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Billet de blog 10 février 2023

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Mascarade à l'Académie

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

                   Je n'ajouterai rien à l'enquête exemplaire menée par Ludovic Lamant sur Vargas Llosa. Si l'écrivain est grand, l'homme politique est infréquentable, c'est une évidence.Mais pas pour les académiciens français, ou en tout cas une majorité d'entre eux qui l'ont élu .Une chose cependant. J'ai regardé la retransmission sur Youtube de son discours de présentation à l'Académie française - non par masochisme, mais parce qu'il était élu au fauteuil de Michel Serres et que je me demandais ce qu'il allait pouvoir dire sur quelqu'un qui représentait tant de choses qu'il détestait. La coutume veut que l'on fasse l'éloge de son prédécesseur - à moins que sur ce point le règlement de l'Académie ait changé ou qu'on ait fait une exception pour Vargas Llosa une autre exception - il n'a écrit aucun livre en français et il a largement dépassé l'âge limite pour être élu ; mais cela ne compte visiblement guère aux yeux des académiciens.

                     Pour ce qui est de l'éloge, je n'ai pas été déçu. Sur un discours qui a duré plus d'une heure et qu'il était difficile  de suivre tant la lecture de Vargas Llosa était cahotique et très souvent fautive. Pas de sa faute, bien sûr, l'on sait que la langue espagnole est une de celles dont l'échelle phonématique est la plus réduite- d'où la difficulté, pour les Espagnols de prononcer un certain nombre de phonèmes français - ce n'est pas en soi escandaleux, comme beaucoup disent !!! Je ne reprocherai certainement à personne son accent. Mais les fautes de grammaire et de liaisons étaient nombreuses et pour un académicien , ça la fout mal, quand même. Passons, la version écrite sera corrigée, c'est certain.Sur un discours qui a duré plus d'une heure, donc, le temps passé à parler de Serres et de son oeuvre n'a guère dépassé les vingt minutes. Quelques banalités, quelques amabilités - "délirant", "irrationnel" - ; des ignorances patentes - dire du livre de Serres sur La Fontaine qu'il est le dernier qu'il ait écrit est une sottise, c'est un ouvrage posthume construit à partir de cours professés par Serres et des nombreux articles qu'il a consacrés à à La Fontaine  ; des citations tirées de leur contexte qu'il ne cherchait même pas à expliquer, qu'il ne comprenait visiblement pas, mais qu'il utilisait pour montrer combien la pensée de Serres était emberlificotée ; des affirmations péremptoires : Serres ne s'est jamais intéressé aux romans - première nouvelle ! Verne, Zola, Maupassant, Steinbeck....,. Le reste à l'avenant. Je n'attendais pas grand chose de ce discours, je pensais même que Vargas Llosa aurait le bon goût de se faire aider par quelqu'un qui lui aurait évité de dire trop de bêtises sur un philosophe qu'il n'est pas tenu de connaître à fond. Mais non, comme un grand garçon, tout seul il l'a écrit, et tant pis si, trop vieux pour relire l'oeuvre entière de Serres, il s'est affranchi des règles de la plus élémentaire des courtoisies.  

                     Le reste du discours était un éloge que j'ai jugé banal et brouillon de la littérature française - "hors sujet" aurais-je mis en marge de ce pensum si j'avais eu à le corriger.

                     L'Académie a de nouveau un Prix Nobel dans ses rangs. Je doute qu'elle en sorte grandie.

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