"Risque", le mot ne manque pas d'intérêt. Son étymologie est discutée. Il viendrait du latin "resecare" qui signifie "enlever en coupant" . En français le verbe "réséquer" est présent dans ce sens, il dérive du latin "secare" (qui donne entre autres, "scier" - la branche sur laquelle on est assis...) ; il a le sens d'"ôter", "enlever", "biffer", "retrancher quelqu'un d'une société" (peut-être ceux qui ne font pas partie du champ républicain...), "couper l'herbe"( sous les pieds de qui, cela reste en suspens...). Il paraît que ces sens ont disparu pour ne laisser la place qu'à une acception chirurgicale. C'est bien dommage.
Revenons à notre "risque" auquel a été associé le sens d'écueil - on parle du risque que court une marchandise en mer, elle peut se briser sur un écueil, disparaître dans les profondeurs, boire la tasse, en un mot. J'aime bien ce champ sémantique même si les spécialistes doutent beaucoup de ce que l'un d'entre eux appelle "un roman nautique". Plus platement, on utilise le mot pour désigner l'éventualité d'un événement futur, soit incertain, soit d'un terme indéterminé qui causera un dommage. "Se risquer" c'est s'exposer à un danger, à un inconvénient possible, à l'éventualité d'une perte.
Comment dès lors peut-on avoir le goût du risque, le goût de se mettre en danger, "à ses risques et périls" ? Question de caractère, dira-t-on - après tout il y a des gens qui ont le goût des expériences extrêmes - zut, les extrêmes reviennent, dont on voulait justement se débarrasser. Mais, bon, admettons, il y a là un pari - les gens qui pensent avoir de la culture parleront du pari pascalien : sans comprendre que Pascal ne parie pas lui, il propose au libertin de parier, pour ce qui est de lui il est sûr de son fait, il est sur de sa foi.
Mais alors, une décision politique, comme celle que Macron vient de prendre, et qui est en contradiction formelle avec l'esprit même de la démocratie (faire du résultat d'élections européennes un usage purement intérieur) relève d'un jeu, un peu fou, certes, mais pourquoi pas ? Après tout, s'il ne s'agit que d'un risque qu'il court pour lui-même - celui de se ridiculiser, celui d'apparaître comme un gamin qui veut absolument jouer dans la cour des grands - c'est son problème. Le fait est qu'il ne risque pas grand chose, lui, il conservera son traitement, son palais élyséen, une bouffe correcte, des voyages tout frais payé, plus deux ou trois résidences secondaires, quoi qu'il arrive. Mais les autres, je ne parle pas de ses ministres, mais d'une immense majorité de français qui vont payer cher, très cher, le risque pris par cet irresponsable censé les gouverner ? il s'en fout complètement, c'est évident. Il leur fait courir des risques dont ils vont souffrir, plus encore qu'ils ne souffrent des effets de sa politique.
Il y a quand même une sacrée différence entre "se" risquer et faire courir des risques à d'autres.