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Billet de blog 11 août 2022

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Votre résidence secondaire squattée?

Si votre résidence secondaire est squattée sachez que la législation est plus favorable au squatteur qu'au propriétaire. Vous ne récupérerez votre bien que d'ici 24 mois, en admettant que vous ayez un bon avocat. Alors installez une caméra discrète et surveillez votre bien. Car si le délai ne dépasse pas 48 heures, c'est du "flagrant délit" et la police peut, en principe, intervenir.

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Votre résidence secondaire squattée?

Il y a 3 millions de résidences secondaires en France. Si vous êtes un français moyen, bon citoyen par ailleurs, et que votre résidence secondaire est squattée, il vous faudra en moyenne deux ans pour récupérer votre bien, et dans quel état ! Votre avocat devra saisir le Tribunal d'Instance de votre domicile. Si une décision d'expulsion est décrétée, il vous faudra attendre deux mois encore. Et solliciter ensuite auprès de la préfecture du département le concours de la force publique, laquelle n'est pas automatique et peut prendre jusqu'à six mois.

Si vous décidez de récupérer votre bien par vos propres moyens - avec l'aide de vos copains ou de policiers solidaires - vous risquez une peine de trois ans de prison et 30 000 euros d'amende (loi du 24 mars 2014). Le squatteur, lui, risque au maximum selon la législation, 8 mois de prison et 14 000 euros de "dédommagement", même s'il a totalement dévasté votre résidence secondaire. Et obtenir 14 000 euros d'un squatteur, il vous faudra être patient ou crédule.

Si vous êtes un étranger fortuné, même absent, les forces de police se chargeront, une fois alertées, de mettre dehors les squatteurs manu militari

1/ En avril 2021, le propriétaire, un vieux papy à la retraite, est tombé dans l'escalier de sa petite villa située dans une rue tranquille du parc Robiony, à l'ouest de la ville de Nice. Sa fille qui habitait à l'étage l'a secouru et l'a placé dans une maison de retraite en y demeurant quelques jours avec lui. A son retour, la maison est squattée et les squatteurs - des russes, des SDF et un mendiant qui fait la manche chaque soir devant le Casino - occupent la maison et la menacent. Elle part dans un hôtel et porte plainte. Les voisins confrontés au tapage nocturne des nouveaux occupants, aux déchets qui s'amoncellent, à la puanteur qui règne se solidarisent des victimes et portent plainte. D'autant que les cambriolages se multiplient dans les maisons avoisinantes. La police nationale, la police municipale, la cellule squad de la mairie, le quotidien régional, Nice-Matin, sont alertés. Rien n'y fait. Les persiennes de la maison sont arrachées, les portes béantes, le jardin jonché de détritus. La justice exige du vieux papy qu'il vienne en personne porter plainte mais sa fille craint que la nouvelle de cet incident lui soit fatale.

Au lendemain de la publication d'un article dans le Nice-Matin, le député des Alpes maritimes (LR), Eric Ciotti, se rend sur les lieux avec une collègue de la même formation politique, en signe de solidarité. Il est naturellement scandalisé par l'état de la maison et par l'inopérance des pouvoirs publics. Il s'agit d'une résidence principale. Rien n'y fait. L'adjoint au maire de Nice, pour les questions de sécurité, Anthony Borré, au lieu d'admettre son impuissance et saluer le geste de solidarité du député, déclare selon le quotidien Nice Matin en date du 1er août que la Ville apporte "depuis six mois" une" aide psychologique" à la fille du propriétaire. Il menace le député des Alpes Maritimes de poursuites pour " violation de domicile"! Je cite: "Celui qui se dit expert en matière de sécurité ne sait donc pas que ce qu'il vient de faire est illégal et s'appelle une violation de domicile".

Eric Ciotti et le maire de Nice, Christian Estrosi (LREM après avoir été LR et, depuis peu, rallié à l'ancien premier Ministre Edouard Philippe) sont devenus des adversaires politiques. Dont acte. Mais la réaction outragée et le soutien apporté à Eric Ciotti aux victimes de ce squatt sont évidemment partagés par l'ensemble de la population niçoise. Ce qui ne convient pas au maire. Pour ne pas perdre la une du journal local, il annonce le lendemain que les "squatteurs du port" seront " tous évacués dans un délai de 48 heures"...Les "squatteurs du port" sont en réalité des immigrés qui campent précairement sous la digue du port. Cela n'a rien à voir avec un citoyen niçois dont la résidence principale est squattée et saccagée depuis six mois sans que les services de police et la justice n'éprouvent le besoin d'intervenir.

2/ En août 2020, un retraité lyonnais, Henri Kaloustian (75 ans) et son épouse découvrent que leur maison de Théoule-sur-mer, achetée dans les années 80, est squattée par un couple avec leurs deux enfants en bas âge (7 mois et 18 mois). La femme est enceinte. Les propriétaires portent plainte. Mais ils doivent pour cela fournir l'identité exacte d'au moins un occupant sans droit ni titre dans sa maison. L'huissier de justice mandaté et payé par eux n'a pas le droit de pénétrer dans la maison car il s'agit du "domicile privé de l'occupant sans droit ni titre"! Les squatteurs ont changé les serrures et le contrat d'électricité.

Le maire de Théoule, Georges Botella, scandalisé par cette affaire, saisit l'absence temporaire des squatteurs pour, à l'aide de policiers municipaux, permettre au couple Kaloustian de réintégrer leur maison le 1er septembre. Une odeur pestilentielle règne dans la maison, pleine de poubelles et de détritus. Alors que la question semblait en partie réglée, sur ordre de la procureure de la République de Grasse, Fabienne Atzori, le couple de propriétaires se voient expulsés de leur propre maison et les squatteurs sont réinstallés.

M. et Mme Kaloustian n'ont pu entrer à nouveau dans leur maison, non pas sur décision judiciaire, mais grâce à un appel des voisins au commissariat de police qui signale des cris de femme battue dans la maison squattée. Les policiers interviennent: l'homme est arrêté et déféré au parquet, l'épouse agressée et ses deux enfants sont accueillis dans un foyer.

3/ En mai 2022, deux couples d'Ukrainiens squattent pendant quelques jours une résidence luxueuse, dans le quartier chic du Mont Boron (rue Germaine),appartenant à des russes absents. Un ami du propriétaire russe alerte la police. Les Ukrainiens sont arrêtés dans les 24 heures, inculpés et déférés au parquet. Il a fallu moins de quatre jours à la police française pour expulser et arrêter ces squatteurs. Le propriétaire russe n''était toujours pas rentré de Russie.

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