patrick rodel

Abonné·e de Mediapart

533 Billets

6 Éditions

Billet de blog 2 avril 2008

patrick rodel

Abonné·e de Mediapart

de quoi Sarkozy est-il le nom?

patrick rodel

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Alain Badiou dirige un séminaire à l'ENS Ulm. C'est dans ce cadre qu'en 2007 il commente la campagne électorale et l'élection présidentielle. Cela nous vaut un petit livre au succès inattendu mais qui est la preuve qu'on pense encore philosophiquement dans notre pays - ce qui semble en agacer plus d'un qui se serait contenté d'un électroencéphalogramme plat comme celui d'un philosophe sarkozyste -. Une pensée qui se moque du politiquement correct.

L'antiparlementarisme de Badiou fait partie de ses thèmes de prédilection. On peut ne pas être d'accord avec lui, mais les parlementaires, à l'heure acuelle, ne sont pas dans une position très favorable pour défendre leur job (Cf. la façon dont certains sénateurs se sont fait défenseurs acharnés des intérêts des semenciers ou encore ont entretenu avec l'union des métalurigistes des liens pour le moins contestables). Sa critique de la droite va de soi. Sarkozy achève ce qui pouvait rester du gaullisme (Cf. les relations avec l'Otan) et fonce - et s'enfonce - dans les délires néo-libéraux dont on voit les méfaits. Sa critique de la gauche met le doigt où ça fait mal : elle s'est condamnée à partir du moment où elle a accepté d'entrer sur le terrain même de la droite - sous couvert de modernisme - en prétendant même qu'elle y serait meilleure. Il n'est pas jusqu'au tic dont Badiou n'a jamais pu se passer : citer à tout bout de champ les platitudes de Mao comme s'il s'agissait des sommets de la réflexion humaine, qui ne puisse apparaitre rafraîchissante en ces temps où il est de bon ton de cracher sur mai 68.

La thèse de Badiou est que Sarkozy a été porté au pouvoir par les tenants de cette "tradition nationale" qu'est le pétainisme dont le fondement (bien avant Pétain) est le désir réactionnaire de restauration, de retour à l'ordre régénérateur face à une prétendue décadence de la France (Cf. la rhétorique de la rupture qui se targue de "désorienter" les clivages politiques habituels et la pratique de "l'ouverture" qui n'est jamais que la chasse aux ambitieux aigris qu'on trouve toujours prêts à trahir pour quelques gratifications), de soumission aux modèles étrangers qui sont censés avoir réussi à régler les problèmes dans lesquels nous sommes accusés de nous complaire par pur archaïsme et de rejet des populations étrangères immigrées.Faire du pétainisme une catégorie de la philosophie politique peut surprendre. Henri Guillemin ne disait pas autre chose dans Nationalistes et nationaux (1870-1940) : il y a une constante qu'on retrouve au long de notre histoire et que Mauriac formulait ainsi :"il y a une donnée permanente de notre histoire, une sorte d'émigration à l'intérieur qui ne s'interrompra jamais : ce sont les collaborateurs éternels." (Bloc-notes du 25 septembre 1954)

Qu'est-ce que Badiou attend qui permettrait de sortir de ce marécage ? une résurgence de l'hypothèse communiste qui serait affranchie des déviations criminelles du passé - c'est cela qui explique en partie la haine que suscite Badiou (Cf. sur ce point les deux billets d'Assouline sur son blog ; et également le livre extrêmement déplaisant d'Eric Marty, Une querelle avec Alain Badiou, philosophe, qui est plutôt un appel à enfermer au plus vite ce psychopate de Badiou) ? mais en attendant, du courage pour résister à la peur manipulatrice, "une morale provisoire pour n'être ni déprimés ni rats par gros temps sarkozyen."

Pour ma part, j'ajouterai la ferme résolution de ne plus lire un seul sondage. Badiou n'est pas contre une telle idée. Mais il lui arrive d'affirmer "les sondages attestent..." : c'est curieux comme on peut soudain trouver des vertus aux sondages (donc aux instituts de sodage..) que, par ailleurs, on voue aux gémonies, seulement parce qu'un de leurs éléments semble venir valider notre thèse. Les sondages d'opinion sont une telle manipulation des citoyens que nous sommes, que je me demande comment on peut encore leur faire crédit, si peu que ce soit.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.