"La police a pour tâche d'assurer la paix publique et la sécurité de chacun d'entre nous (...Entre la police et es libertés ne s'élève aucun conflit de principe, au contraire. Dans toute société organisée, la police est nécessaire au respect des libertés.
Mais en France, et dans beaucoup d'Etats modernes, la police est détournée de sa fonction. Elle a d'abord reçu, par commodité, à raison de circonstances exceptionnelles, ou par l'effet irrésistible de la concentration des tâches, des missions qui ne lui appartenaient pas (...) Ensuite, et parce que la police, service public d'exécution , est confiée au pouvoir exécutif, celui-ci en profite pour lui assigner des missions politiques. Le maintien de l'ordre sert de prétexte pour faire de la police un instrument de répression. Le renseignement, l'infiltration, la surveillance permettent au pouvoir, confisquant la police à son profit, de se renforcer ou de se maintenir.
Les résultats sont détestables. D'abord parce que, sous couvert des activités policières, les gouvernements organisent - ou tolèrent - des atteintes flagrantes aux libertés et aux droits : arrestations arbitraires, détentions illégales, interrogatoires "vigoureux". Ensuite parce que les gouvernements exploitent la police, ils font en sorte que les activités de police soient couvertes d'une immunité de fait, sinon de droit. Enfin parce que ces pratiques dressent les citoyens contre la police et la police contre les citoyens. Le policier prend le vissage de l'arbitraire et de la répression. Les libertés sont présentées à la police comme des licences, des procédés de désorganisation du corps social. La police se replie sur elle-même, à l'écart de la communauté nationale : organisation isolée , humiliée, méfiante.
Il est temps de rendre à la police ses missions et d'empêcher qu'elle soit dévoyée par le Gouvernement. "
Ce texte a paru en 1976.