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Billet de blog 16 mars 2011

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Le Pen prolétariat

Les sondages n'existaient pas en 1845 lorsque Marx et Engels «inventèrent» in «L'idéologie Allemande», l'expression «lumpenproletariat» ou «prolétariat en haillons» ou «sous-prolétariat», pour qualifier ce groupe déshérité occupant le plus bas niveau de l'échelle sociale, mais aussi (et surtout) dépourvu de la moindre conscience politique, donc singulièrement réceptif aux discours populistes d'où qu'ils viennent.

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Les sondages n'existaient pas en 1845 lorsque Marx et Engels «inventèrent» in «L'idéologie Allemande», l'expression «lumpenproletariat» ou «prolétariat en haillons» ou «sous-prolétariat», pour qualifier ce groupe déshérité occupant le plus bas niveau de l'échelle sociale, mais aussi (et surtout) dépourvu de la moindre conscience politique, donc singulièrement réceptif aux discours populistes d'où qu'ils viennent. Tel qu'il apparait dans la France de 2011 au travers des récentes enquêtes d'opinion faisant la part belle à la Présidente du Front National, appelons-le au sens large "Le Pen prolétariat", moins par stricte localisation sociale que par son absence de conscience politique, dénominateur commun de cette sclérose, transversale de trois classes sociales: le lumpen, le prolétariat (ouvriers et employés) et la "classe moyenne" dont les contours sociaux et idéologiques restent flous. Ce petit peuple sans Histoire (il n'a jamais pu, ni su forger la sienne) est une sorte de plancton (du grec plagkton... qui erre) social et politique, porté et balloté de ci de là par les houles et les courants d'affects du moment, dont chaque élément ou unité n'existe que par rapport à lui-même, sans le moindre apprentissage au collectif. Karl M. et Friedrich E. , défenseurs devant l'éternel de l'opprimé, théoriciens de la révolution prolétarienne -donc insoupçonnables du moindre ressentiment envers les plus défavorisés- ne s'y sont pourtant pas trompés qui dans le même ouvrage, mettaient sévèrement en garde contre ce "sous-prolétariat" qui de par la vacuité de sa pensée politique, pouvait constituer une formidable manne et force d'appoint pour la bourgeoisie, dans la guerre (froide ou chaude) de classes. Qu'en est-il aujourd'hui dans la République (ou ce qu'il en reste) sarkozienne ? "Le paysan ou le boutiquier inculte, s'il se trouve entre deux feux, sans comprendre les causes et la portée du combat engagé entre le prolétariat et la bourgeoisie, considère les deux partis en présence avec une haine égale…" ("Leur morale et la nôtre" - Trotsky- 1938) Nulle intention ici de stigmatiser le travailleur de la terre ou le commerçant de la France de 2011, mais l'image prise par l'auteur de la "Révolution permanente", à quelques retouches près, colle bien à ce marais trans-classes, sans éthique, sans culture, sans pensée, à la recherche d'une improbable identité dans le rejet de l'autre, que cet alter soit député de souche franco-française (anti-parlementaisme lambda) ou immigré sans papiers d'Afrique sub-saharienne. Ce marais qui proclame (selon les sondages) son intention de porter ses suffrages en 2012 sur Marine Le Pen, est moins d'extrême-droite (selon la définition classique et historique qu'il ignore souvent ainsi que son cortège de malheurs) que très pauvre, voire misérable… en pensées. Si ces "fachos putatifs" n'ont rien de commun avec Maurras, ils n'ont pas plus d'affinités idéologiques avec Gollnisch, Faurisson ou Mégret qui peuplent l'obscur magasin dont la fille Le Pen n'est que la vitrine éclairée, soi-disant présentable et politiquement correcte. Dreyfus et Zola…connaît pas ! Mais les voici fabriqués, constitués, bétonnés -à leur insu- en force politique à tout le moins médiatique, grâce -en aucun cas au travail militant de propagande du simple FN, mais- à l'actuelle gouvernance de la République Française et à celui que 53% de ce peuple en grave régression républicaine, a porté au sommet de l'exécutif en 2007. Profit contre Service public dans toutes ses composantes, ploutocratie contre classe ouvrière en col bleu ou blanc et classe moyenne, stigmatisation de l'étranger dans toutes ses déclinaisons culturelles, sociales, ethniques et religieuses, flics mués en milice privée contre grévistes et manifestants, royaume des interdictions diverses et avariées, parade des transfuges et apostats politiques, affairistes "bling-bling" et patrons délocalisateurs, propriétaires immobiliers intouchables et intouchés, pseudo-intellectuels ou philosophes chiens de garde de la bourgeoisie la plus médiocre qu'il nous ait été de connaître depuis le règne de Napoléon le Petit... Alors, extrême-droite ou droite républicaine au pouvoir aujourd'hui en France? Démocratie autoritaire ultra-libérale ou République Sociale ? Intelligence solidaire ou imbécillité crasse, malhonnête et criminelle ? Même s'il convient de ne pas le négliger et évidemment de l'écraser, le syndrome Le Pen n'est autre que la métastase d'un même cancer qui ronge depuis près de quatre années les institutions de la République. Pour autant, cette tentative d'analyse concrète d'une situation concrète, ne se veut en aucun cas un catalogue de circonstances atténuantes à verser à la défense du "Le Pen prolétariat". Les votes FN sont à combattre d'où qu'ils viennent… Les votes Sarkozy aussi qui ont engendré, porté, nourri et engraissé la bête immonde. Patrick Gabriel (Publiciste) Paris

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