Qui aura le courage de revenir sur cette aberration que sont les informations en continu ? Je ne prends pour exemple que Franceinfo, mais il est évident que cela peut être pire sur les chaînes de télé. Toutes les 10 minutes : rappel des titres, tous les quarts d'heure journal complet. Entre temps, des enquêtes plus complètes et qui ne manquent pas d'intérêt ou des entretiens avec des hommes politiques, avec des experts, mais qui sont interrompus par le sacro-saint"flash" qui se donne le ridicule de répéter un fragment des propos tenus juste avant par l'interviewé. La réflexion prend du temps mais l'actualité n'attend pas.
Ce qui frappe l'auditeur, c'est, avant tout, la répétition de la même info , sans véritable commentaire -, des infos qui n'ont pas le même intérêt ou qui n'ont d'intérêt que pour un nombre très réduit d'auditeurs. Est-il nécessaire au commun des mortels de suivre les cours de la Bourse ? Est-il nécessaire d'avoir un bulletin météo, qui se trompe assez régulièrement, alors qu'il suffit d'ouvrir la fenêtre pour savoir le temps qu'il fait ?
L'urgence du direct entraîne des absurdités pénibles comme les propos vides des envoyés spéciaux que l'on interroge pour savoir si tel ou tel est entré ou sorti de l'Elysée : non , il n'est pas entré, non, il n'est pas encore sorti, écran blanc ! il ne se passe rien, mais on cause quand même. Plus pénible encore, la surdité de certains journalistes qui répètent, comme si de rien n'était, une question à laquelle l'interviewé a déjà répondu ou à laquelle il a dit qu'il n'était pas en mesure de répondre - sur le cyclone qui a dévasté Mayotte, le comble de l'indécence, combien de morts ? comment vous ne savez pas ? mais pourquoi ? qu'est-ce que vous faîtes ? Qu'est-ce que vous ressentez ? vous dites que les secours ne peuvent circuler puisque les infrastructures sont détruites, - mais j'entends des sirènes, ce sont donc des ambulance qui circulent, dit le journaliste, comme si le journaliste pensait que le préfet racontait des blagues. Et le tout à l'avenant.
Avoir du recul, prendre le temps de vérifier les infos que l'on balance et ne pas croire au fait brut dont le ressassement alimente tous les fantasmes des complotistes, ne pas céder à la facilité du micro-trottoir - il y a eu une explosion ; qu'avez-vous ressenti ? oui, j'ai entendu, çà a fait beaucoup de bruit. Et puis ? rien d'autre.
Trop de bruit. Trop plein d'infos dont on peine à saisir le sens. Trop de détails mis sur le même plan que des questions de fond. Et l'on s'étonne du brouillard dans lequel tant de gens se perdent.