pourtant quelques signes évoqués par l’article des Échos ; au moins deux dont le second interroge.

1/ Un coup à gauche évoquant à demi-mot qu’elle lâcherait « du lest sur les économies et la justice fiscale » ; un coup à droite en facilitant la présence du RN dans les principales instances de l’Assemblée nationale[3].

2/ Le coût des réformes de gauche (dont la suspension de la réforme des retraites, même son abrogation, non évoqué dans l’article) n’est peut-être pas grand-chose face à celui de l’impasse politique actuelle[4]. En creux, elle semble ainsi aller plus loin que Lecornu qui pense que la question de la réforme des retraites ne peut être évitée, mais qu’elle va couter cher.

Cependant, dans un autre article[5] du mercredi 8 octobre, une semaine plus tard, elle ménage, toujours au sujet de la réforme des retraites, la chèvre et le chou : « La présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet a exprimé mercredi sa "gêne" de voir Sébastien Lecornu prêt à suspendre la réforme des retraites pour convaincre les socialistes de trouver un compromis sur le budget, lui préférant "un deal global". "Ça me gêne et je considère que si on devait aller dans cette direction, c’est dans le cadre d’un deal global", a déclaré la macroniste sur RTL, estimant "qu’il ne faut pas lâcher des trucs comme ça, quelque chose tous les jours". La présidente de l’Assemblée refuse de "renoncer aux grandes réformes que nous avons faites". "La question des retraites, on sait qu’elle est centrale, mais elle doit faire l’objet d’une négociation globale", a-t-elle regretté ». Il est vrai qu’elle pensait probablement que la solution où le PS reprendrait la direction du gouvernement était une solution envisagée par Lecornu, lui coupant l'herbe sous les pieds. 

Il y a donc quelques contradictions dans les propositions de la présidente de l’Assemblée nationale qui ménage bien la chèvre et le chou concernant Lecornu et la réforme des retraites ! Même attitude envers Macron rapportée dans cet article : « Yaël Braun-Pivet, qui a déclaré continuer à soutenir Emmanuel Macron, s’est par ailleurs dite "absolument pas d’accord" avec la proposition d’Édouard Philippe d’organiser une présidentielle anticipée, assurant que "quand la mer tangue, il faut qu’on tienne tous la barre fermement chacun à son poste" et qu’il ne fallait "pas déstabiliser les institutions" ».

Mon interprétation de ce point de vue, certes cynique, est qu’elle n’a aucun intérêt à la dissolution[6] si elle veut passer du perchoir à Matignon…

On peut ajouter, ce que l’article des Échos n’évoque pas (sauf peut-être en glissant, poétiquement, « Et pas question de se laisser choir au perchoir ») que ses ambitions pour Matignon ne se sont pas éteintes. En outre, techniquement, son poste au perchoir est (ou fut ?) un poste clé pour ses éventuelles ambitions.

Bien sûr, et on l’a déjà indiqué dans le billet du 5 octobre, cette femme de gauche passée parmi les premières au macronisme, a dû s’accrocher pour arriver au perchoir, souvent contre son propre camp[7]. On passe sur les détails pour ne retenir que cette phrase dans cet article : « La présidente de l’Assemblée nationale partage son sentiment sur Emmanuel Macron. "Si j'ai une immense reconnaissance pour Emmanuel Macron, sans qui je n’aurais pu incarner cette société civile en politique à laquelle je continue de croire, je ne peux m’empêcher de ressentir aussi une immense déception sur la méthode", confie-t-elle. "Il y avait, dans notre organisation, dès le départ, des personnalités venues du sérail qui sont parvenues à prendre le contrôle plus facilement, en verrouillant un peu les accès pour les autres", décrit-elle ».

Macron aura probablement du mal à la nommer à Matignon... D’autant plus que (dixit Lecornu) le premier ministre qui devrait le remplacer ne devrait pas avoir d’ambition présidentielle ; allez savoir si Braun-Pivet n’en n’a pas…  

Elle vient en effet, il y a peu[8], de d’insurger contre les tentations de certains membres de LR de s’allier avec le RN. Et elle est très claire sur le fond, comme l’indique l’article de Gala : « Selon la présidente de l’Assemblée nationale, gouverner côte à côte avec le parti de Marine Le Pen et Jordan Bardella, c’est : "contraire à toutes les valeurs des Républicains". Thomas Sotto rebondit et lui demande si Les Républicains sont "en train de vendre leur âme ?". Offusquée par cette situation, Yaël Braun-Pivet "ne l’espère pas" et "n’ose pas le croire". "Parce que ça ne correspond pas aux discussions que je peux avoir avec Les Républicains et la frontière doit être étanche avec le Rassemblement national. Toujours !", explique-t-elle. Comme le précise le journaliste, tous les républicains ne sont pas sur cette même ligne. La veille, le maire de Meaux, Jean-François Copé, disait s’opposer fermement à cette alliance ».

Macron a-t-il mieux, dans son chapeau de prestidigitateur, que Braun-Pivet ? Pour une fois, les commentateurs évoquent surtout Borloo ; mais il n’est pas le seul évoqué[9], dont Laurent Berger, l’ex patron de la CFDT qui a toujours refusé.

On va vite le savoir.

Notes

[1] Voir mon billet du 5 septembre 2025 (où le principal sujet était l’Accord de Bougival sur la Nouvelle- Calédonie et, accessoirement, la chute de Bayrou) ; billet titré L’accord de Bougival tombe à l’eau si Bayrou tombe ? Or, il va sans doute tomber… et sous-titré, À moins que "Le Caillou", la Calédonie, comme souvent, ne coule pas mais ricoche en attendant des jours meilleurs… Un gouvernement de centre gauche (bien sûr sans LFI, seul vrai soutien du FLNKS radical) allié au centre (droit) comme le souhaite le PS qui le demande à Macron ? Gouvernement qui finirait bien par se mettre d’accord sur quelque chose, dont Bougival. Ou scenario moins à gauche ? Ou…

C’est là que mon petit doigt m’avait déjà soufflé l’hippothèse Braun-Pivet à Matignon…

[2] Voir l’article du 1er octobre 2025, signé Derek Perrotte :

Yaël Braun-Pivet : faire barrage aux barrages | Les Echos

L’article écrit : « Le changement, c’est maintenant ? Yaël Braun-Pivet veut y croire, l’Assemblée nationale peut y arriver. Ensemble, tout devient possible ! Certes, de son côté, elle a encore raté Matignon. Mais en fait elle n’était pas "candidate", juste "disponible pour faciliter". Même pas mal. Et pas question de se laisser choir au perchoir. La présidente a arpenté les couloirs, décidée à remettre de l’ordre dans la maison avant sa réouverture, ce mercredi. Cela commence à suffire toutes ces ambitions personnelles et ces chamailleries qui mettent le bazar depuis la dissolution. "Le sujet, c’est la France", il serait temps de "se reprendre" et d’"être à la hauteur" les enfants. Vous ne pouvez pas casser tous vos Premiers ministres ! ».

[3] Selon l’article : « Là aussi, l’élue des Yvelines veut "faciliter". C’est son nouveau mot préféré apparemment. Main gauche, elle lâche du lest sur les économies et la justice fiscale. Main droite, elle ouvre la porte du bureau de l’Assemblée au RN. Bloqué l’an dernier par un barrage républicain, il a cette fois-ci hérité de deux vice-présidences lors des nouvelles élections, ce mercredi, avec l’aval du bloc central. Entre ici, Marine Le Pen ? La gauche va lui en vouloir. Pas si facile de faciliter… Mais Yaël Braun-Pivet assume. Elle sera "toujours opposée" au RN mais c’est leur "juste place", gagnée dans les urnes. Elle est "pour le barrage républicain" mais "contre le barrage institutionnel". Et entre les barrages, il faut bien surnager. Un autre bon résumé du défi ».

[4] L’article se contente de noter : « Le petit dernier, Sébastien Lecornu, a une équation budgétaire à trouver et ce qui va finir par "vraiment coûter cher" si ça continue, c’est "l'intransigeance" généralisée. Bref, place à un "changement radical de méthode" : "Il faut partir du fond" pour bâtir un compromis. "Partir du fond" est effectivement un bon résumé du défi ».

[5] Article du 8 septembre sur Médiapart (en fait une dépêche de l’AFP) :

https://www.mediapart.fr/journal/fil-dactualites/081025/la-suspension-de-la-reforme-des-retraites-gene-braun-pivet-ou-alors-dans-un-deal-global

[6] On apprend, dans cet article et ailleurs, « qu’une éventuelle nouvelle dissolution de l’Assemblée nationale n’avait pas été évoquée mardi lors de son entretien avec Emmanuel Macron ».

[7] Voir l’article de RTL (qui nous avait échappé) du 10 avril 2025 :

https://www.rtl.fr/actu/politique/une-immense-deception-sur-la-methode-yael-braun-pivet-fait-le-bilan-du-macronisme-7900493017

Son livre À ma place, paru à la même date (chez Buchet-Chastel, Collection Essais Et Document) nous avait également échappé…

On peut aussi voir l’article de juin 2022 quand elle fut élue au perchoir (ayant démissionné du ministère des Outre-mer…) et résumant ainsi sa biographie à l’époque :

https://www.linternaute.com/actualite/biographie/2640473-yael-braun-pivet-elue-presidente-de-l-assemblee-nationale-affaire-benalla-ministre-mari-sa-biographie/

[8] Voir l’article de Gala du 8 octobre renvoyant à une interview de RTL où elle était l’invitée de Thomas Sotto :

https://www.gala.fr/l_actu/news_de_stars/yael-braun-pivet-cette-recente-declaration-qui-l-a-fait-bondir-c-est-n-importe-quoi-20251008

L’article est clair : « Les Républicains sont-ils en route vers une alliance avec l’extrême droite ? Alors que la crise politique actuelle sévit, cette question revient de plus en plus sur le devant de la scène. Ce mardi 7 octobre, c’est le président du parti Les Républicains, Bruno Retailleau, qui a appelé à "ne pas voter pour la gauche" dans la législative partielle du Tarn-et-Garonne. Le même jour, l’ancienne porte-parole du gouvernement de François Bayrou, Sophie Primas (LR), s’est exprimée, elle aussi, pour dire qu’elle était prête à gouverner avec le Rassemblement national. Invitée sur les ondes de RTL ce mercredi 8 octobre, Yaël Braun-Pivet s’est offusquée de ces propos. Interrogée sur la prise de parole de Sophie Primas, elle n’a pas caché son mécontentement : "C’est n’importe quoi, je suis très choquée !", a-t-elle partagé, avant d’ajouter : "Et je lui dirais quand je la verrais" ».

[9] Voir, entre autres (ceux qui suivent l’actualité politique en France savent déjà tout) :

https://www.gala.fr/l_actu/news_de_stars/le-seul-qui-n-a-rien-a-perdre-cet-ex-ministre-bien-connu-des-francais-pourrait-il-remplacer-sebastien-lecornu-a-matignon-20251009

Ou :

https://www.midilibre.fr/2025/10/06/demission-de-lecornu-qui-pour-remplacer-le-premier-ministre-si-emmanuel-macron-nopte-pas-encore-pour-la-dissolution-12974561.php.

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