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* J’exagère un peu, mais pas trop ; voir l’Histoire du Troisième Reich[1] : « Beaucoup d’industriels et d’hommes de droite, réunis autour de Franz von Papen et d’Alfred Hugenberg, pensaient ainsi "lever l’hypothèque" nazie et se servir d’Adolf Hitler pour ramener l’ordre dans l’Allemagne en crise, avant de s’en séparer dès qu’il n’y aurait plus besoin de lui ».
NB (de dernière minute) : je viens de prendre conscience que je publie ce billet le 18 juin 2025, jour de l’Appel du général de Gaulle à Londres le 18 juin 1940.
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Zweisteine envoie nos deux larrons pour ce dernier Voyage à travers les siècles, donc encore très spécial comme le précédent, car ils ne sont au courant de rien, sauf qu’ils arrivent à Berlin mais ont tout oublié, comme pour le précédent en France en 2027, contrairement aux 8 premiers, de l’Histoire après 1875. Autre particularité de cette ultime aventure, rappelons-le : ils y resteront ; dans tous les sens de cette expression : ils ne reverront plus Lou, ni leur friterie Chez Charlot, ni leur verte vallée de 1875, et s’éteindront au même âge que dans leur vraie vie.
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Retour sur le retour d’Adolf Hitler en 2011 selon Timur Vermes
Près d’un quart de siècle avant 2033, en 2011, se réveille donc dans un terrain vague à l’endroit où se trouvait son bunker, Dolfi-Hitler[2] à Berlin, dans son costume de 1945 sentant à plein nez le benzène. Il arrive ainsi à 66 ans (l’âge où il se suicida avec Eva Braun avant, conformément à ses ordres qui étaient des désirs, de se faire incinérer, arrosé de benzène dans la cour devant son bunker. Dans le roman de Vermes, Dolfi sait qu’il est Adolf Hitler mais personne ne le crut jamais et il n’a jamais fait son outing officiel : il répétait bien, à qui voulait l’entendre depuis son apparition inexpliquée, qu’il était le Führer mais jamais il ne demanda une expertise génétique que d’ailleurs, curieusement, personne ne proposa. Or, il eût pu le faire en exigeant l’exhumation de son père, de sa mère, ou de sa nièce[3] qui se serait suicidée (version officielle) avec son flingue (à moins qu’il ne l’aie suicidée ou fait assassinée, car elle couchait avec son chauffeur dont certains murmurent qu’il n’était pas indifférent à Dolfi…). Le toujours comique Stromberg, Dolfi, avait pris de l’âge : il allait fêter ses 88 printemps. Son petit bonhomme de chemin de comique de YouTube de 2011 à 2033 continuait, toutefois de plus en plus dans l’indifférence générale, car le bon coup médiatique de 2011 n’était plus ce qu’il était ; cependant il gagnait un peu sa vie par des dessins qu’il vendait dans les gares[4] et attendait patiemment son heure. Elle arriva, toujours grâce à son génie (mais pas que...) ; mais pas pour longtemps.
Le comique Stromberg devient un Hitler très particulier, par une introspection (rareté qui arriva donc sur le tard) mais aussi grâce à un anar qui (il y en eut quelques-uns…) fit virer son drapeau noir au brun...
Regardant une émission de télé sur Che Guevara qu’il avait toujours refusé de voir, même en peinture (sauf bien sûr sur les tee shirts des jeunes et moins jeunes : au début, Dolfi tentait de leur arracher mais y renonça vite car il passa de nombreuses nuits en garde à vue) il fut brusquement fasciné par l’attitude altière de Guevara, ses cheveux longs, son béret noir avec la petite étoile rouge, ses yeux surtout, comme des braises. Si j’avais eu cette gueule en 1922, se disait Hitler, fasciné, le monde était à moi pour 10 000 ans ; Banzaï[5] ! comme disaient ses copains japonais. Et c’est là qu’il prit la meilleure décision de sa vie : je me laisse pousser les cheveux et la barbe mais je garde la petite moustache, je troque ma vieille casquette contre un béret noir orné d’un grand svastika à l’envers, tout blanc mais avec le cœur tout rouge : une fleur des champs de bataille qui vous donne du cœur au ventre – je me demande bien pourquoi, mais on verra plus tard… Et voilà ! Testons. Avec ses talents de peintre, il peignit frénétiquement, en 3D, comme il s’y était entrainé depuis une dizaine d’années en développant d’ailleurs la technique de peinture en hologramme lors de ses moments de blues ; mais, là, avec toujours un œil sur l’écran de la télé en relief où il pouvait tourner autour du Che pour mieux voir, à un poil près, les détails du visage de ce beau gosse.
Il arriva ainsi à son premier et seul chef-d’œuvre artistique qu’il envoya immédiatement par mail. D’abord à l’Académie des Beaux-Arts de Vienne, sûr que cette fois elle allait lui ouvrir la porte, et en plus, connu maintenant comme le loup blanc dans le monde entier, ils allaient ainsi corriger leurs deux erreurs historiques de 1907 et 1908. Et sans les conneries de cet Éric-Emanuel Schmitt : reçu aux Beaux-Arts mais Führer quand même ; et si cette putain de carrière politique foire encore (ça fait un bail qu’elle foire !) je deviendrai ainsi, malheureusement sur le tard, le Picasso du XXIe siècle. Il attend encore la réponse. Ensuite à sa secrétaire et confidente Eva Weiss à la télé qu’il venait de fonder, toujours sans grand succès : Dolfi-Trash-TV. En précisant qu’il devait tout de suite apparaître sur tous les écrans des rues, en 3D évidemment, quoi qu’il en coûte, en lui faisant noter qu’il n’apparaitrait plus en public avant quelques semaines (ses poils poussant plus lentement à son âge). Le succès fut au rendez-vous au bout de quelques heures, fulgurant au bout de quelques jours. Sa vie venait de changer.
Dolfi oublia de dire comment il avait eu cette idée. Le Français Mikhaïl Onfraie, peut-être un demi-frère de Michel Onfray, l’ex-anarchiste proudhonien bien connu, ou le frère de celle qui fut nommée à la tête du gouvernement français après la chute du gouvernement Barnier (les sources sont divergentes et peu fiables) s’était réfugié en Allemagne après la défaite de Jordan Bardella à la présidentielle de 2027 et avait ses habitudes chez Dolfi depuis plus de cinq ans. C’est lui qui lui ouvrit la télé le soir où, il le savait, devait passer un documentaire sur le Che. Ce que n’a pas dit Dolfi, c’est qu’Onfraie eut du mal à le convaincre de continuer à regarder le documentaire ; mais il y parvint. Onfraie, grand connaisseur mais aussi grand pourfendeur de Freud, avait son plan : il a parfaitement réussi.
Il n’y eut cependant pas que ce curieux anar qui passa le Rhin après avoir franchi la ligne noire des idées libertaires pour une ligne brune qui guida Dolfi ; ce dernier était de façon évidente sous l’emprise d’Onfraie, bien qu’il le niât toujours, mais gardait toutefois une autonomie relative qu’il considérait comme totale : on ne change pas en devenant presque nonagénaire ! Car il se souvint aussi (il n’avait jamais fait attention) de l’un de ses grands concurrents au début des années vingt du XXe siècle, le Deutschevölische Freiheitspartei (le DVFP, le Parti Populaire Allemand de la Liberté, le PPAL que l’on peut prononcer Pépéàelle ou Pal, comme celui du supplice qui porte ce nom, qui commence plutôt bien, pensa Dolfi, mais qui devient vite très désagréable ; il frémit. Ce PPAL pas nazi mais presque, était simplement une autre boutique du même acabit ; il y en eut des tas... Le mot Freiheit (cependant répété à l’envi par Onfraie et souvent traduit par libertaire, plus évocateur pour Dolfi que le mot anarchiste (qu’il détestait autant que les mots juifs, francs-maçons ou bolchéviques) trottait dans sa vieille tête qui se transformait. Le mot Freiheit, pour le PPAL, n’avait évidemment rien de libertaire, il voulait simplement renvoyer à la volonté du peuple allemand de se libérer de l’étau où il s’était trouvé après la guerre de 14-18 malheureusement perdue. Hitler avait liquidé tous les dirigeants du PPAL au moment de la Nuit des Longs couteaux en 1934 : mais le mot liberté tinta d’un son nouveau à ses oreilles.
Il se souvint aussi du Deutschnationale Volkspartei, le DNFP (Parti national du Peuple allemand) : un parti "völkisch" moins radical que le DVFP ; il s’alliera avec Hitler mais s’est dissous, sous la pression de ce dernier, fin juin 1933 ; le mot "völkisch" émit aussi dans la tête de Dolfi un autre son de cloche. Il y eut donc, avant-guerre comme après, une myriade de partis fachos paléo- ou néo-nazis en Allemagne. Dolfi se demanda comment il avait pu réussir à tirer son épingle du jeu : ma gueule de petit aryen qui rassurait sans doute les vrais aryens grands et beaux blonds comme du temps du Royaume de Thulé admirablement décrit par Goethe dans Der König in Thulé, Le Roi de Thulé que même tous les petits Français ont appris par cœur en cours d’allemand et que Dolfi tout petit, dans les bras de sa mère Klara, adora[6] .
Dolfi se perdit dans ses songes, bon aryen sans doute, mais bel aryen, non ! Et le physique de ce nabot de Goebbels et sa tronche ! Et le vilain visage d’Himmler ! Et celui de ce gros porc de Göring ! J’aurais dû me transformer en Guevara dès 1922. Scheisse ! rugit-il ; mais ce beau gosse ne naquit qu’en 1928 ! Je n’avais sous la main que Benito, mais malgré l’influence évidente qu’il eut sur moi, il n’était pas question de copier son look ; quoique… Il paraît qu’il était un peu libertaire dans sa jeunesse de socialiste radical, m’a dit Mikhaïl. Mais je ne vais pas refaire le monde. Et il s’endormit sur sa chaise…
Le lendemain matin, il se réveilla, tombé par terre, avec de gros bleus. De toute façon, je dois attendre quelques semaines pour aller voir ceux qui se rapprochent le plus de mes idées. Et les temps avaient changé depuis 2011 ; on vous passe les détails. Le Nationaldemokratische Partei Deutschlands, le NPD (à prononcer en français comme Hainepédé) le Parti National Démocratique qu’il avait ridiculisé en 2011, selon Vermès (regrettant que Socialiste se soit transformé en Démocratique) avait disparu en devenant le groupuscule Die Heimat, La Patrie, plus exactement le Chez soi, sans rapport au père comme Vaterland. Ce groupuscule était entré (Dolfi le savait) de moins en moins discrètement dans le nouveau parti un peu plus présentable, une extrême-droite taxée de populiste, libérale, eurosceptique, nationaliste et n’aimant guère l’immigration, mais qui n’était plus taxée de nazie : Alternativ für Deuschland, AfD, Alternative pour l’Allemagne fondée le 6 février 2013 (6 février : hasard ou volonté de fêter le 6 février 1934 en France ?) qui entra discrètement en 2018 au Bundestag mais cartonnait depuis 2024 (surtout dans la partie est de la RFA). Malgré ses efforts, Dolfi, toujours considéré comme un clown, n’y entrait plus que par la petite porte pour égayer les réunions et congrès par ses shows introductifs, désopilants et de plus en plus nuls, mais rameutant quand même ceux qui aimaient plus les jeux du cirque que le pain : les fois où on avait oublié, volontairement, de l’inviter, beaucoup de sièges restaient vides.
Le coup de tonnerre qui allait convaincre Hitler de faire son outing : son outing politique, pas son outing sexuel…
Après l’incroyable succès du nouveau look du nouveau Führer un peu déguisé en Che Guevara, il fut invité discrètement au bureau politique du parti AfD. Wenn ? l’équivalent de Now then ? en anglais, Alors ? ou Que faire ? fut le thème d’interminables palabres ; pour une fois Dolfi n’eut aucune idée ; et son look qui plaisait aux foules ne plaisait que très moyennement aux cadres de l’AfD. Un psy barbu, au grand nez tombant, intervint et résolut le problème, annonçant qu’il était d’extrême-gauche – hurlements de toute la salle, que le psy laissa passer avant de reprendre – mais bien dans l’AfD, venant de contestataires de Die Heimat : « Monsieur Stromberg, je suis convaincu que vous êtes bien Adolf Hitler que le peuple allemand attend depuis des années, et je pense que de plus en plus des gens de chez nous le savent mais ne veulent pas se l’avouer (je vous expliquerai plus tard pourquoi…) comment vous est venue cette idée de changer votre visage et vos cheveux en enlevant cette mèche légendaire pour la remplacer par des cheveux coiffés avec un pétard, d’ajouter une barbe maigrelette, comme celle de ce bolchévique de Monsieur feu Guevara, en troquant votre casquette altière couleur vert de gris pour ce béret noir, orné cependant bien comme il faut, mais en gardant, heureusement, votre moustache qui vous sied si bien et est toute votre identité ? J’ajoute que ce youpin de Chaplin la portait bien avant vous, cette petite moustache (mais pas votre mèche : il était frisé) qui lui permit cependant de vous ressembler comme deux gouttes d’eau dans son horrible film américain The great dictateur (Der grosse Diktator, mal traduit en français par, simplement Le dictateur) mais en gardant sciemment votre moustache qui était aussi la sienne. Monsieur Stromberg, Regardez le logo de L’AfD qui trône au-dessus de nous : AfD en bleu ; mais dessous, que voit-on ? Une flèche rouge-sang partant du bas de la lettre f et s’élevant vers le haut à droite, avec une pointe acérée ». « Qu’entendez-vous par là ? » répondit Dolfi, hagard. « Par-là, je n’entends pas grand-chose, sourit le psy ; et je vous aide par cette réplique ». Dolfi ne comprenait toujours pas, mais un haut cadre dans la salle s’esclaffa : « Un phallus, évidemment, symbolisant le glorieux peuple allemand ! ».
Dolfi venait de tout comprendre : toute sa vie n’avait été qu’une dure lutte, très dure, pour transformer son tout petit zizi, pendant toujours vers ses chaussettes, en glorieux phallus. Il se remémora avec combien d’acharnement il avait lutté à Vienne contre Sigmund Freud, certes juif mais pas bolchévique pour un sou, quoique penchant plutôt à gauche (conditions nécessaires et suffisantes pour Hitler pour avoir une dent contre lui) qui aurait pu lui mettre le nez sur son insuffisance érotique, pour rester poli ; sans parler des freudo-marxistes tels que Wilhelm Reich qu’il apprécia encore moins. Mais Dolfi n’allait évidemment pas faire ce genre de outing !
Il n’en dit rien et, montant à la tribune en bousculant le service d’ordre, il commença un long discours, reprenant, sans trop se forcer, son accent autrichien très marqué de bavarois, discours que l’on peut résumer ainsi : « Kameraden, j’avais inventé, il y a plus d’un siècle, notre drapeau rouge orné du svastika noir sur un disque blanc. Ce svastika très aryen, mais surtout connu chez ces dégénérés d’Aryens indiens, je l’avais volontairement mis à l’envers pour montrer que notre mouvement n’était pas celui des indiens aryens dégénérés, mais celui de notre "Volk", notre "peuple", notre "ethnie" même, notre "race" enfin, de notre vieux et glorieux mouvement "völkisch" de la fin du XIXe siècle. Son but était de donner à l’Allemagne une religion païenne, le paganisme germanique, antidote, il est vrai peu efficace, au mouvement fondé par Marx et Engels. Nous autres nazis n’avons pas assez utilisé les idées de ces Völkisch (j’y reviendrai). J’avais donc détourné le drapeau rouge des bolchéviques et leur faucille et marteau qui attiraient sans aucun doute le peuple, mais aussi pour rappeler que bien que nationaux, nous étions aussi socialistes ! Aujourd’hui, il faut aller plus loin, la "Freiheit", notre psy a parfaitement raison, remplace le marxisme qui est mort depuis la chute du Mur de notre capitale éternelle ; il nous faut maintenant un drapeau noir avec toujours notre svastika à l’envers mais en blanc avec, à l’intersection des deux branches, une rose rouge, comme le centre de nos femmes, de nos vaillantes vierges qui ne peuvent le rester pour assurer notre puissance militaire en se faisant pénétrer le plus souvent possible par nos glorieux phallus. Je vous rappelle, Kameraden que nous ne parlons plus assez de ces trois K, qui caractérisaient avec justesse nos femmes : Kinder (enfants) ; c’est, et de loin, le principal avec ce svastika blanc virginal au cœur rouge ; Küche (cuisine) pour l’intendance de nos armées ; et Kirche (église) pour remplacer, en s’adaptant – sinon nous n’aurions jamais eu le soutien des églises protestantes et de ce Grand Vicaire catholique que fut Pie XII – notre mythologie aryenne originelle. Tout doit se résumer à partir d’aujourd’hui par Freiheit, même plutôt par Libertär – j’en vois devant moi qui osent ronchonner : on ne ronchonne pas devant le Führer ! – alors que depuis des lustres les américains les plus proches de nous osent bien se définir comme "libertariens" ; et le mouvement communiste libertaire devient chez nous, pour ceux qui se disent "révolutionnaires" très fashion, enterrant six pieds sous terre le bolchévisme qui s’est d’ailleurs enterré tout seul. Osons, Kameraden, notre mouvement qui est la vraie Révolution nationale, ne peut plus s’appeler national-socialiste, le socialisme étant, je le répète, tombé avec le Mur : il devra s’appeler, à partir d’aujourd’hui, en utilisant le français, la langue officielle de la poste internationale, l’ancêtre de la com’, ce qui nous aidera à dominer le monde, non plus le parti (qui est toujours celui d’un seul homme) mais le mouvement, celui du Volk et de ses larges masses révoltées : le mouvement des Communistes Libertaires Nationaux ; le mouvement des CLN à prononcer donc à la française comme CéHélène en draguant ainsi les femmes de #MeToo. L’Europe actuelle que nous exécrons sera une Europe allemande, et notre parti au nom franchouillard y aidera : je suis sûr qu’au-delà de notre Rhin bien aimé, le cœur de cette Europe, beaucoup s’y rallieront, comme en 1940. Et je vous propose de chanter ensemble notre nouvel hymne national "Freiheit über alles" ».
Dolfi salua comme à l’accoutumée, toutes les mains droites se levèrent en oblique, comme les corps un peu prosternés, et l’on chanta. Ce discours parut partout dans la presse écrite, mais soigneusement caviardé : toutes les saillies trop fascistes radicales furent soigneusement enlevées ; et il n’y eut aucune fuite. Certains gauchistes firent circuler sous le manteau que ce Mouvement des Communistes Libertaires Nationaux aurait dû plutôt s’appeler, le Moucoli nationaux ou, en tirant les nouveaux poils d’Hitler par les cheveux : Mous-qu’au-lit mais pas durs à cuire… Cette blague à deux balles qui eut son petit succès n’eut que peu de retentissement sur les résultats de l’élection au Bundestag ; mais allez savoir…
Rapidement, Hitler demanda une expertise génétique pour montrer qui il était ; il n’y avait, bizarrement, jamais pensé avant cette date... Cela dura assez longtemps (exhumation de ses ascendants, vérification avec des cheveux et poils de sa personne retrouvés sur les cadavres de beaucoup de dirigeants nazis suicidés ou exécutés après le procès de Nuremberg, etc. C’était bien Hitler ! La nouvelle fut un énorme coup de tonnerre dans toute l’Europe et le monde entier qui avaient suivi de très loin les élucubrations de Stromberg ; mais son nouveau programme (celui évoqué par la presse) amoindrit le choc : le Figaro (mais ce n’est qu’un exemple) fit un long article qui peut se résumer par : « Certes, c’est bien Hitler et pas l’Olibrius que l’on croyait ; mais il s’est bien assagi et son programme, certes de droite, reste démocratique, et beaucoup voient en lui un libertaire ou au moins un libertarien à l’américaine ? Aucun danger donc ; espérons qu’il va mettre en place dans son pays un régime économique de marchés libres libérant les initiatives entrepreneuriales, alors qu’en France s’est dessinée depuis plus de cinq ans, malgré toutes les précautions prises après l’élection du ticket Berger-Tondelier, une économie étouffée par l’interventionnisme ».
Dolfi-Hitler candidat du mouvement des CLN
Hitler fut ainsi candidat à la Chancellerie avec son nouveau mouvement des Communistes Libertaires Nationaux, le parti National-Socialiste ayant été jeté aux orties. Tout le monde ou presque en Allemagne, de l’extrême gauche à l’extrême droite, continua, malgré tout, à l’appeler Dolfi qui allait si bien avec CLN-CéHélène qui remplaça Eva Braun : Dolfi et sa nouvelle fiancée ! Pour l’écrasante majorité des Allemands, même ceux qui allaient voter CLN, Hitler restait un nom peu recommandable ; pour la gauche et le centre, atterrés, c’était quand même un très mauvais souvenir que le nom de Dolfi, qu’on le veuille ou non, adoucissait ; même les vrais nazis qui n’avaient pas accepté la mort de leur parti préféré, l’appelait aussi Dolfi, mais par dégoût.
Onfraie regretta amèrement de ne pas avoir tenté le coup avec Bardella en France en 2027… Les sondages, quelques mois avant les élections au Bundestag, donnaient un peu plus de 30 % à Dolfi et à son nouveau mouvement, soutenu d’ailleurs par une toute petite minorité d’anars (ça, Onfraie en fut très déçu : il avait tout fait pour tous les convaincre, mais ça ne marchait plus : les anars commençaient à le connaître et ils connaissaient fort bien Dolfi redevenu Adolf Hitler). Un peu moins de 30 % allait à la coalition allant du centre-gauche écolo au centre droit libéral qui gérait, mais avec combien de crises récurrentes, le pays depuis 2024. Une nouvelle coalition de socialistes dissidents, de vieux marxistes mais surtout de libéraux, gauchistes et chrétiens progressistes (tant catholiques que luthériens) que l’idéologie communiste libertaire en plein essor (la vraie, celle des coLibs de Mickey et Charlot, évidemment encore inconnus) commençait à séduire et se nomma la liste Noire et rouge, donnée à plus de 15 %. Presque un petit coup de tonnerre outre-Rhin, et même en ancienne partie orientale qui était pourtant le terreau de l’extrême droite ! On ne savait pas pourquoi, mais les analystes politiques, sociologues et psychologues s’affairaient pour le savoir.
Le reste des intentions de vote était dispersé en une flopée de petits partis qui n’atteindraient peut-être pas les 5 % pour avoir des élus. Cohn-Bendit, revenu en Allemagne, rien que pour voir – il s’était de nouveau dépolitisé et écrivait maintenant des poèmes d’un gentil érotisme – se tâtait cependant, mais il n’était pas sur la liste Noire et rouge.
Mais c’était sans compter de l’arrivée de Charlot et Mickey…
Arrivée à Berlin de Charlot et Mickey
Ils atterrirent exactement sous la porte de Brandebourg vers 2 heures du matin, juste après la publication de ce premier sondage. « Qu’est-ce qu’on fiche là ! », se dit Charlot, ébahi. « Merde, ajouta Mickey, et juste au moment de notre orgasme au même moment avec Lou, au beau milieu de cette merveilleuse nuit dans notre chambre à la Friterie Charlot de Bruxelles ! La première fois que nous partions ensemble tous les trois vers le septième ciel ! Nous voilà au centre de Berlin, tu reconnais comme moi cette porte ; qu’est-ce qui nous arrive ? »[7].
Encore vous, rigola La Pérouse, le même que celui rencontré sous le Pont neuf quelques années auparavant. Nos deux larrons ne comprirent rien à cet accueil ; il dut s’acharner à reprendre tout, car, évidemment, ils avaient tout oublié du Paris de 2027. La discussion reprit toute la nuit à voix basse, bien cachés ; et le planton qui gardait la porte imposante dormait debout ; des voitures passaient, sans le moindre cheval apparent… Zweisteine intervint et ils comprirent tout : leur mission. Sauf qu’ils n’avaient plus l’omniscience habituelle qui les avait beaucoup aidée, ni leur invincibilité.
Ils assurèrent à La Pérouse qu’ils étaient bien les clones de Marx et Bakounine et La Pérouse les crut ; assurant qu’il en était déjà convaincu à Paris mais n’avait jamais osé les contredire ; Mickey et Charlot ne comprirent pas. « Pourquoi faites-vous immédiatement votre outing, au moins avec moi, et vous allez sans doute le faire devant toute l’Allemagne, quand vous avez toujours refusé de le faire à Paris ? ». Charlot et Mickey ne comprirent toujours pas la question mais répondirent cependant : « C’est une mission qui nous a été confiée par un dénommé Zweisteine ; il nous envoie depuis 1875 à Berlin pour une mission spéciale de première importance, nous a-t-il dit, mais sans nous en dire plus, sauf que c’était notre dernière mission (curieux, car pour nous, c’est la première…) allez savoir pourquoi, en nous indiquant seulement "Vous comprendrez vite" et dites immédiatement qui vous êtes au premier venu ; et c’est vous ».
Les trois disparurent au petit matin en courant, le planton s’étant réveillé ; passant un peu plus loin devant un kiosque à journaux qui venait d’ouvrir. « Ça, c’est la meilleure, après celui qui se prenait pour Hitler, voilà deux bouffons qui se prennent pour Marx et Bakounine ! Car j’ai vieilli, mais ma culture s’est étoffée ; et regardez sur la couverture du Bild-Zeitung d’aujourd’hui : vous apparaissez côte à côte dans un montage un peu psychédélique et en hologramme ; je vous ai tout de suite reconnu. C’est une nouvelle trouvaille de ce dingue de Stromberg ? Il en avait besoin jusqu’il y a peu, mais depuis, on ne voit plus que lui. C’est bien Hitler, et je suis peut-être le seul à qui il se confia, mais n’ébruitez pas, je vous en prie. J’ai beaucoup apprécié Stromberg, tout en détestant Hitler ; Stromberg n’aurait pas fait de mal à une mouche, il cachait un cœur d’or derrière ses discours follement nazis ; à mon avis, c’était un pauvre mollasson, vous voyez ce que je veux dire ». La Pérouse ne commenta pas. Le gars se pencha pour trouver un vieux Bild de la semaine passée. « Regardez, c’est lui, certes méconnaissable, sauf avec sa petite moustache devenue ridicule, maintenant déguisé en Che Guevara ! ». On ne comprend rien à vos histoires, dirent en chœur Mickey et Charlot ; c’est qui ce Luther (Hitler corrigea La Pérouse, indiquant avec un clin d’œil au tenant du kiosque qu’ils étaient complètement saouls) et ce Guevala (La Pérouse ne pipa mot). « Vous êtes encore plus des charlots que ce Stromberg qui vient de démontrer, après des analyses ADN et tout et tout, qu’il était bien le revenant d’Hitler ! ».
Venez mes amis, La Pérouse les tirant par le bras alors que le kiosquiste continuait de pérorer, je vais vous expliquer ; j’habite à Kreuzberg, pas trop loin d’ici à pied ; vous devez vous changer, car vos vêtements vont vous faire remarquer depuis ce numéro de Bild. Il leur expliqua toute l’histoire de l’Allemagne et nos deux larrons comprirent presque tout. Miracle ? Non, ils étaient en effet passés auparavant chez une copine de La Pérouse, sur la grande allée Unter den Linden (Sous les tilleuils) pour utiliser un nouvel appareil qui enseigne instantanément ou presque tout ce qui est connu, le même en beaucoup plus efficace que celui qu’il avait utilisé à Paris en 2027 mais qui n’est utilisable, pour le moment, qu’avec des gens au QI supérieur ou égal à 170, c’est-à-dire en gros, une dizaine seulement connue dans le monde. Cet appareil est donc inutilisable pour l’enseignement, c’est bien dommage : avec des QI moyens (à 100, donc) il ne sert presque à rien. On peut se demander pourquoi cet hurluberlu de La Pérouse avait acheté une fortune le seul prototype existant en Allemagne. Il invita nos deux larrons à dormir, brancha l’appareil sur le niveau n° 1, le plus rapide mais le moins performant, et s’endormit : les trois n’avaient pas fermé l’œil sous la porte de Brandebourg.
Et la lutte contre Dolfi et son mouvement des CLN commença !
À midi ils en savaient déjà pas mal. « Alors, comme ça, dit Charlot, ce trou du cul d’Adolf Hitler, devenu Dolfi, cet Autrichien qui conquit ainsi l’Allemagne, se suicida puis réapparut en 2011, n’a fait que continuer en pire ce qu’avait commencé Bismarck : un socialisme d’État devenu national-socialiste, c’est pas très différent, avec sans doute un antisémitisme exacerbé (mais c’était déjà pas mal à notre époque) : une idée de génie. Et sa nouvelle idée du national communisme libertaire de ce CLN est encore plus géniale. Je viens de comprendre la mission que Zweisteine nous a confiée : ça va chauffer ! Ce que je comprends encore mal, c’est cette histoire de Che Guevara…». « Un simple détail, je t’expliquerai ; mais c’est à vous maintenant de m’expliquer ce que vous faites ici, à Berlin venant de Bruxelles à travers le temps ! ». Ils lui expliquèrent tout par le menu, leurs différents Voyages dont ils se souvenaient maintenant comme si c’était hier (génie de Zweisteine qui avait changé d’avis sans les prévenir – il avait l’esprit coquin, ce Zweisteine – ou efficacité du nouvel appareil se demanda La Pérouse qui eut du mal à tout comprendre, semble-t-il, mais capta le principal. Ils se souvenaient donc de tout, sauf de celui que La Pérouse insistait à leur conter, à Paris en 2027 : un gigantesque trou de mémoire ! Zweisteine les avait pourtant prévenus. « Le plus important, se résigna leur nouvel acolyte, c’est que vous avez aussi, un peu grâce à moi, réussi une autre mission à Paris, avec succès ; je n’en dis pas plus ».
Il n’était plus question de se promener avec ces deux fou-fous et leur costume d’époque. La Pérouse obtint pour la journée le gite et le couvert chez sa copine de l’Allée Unter den Linden avec laquelle il partagea la couche ; Mickey et Charlot aurait bien participé à la fête, mais leur ami les brancha avec son appareil au niveau n° 2 et quatre boules Quies. Ils partirent au petit matin, les deux larrons eurent droit à quatre bisous bien claquées sur les deux joues et en les serrant très fort, ce qui gonfla bien leur pantalon (ce que remarqua la jolie copine de La Pérouse, semblant regretter ce qu’aurait pu être sa nuit). La Pérouse ne vit rien et les pressa de se dépêcher « Allez, allez ! On doit y aller, l’aube pointe, et vous allez vous faire remarquer ; on doit arriver à Kreuzberg avant le lever du soleil ! ». Ils arrivèrent au bel appartement de Kreuzberg, non sans s’être fait charrier un nombre incalculable de fois par des jeunes Allemands et touristes de toutes nationalités qui sortaient de boites ; les rares Turcs du quartier (la majeure partie du quart de millions de Turcs à Berlin) qui allaient travailler, du moins ceux qui se lèvent tôt, les regardaient à peine et avaient l’air de s’en foutre comme d’une guigne de ces deux comiques ; ils en avaient vu d’autres. Charlot ne reconnut pas le quartier, où il avait habité, qui ne fut en fait pourtant que peu détruit en 1945 ; bien sûr, ils venaient de découvrir le Multi-Kulti qui leur plut beaucoup, la Diversité culturelle (mélange de Turcs arrivés à Kreuzberg, vieux quartier ouvrier, après la guerre comme « travailleurs invités » ; hippies, punks et autres alternatifs ; bobos etc.) : l’avenir du monde des coLibs au XXIe siècle, Incha’Allah ! Juste pour rigoler, il les amena chez le même teinturier turc qui avait nettoyé le costume du revenant Hitler. Même en civil, tout le monde aurait pu reconnaitre les clones de Marx et Bakounine, comme tout le monde les reconnut un peu plus tard, sauf ce teinturier turc. « Dépolitisation flagrante de la nouvelle classe ouvrière ! » se plaignit Charlot.
Mais il fallait contrer Dolfi et son CLN, et on allait voir ce qu’on allait voir ! « Tiens, dit Mickey, je viens d’en inventer une bien bonne, grâce à ton appareil miracle : le "mouvement des Communistes Libertaires Nationaux" de Dolfi, si on les appelait les "Mous-qu’au-lit nationaux" ! ». « Pas mal, mais c’est déjà fait, et en mieux » rigola La Pérouse.
Et Marx gagna les élections, contre Dolfi. Happy end, sauf pour ce dernier
Ce fut en fait d’une simplicité enfantine.
Toujours grâce à La Pérouse qui avait le bras de plus en plus long, ils prirent contact avec ce qui allait devenir le mouvement des coLibs allemands, le vrai, pas la connerie, cependant apparemment géniale de Dolfi. Charlot et Mickey venaient de faire leur outing dont les démarches furent beaucoup plus rapides, grâce à des employés tous anars ou cocos qui commençaient à se parler, de la Mairie de Kreuzberg que connaissait le bon vieux La Pérouse. Le secret devait être bien gardé et le fut, on ne sait par quel miracle : seuls furent mis au courant les principaux dirigeants du mouvement mentionné plus haut, dont bien sûr, celui qui avait le bras de plus en plus long et semblait un membre éminent de la confrérie.
Il fallut évidemment convaincre d’abord ces dirigeants (en parfaite contradiction, tous les lecteurs l’auront remarqué, avec les principes de base des coLibs ; Lénine devait frétiller dans sa tombe…). Et on ne pouvait pas se contenter des preuves génétiques. Sans éluder les erreurs techniques possibles (mais les test furent effectués trois fois par trois équipes différentes) ni les manipulations politiques, il restait que des clones ou quasi-clones génétiques peuvent exister, très rares ; et nos deux larrons avaient peut-être eu des jumeaux avec également retour en 2033 ! Il fallait donc être prudent, très soigneux : la lutte contre le retour possible du nazisme avec le vrai Hitler, serait-il devenu Dolfi adepte de CLN-CéHélène, était trop sérieuse pour être laisser à la nature et aux seuls généticiens ; la culture devait intervenir.
Cela dura des heures, avec vérification surmultipliées des documents officiels mais pas encore publiés, avec interrogations écrites, orales et autres quiz. Charlot-Marx fut bassiné des heures par le grand et seul Allemand, né à Trêves, comme l’interrogé, qui était un monstre de culture marxiste : c’était bien Marx ; rien qu’avec son accent typique d’un seul quartier de Trêves, où n’existaient que ces curieuses intonations, le montrait ; mais en plus tout concordait ; et Charlot Marx avoua tout, en se repentant, sur sa crapulerie avec son fils naturel Freddy. Mickey-Bakounine passa les mêmes examens, par un Russe spécialiste de ce grand révolté, aussi véritable puits de sciences : c’était bien Bakounine qui développa en outre comment il avait craqué face au Tsar pendant son long séjour dans les griffes de l’Ours[8]. Peu eurent des doutes[9]. Il fallait faire un grand coup médiatique, plus grand que celui de Dolfi : un grand meeting avec un maximum de monde et avec une double surprise. Ce fut fait, dans le quartier de Kreuzberg.
Le meeting se tint quelques jours plus tard, avec beaucoup de Turcs (mais on était dans ce quartier, ce qui étonna pourtant la majorité de bobos présents, avec toutefois pas mal d’ouvriers allemands parfaitement reconnaissables à leurs habits plus conventionnels). Charlot et Mickey que personne ne connaissait, sauf la poignée des organisateurs de ce qui allait se transformer en grand show, montèrent à la tribune, toujours guidé par leur ami. « Allez-y tout de go ! » leur intima-t-il, comme un ordre ; et c’en était un. Charlot prit la parole, en allemand évidemment, habillé d’un costume à la mode alternative fait sur mesure par un couturier juif des amis de La Pérouse : « Compagnons, je vais sans doute vous étonner : on m’appelle, ceux qui me connaissent, (ça ne fait pas beaucoup de monde) Charlot, mais je suis Karl Marx, de retour aussi comme ce petit Dolfi… ».
Un éclat de rire de plus de dix minutes mit la salle en transes ; certains étaient pliés de rire, d’autres se roulaient par terre, on dut en évacuer quelques-unes et quelques-uns ; une petite minorité y crut… Un spectateur, peu intéressé par les conneries de ce charlot, mais nouvel adepte du mouvement, avait les yeux rivés sur son téléphone portable. Il hurla : « Vos gueules ! Ce que nous conte ce charlot semble vrai, du moins, la nouvelle court partout sur Internet, vérifiez, mais méfions-nous : Dolfi est capable de tout ! ». On entendit le crépitement de milliers de clics et la salle fut baignée de bleu. La nouvelle de l’outing officiel ne parut en effet, comme c’était soigneusement planifié, que le matin même, seulement sur les réseaux dits sociaux vers 10 heures, mais des éditions spéciales papier furent tirées sans délai. Un très jeune Turc entra dans la salle, une pile de Bild-Zeitung dans les bras, « Édition spéciale, deux autres outings étonnants, après celui d’Adolf Hitler, notre vieux Karl Marx et un dénommé Bakounine ; Éditions spéciale… ». Ce fut la liesse ; le meeting se transforma en danse endiablée et les vendeurs de Kebabs, pas tous turcs, firent fortune. Partout dans tout Berlin, et dans toutes les grandes villes d’Allemagne (un peu moins à Munich et Nuremberg) des groupes se réunissant de façon spontanée, chantaient leur joie, de même que presque partout dans toute l’Europe, un peu plus tard ailleurs (question de fuseaux horaires). On sut quelques heures plus tard, avec photo à l’appui que Dolfi était sorti de chez lui, une corde à la main ; c’était une fake news grossière qui mit cependant, un temps, l’ambiance.
Le reste peut se résumer très vite.
Marx (on ne parla plus de Charlot) se présenta comme patron incontesté du parti Les Vrais CoLibs, également en français, pour se moquer de Dolfi. Personne ne tiqua en Allemagne, sauf quelques parfaits francophones, la plupart adhérents à ce tout nouveau parti ; seul Mickey mit en garde ses amis : « Les fachos vont nous appeler "Les VC", les Chiottes, quoi ! ». Personne chez les soutiens de Dolfi n’eut cette fâcheuse idée. Plus de la moitié du centre gauche-droit traditionnel y entrèrent avec enthousiasme, Joschka Fisher et ses Grünen, les Verts (nés en 1980, déjà presque un demi-siècle plus tôt, en premier ; la majorité du SPD, tous ou presque de ce qui restait des partis marxistes ou marxisants ; ce qui restait de Die Linke (La Gauche) moribonde, l’équivalent des cocos, pour simplifier, mais en chute libre depuis 2007 (et après une scission trouble en 2024[10]) ; une petite partie de la CDU (peu de la CSU en Bavière).
Une mention spéciale du jury à Dany le rouge qui fit encore un magnifique salto arrière dont il avait le secret et avait adhéré enfin aux Vrais CoLibs ; avec élégance il n’expliqua jamais aux Allemands ignorant la langue de Molière le gag de Mickey qui lui avait également sauté aux yeux. Il tenta surtout de s’imposer, tentant de remplacer Charlot en mettant en avant sa jeunesse d’esprit (mais il avait 88 ans, comme Dolfi) et Marx pouvait jouer les jeunots avec trente ans de moins (il n’avait que 57 ans en 1875 et venait d’arriver avec son âge). Dépité, Cohn-Bendit se retira et appela à voter blanc, qui était devenu sa couleur préférée. Mais tous ses admirateurs (ce qui restait des vieux membres en fauteuils roulants des colocs des anars, surtout individualistes, des années Dany à Francfort et ailleurs, mais surtout de très nombreux jeunes adeptes de Max Stirner) le critiquèrent avec des mots très durs et formèrent un bon bataillon des Vrais coLibs.
Selon les derniers sondages, c’était gagné : le parti de Marx 55 %, celui de Dolfi 36 %, ce qui restait du centre, des quelques nazis revanchards et des cocos nostalgiques de la RDA, le reste. Le débat télévisé entre Marx et Dolfi qui suivit ce sondage fut un naufrage pour ce dernier : différence d’âge sautant aux yeux, succession de hurlements et de quasi-endormissements de Dolfi auxquels répondaient la rigueur, l’humour caustique, bref le talent de grand orateur heureusement articulé à une géniale théorie. Peu remarquèrent qu’elle avait bien évolué, cette théorie, d’après ce qu’ils connaissaient de la vulgate marxiste ; les mêmes s’étonnèrent de sa proximité avec cet anarchiste devenu bien connu de Mickey Bakounine. Un débat commença sur Arte et l’équivalent allemand de France Culture, rapidement clos ! Lénine avait raison, pour une fois (et ça nous arrange ici…) : on peut raconter ce que l’on veut aux masses. Ce fut un pieux mensonge, malgré ce que contait l’Histoire officielle, l’opposition de Marx et Bakounine n’était ainsi que ragots. Le Congrès de La Haye de 1872 ? Une astuce géniale pour mieux cacher une entente évidente pour donner le change aux adversaires et à la police. Tout le reste, de Makhno à l’Espagne et ailleurs ne fut qu’une succession de malheureux quiproquos conséquence de ce malentendu originel. Il fallut quelques semaines pour que ce nouvel et honteux mensonge soit mis en pièces, mais le bien était fait : tout passa sur le moment, avant les élections ; et n’est-ce pas le principal[11] ?
Comme dans toutes ses nombreuses interventions dans les meetings, le presse écrite et audiovisuelle, Charlot insista, souvent avec Mickey à ses côtés qui devint aussi populaire sinon plus que lui, sur leur accord pour une société coLib avec des centaines de détails qui touchaient au cœur de toutes et toutes. Ils n’insistèrent pas sur les aspects psy, à la demande de La Pérouse, ce dernier ayant compris : expérience précédente en France en 2027 ? Rigidité particulière des Allemands ? Surtout, pourquoi insister sur ce qui rend difficile (encore un pieux mensonge…) sinon impossible la fusion à la coLib des marxistes et des libertaires alors que ça marchait du feu de Dieu dans cette Allemagne de 2033, et que le faux mouvement colib de ce pauvre Dolfi, le CLN, battait de l’aile : tous les discours de Dolfi, dont le dernier à Nuremberg devant un millier de vieux et vieilles d’un côté et un autre millier de jeunes crânes rasés de l’autre, endormaient malgré les hurlements de l’orateur. Il est vrai qu’il avait appris ses discours par cœur, discours écrits par Onfraie et que, malgré tout, il était peu à l’aise pour exprimer avec sincérité son amour de la liberté et du communisme libertaire national salvateur.
Le résultat de l’élection fut, à quelques poils près, conforme aux derniers sondages ; Dolfi fit un minable discours insultant le vainqueur de juif franc-maçon, se déclarant fier d’avoir fait 3 points de plus qu’en 1933.
Le reste a peu d’importance ; Zweisteine voulait en rajouter, mais l’auteur refusa ces délires, acceptant cependant, juste pour lui faire un dernier plaisir, de ne les indiquer qu’en note[12]. On recommande au lecteur de ne pas la lire...
La Pérouse, juste après l’élection au Bundestag, avoua à nos deux larrons : « Je peux vous le dire maintenant, Zweisteine m’avait aussi confié la mission d’être votre ange-gardien, à Paris comme à Berlin, notre rencontre, à Paris comme à Berlin, fut programmée par lui ; entre autres, l’histoire du Canard enchaîné, c’était moi. Bref, tout s’explique ». « Il va nous entendre, ce coquin ! » répliquèrent Mickey et Charlot. Zweisteine s’était sans doute débranché, on n’entendit plus parler de lui, mais apparut brusquement un curieux photomontage, celui qui suit.
Agrandissement : Illustration 2
Enfin, on retrouva, par un beau matin de printemps où tous les oiseaux du coin gazouillaient, Dolfi pendu nu comme un ver à un petit arbre, à l’endroit même où il avait été incinéré après son suicide en 1945 et où il était revenu en 2011. À ses pieds poussaient de magnifiques mandragores, « l’herbe aux pendus qui revigore » comme le chantait Brassens. Dolfi était pétrifié et méconnaissable : le visage imberbe, sa moustache à la Charlie Chaplin ayant disparu, mais avec sa mèche pendant vers la droite quand on le regardait, et le phallus dressé vers le ciel, peut-être pour la première fois, et sans prépuce[13].
Notes
[1] Par exemple (d’où vient la citation):
https://fr.wikipedia.org/wiki/Troisi%C3%A8me_Reich
Aux élections législatives de novembre 1932, les Nazis n’eurent que 33 % des voix (et près de 34 % des sièges ; la proportionnelle est presque parfaite en sièges pour tous les partis) contre plus de 37 % à la précédente élection de juillet, la gauche désunie 37 % (dont 20,4 %, pour les socialistes du SPD et 18,9 % pour les communistes du KPD, ainsi au coude à coude) ; le parti du Centre, le Zentrum, ni à droite ni à gauche (et qui voulait tenter des ponts, souvent illustrés dans ses images de propagande, entre les partis hors extrêmes) près de 12 % ; le Parti populaire national allemand (de von Papen et Hugenberg) la droite « ordinaire » un peu plus de 8 %. Le président de la République de Weimar, le vieux maréchal von Hindenburg nomme, le 30 janvier 1933, Hitler Chancelier du Reich . Grâce à l’incendie du Reichstag (le parlement de Berlin) les nazis auront rapidement le pouvoir total ; voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Incendie_du_Reichstag
L’espoir de von Papen et Hindenburg d’installer un pantin provisoire aura raté…
Hitler ne mérite pas un article (horriblement long) de Wikipédia, mais les lecteurs si…
https://fr.wikipedia.org/wiki/Adolf_Hitler
Mais laissons là cette sombre Histoire pour se consacrer à cette uchronie plus ensoleillée.
[2] On pompe évidemment dans ces préliminaires le fameux bouquin, Il est de retour. On appellera souvent ici Hitler par le diminutif d’Adolf, Dolfi ; voir la nouvelle à chute de 1966 de Dino Buzzati, Poverino bambino ! (Pauvre petit garçon !) où l’on n’apprend qu’à la dernière ligne de la nouvelle que la mère d’un certain bambin nommé Dolfi se nommait Madame Hitler.
[3] Angela Maria dite « Geli » Raubal s’est en effet, dans l’Histoire, suicidée en 1931 dans l’appartement de Dolfi à Munich ; elle avait 23 ans. Sur internet, les curieux pourront savourer toutes les hypothèses concernant la vie sexuelle, s’il en eût (sauf perverse...) de Dolfi.
Voir aussi :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Geli_Raubal
On peut aussi s’enquérir d’une autre uchronie :
Insistons, et avec une photo de « Geli » :
https://allemagnenazie.wordpress.com/2022/01/02/hitler-et-les-femmes-episode-2-geli-raubal/
[4] Voir La part de l’autre d’Éric-Emanuel Schmitt (cité dans les préliminaires de cette uchronie) : Hitler végéta ainsi après, rappelons-le, avoir échoué deux fois au concours de l’école des Beaux-Arts de Vienne. Dans ce roman déjà cité qui se lit d’une traite, Schmitt assure que tout ce qu’il raconte sur Hitler est vérifié : il ne pénétra Eva Braun, sa maîtresse et future épouse qu’une seule fois ; quand il éjacula, il eut l’impression d’être incontinent, nous indique Schmitt…
[5] Banzaï signifie en effet en japonais dix mille ans (mais signifiait Vive l’empereur !) composé de ban (dix mille) et de zaï (ans d’âge).
[6] Un mot sur une autre aventure facho dans l’histoire, le mouvement du strasserisme, que Dolfi ne nous conte pas : la curieuse histoire assez méconnue de deux frères, Otto et Gregor Strasser. Otto, ancien social-démocrate jusqu’en 1920 alors que son frère Gregor fricotait déjà avec Hitler, se place à l’extrême gauche des nazis du NSDAP, voulant faire alliance avec les cocos, et avec Goebbels à l’époque (!) alors que son frère était toujours copain avec Hitler ; il quitte le parti en 1930 avec une poignée d’autres, et fonde Le Front noir (Die Schwarze Front, ou NSKD, National-sozialistische Kampfdemeinschaft Deutschlands que l’on peut traduire par Communauté de Combat national-socialiste d’Allemagne) estimant que l’idéal socialiste et l’anticapitalisme radical des débuts du mouvement nazi avaient été trahis, tout comme la ligne de révolution violente remplacée par la lutte légale qui réussit si bien à Hitler. Ce dernier interdit en 1933 le Front noir dont l’emblème était une dague ou épée et un marteau rouges en croix sur fond noir, ce qui aurait donné peut-être des idées à Dolfi... Mais rien d’anar chez Otto, plutôt corporatiste, sauf le drapeau noir orné de la dague plus guerrière que la faucille. Son frère Gregor fut liquidé dans la Nuit des Longs couteaux avec les SA de Röhm ; Otto, exilé au Canada à Montréal, crée en 1941 le Freie Deutschland Bewegung, sorte d’Allemagne libre, copie de la France libre de de Gaulle. Otto, retourné en Allemagne en 1956, se relança en politique avec le même drapeau, mais sans succès ; il mourut calmement en 1974 à 77 ans.
[7] Bien sûr, radotons, nos deux larrons ne se souvenaient de rien, ni de leurs nombreux Voyages dans le temps, ni de l’apparition de Zweisteine ; de rien du tout ! Et ils ne savaient pas que ce fut leur dernier orgasme avec Lou qu’ils ne reverraient jamais.
[8] Voir le bouquin de 2010, Dans les griffes de l’ours ! : lettres de prison et de déportation (1849-1861) écrites par Michel Bakounine, paru aux éditions les Nuits rouge, éditeur et préfacier Etienne Lesourd :
[9] Une version plus hard de cette uchronie était possible, mais nous l’avons abandonnée car même une uchronie ne peut être aussi délirante. Quoique celle de Laurent Binet (Civilisations, de 2019) où Christophe Colomb échoue en 1492 et où les Européens sont conquis par les Indiens d’Amérique ; voir :
https://www.babelio.com/livres/Binet-Civilizations/1147797/critiques?a=a¬e=5.0&pageN=5#!
On aurait pu ainsi envisager deux psychanalyses de Charlot et Mickey, couplées avec sérum de vérité, passées en parallèle dans une émission de télé réalité : chacun avouant ses rapports homosexuels torrides avec l’autre ; ce qui auraient beaucoup aidé à la séduction de Lou et surtout à leur évolution politique ayant conduit à l’accord des CoLibs…
[10] Il s’agit de L’Alliance Sahra Wagenknecht - Pour la raison et la justice (Bündnis Sahra Wagenknecht - Für Vernunft und Gerechtigkeit, abrégé en BSW). Sahra Wagenknecht, d’origine de RDA, une sorte de petite Rosa Luxemburg, est devenue, en sortant du parti socialiste radical Die Linke (La Gauche) elle-même sortie du SPD, une sorte de Mélenchone allemande, mais anti-immigration, comme l’AfD et autres aspects sociaux très conservateurs sinon franchement réacs ; on peut se demander quelle aurait été sa position en 2033… Voir :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Alliance_Sahra_Wagenknecht_-_Pour_la_raison_et_la_justice
[11] J’ai honte décrire ces lignes, note le narrateur ; mais en fait pas tant que ça…
[12] Poutine meurt juste après les élections allemandes au Bundestag ; peut-être, selon des rumeurs, assassiné par un certain Rasepoutine, son médecin qui soignait avec talent son hémophilie et remplaça un jour son médicament par de l’aspirine à haute dose ; rumeurs qui ne furent jamais confirmées sauf par le correspondant à Moscou de Médiapart, Edwy Plenel qui prenait de l’âge mais ne décrochait pas, et jura que ses sources étaient fiables (mais que l’on pouvait être trompé). La guerre en Ukraine continuait son petit bonhomme de chemin, bien que Donald Trump qui avait juré en 2024 de la finir en une seule journée, continuait vainement ses efforts à la fin de son mandat, en 2028. Quelques bombes atomiques furent utilisées de part et d’autres, mais la raison reprit ses droits à la demande du Pape, qui avait changé (un Africain tout noir, un certain Mamadou Diollo) et de l’ONU. En France, avec le Président Laurent Berger avec comme Vice-présidente Marine Tondelier qui furent élus en 2027, peu de choses changèrent, mais la réforme des retraites fut enfin supprimée en 2029 après deux ans de lutte à l’Assemblée nationale où la proportionnelle entraina des compromis infinis ; le SMIC fut augmenté de 5 % par an, juste comme l’inflation ; seuls les impôts des riches touchant plus de 10 000 euros par mois trinquèrent un peu. Le ticket repiqua pour un second mandat en 2032 mais en inversant les rôles. Trump fut battu en novembre 2028 par Michelle Obama, et à plate couture ! Le Grand Israël s’était formée en 2030, après une longue guerre d’usure, en absorbant le Liban, Gaza et les autres « territoires » palestiniens, une partie du Sinaï et la Nouvelle Syrie qui avait changé fin 2024 ; ce qui fut condamné par l’ONU et le nouveau pape. Seule le régime iranien devenu plus progressiste, les femmes n’étant plus voilées depuis 2028, à la demande de Marine Tondelier, réagit un peu plus vivement en envoyant quelques bombes H tactiques ; évidemment avec répliques mesurées d’Israël. Il n’y eut que quelques millions de morts de chaque côté, mais on sut ensuite raison garder.
Mais revenons à nos moutons. La Révolution spartakiste éclata en Allemagne en 2034, après un coup d’État des Services allemands, infiltrés par les Services russes, qui faillit tuer Charlot ; mais ce dernier qui avait acheté aux enchères la Kalachnikov offerte en 1972 par Fidel Castro à Salvador Allende, se défendit vaillamment, aidé par Mickey qui n’avait pourtant, ce jour-là, qu’un tromblon. Ce coup d’État d’opérette fut un fiasco, pas la Révolution qui suivit. Au même moment, après le décès de Poutine un an avant, la même révolution spartakiste eut lieu en Russie : les soldats se révoltant contre la boucherie où Poutine les avait envoyés et qui continuait de plus belle et où l’armée russe, malgré l’aide de plus en plus évidente de la Corée du Nord, n’avait progressé que de 3 km vers l’ouest du Donbass. Même révolution spartakiste en RPDC coréenne, alimentée par ceux qui revenaient de Russie. En Russie, Mickey y fut d’ailleurs pour quelque chose et devint même le premier Commissaire du peuple, mandat tournant tous les 6 mois ; il avait retrouvé sa jeunesse et de nouvelles amours, mais il n’en profita pas bien longtemps, mourant, comme programmé par sa vraie vie ; rappelons qu’il disparut en 1876, un an avant son dernier départ pour son dernier voyage. Charlot qui était peu friand des coups de feu (les seuls qu’il eût jamais donnés le furent avec l’AK 47 d’Allende) s’éteignit en 2041 ; il regretta ainsi longtemps sa Lou et sa friterie de Bruxelles où il ne pouvait retourner, évidemment. Rappelons qu’il finit sa vraie vie Historique en Allemagne du XIXe siècle, en 1883.
Deux Républiques des coLibs venaient donc de s’installer en Europe, saluées par la plupart des pays du monde, sauf en RPDC où la fille de Kim Jong-un avait pris le pouvoir en fusillant sévèrement son père et en réprimant la Révolution (éphémère) des Conseils de Corée, et en Chine où Xi Jinping venait de souhaité ses 80 printemps et allait attaquer Taïwan.
[13] Hitler était donc (du moins dans cette uchronie...) un nazi sans prépuce ; toutefois, on peut être sans prépuce et pas juif. La longue histoire de l’éventuelle judéité d’Hitler va clore ce dernier Voyage. Voir, entre autres :
https://fr.wikipedia.org/wiki/G%C3%A9n%C3%A9alogie_d%27Adolf_Hitler