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Billet de blog 21 juillet 2009

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A propos de la doctrine sociale de l'Eglise

Voici bientôt quinze jours que Benoît XVI a publié une encyclique consacrée à la doctrine sociale de l'Eglise. A part La Croix qui l'a publiée intégralement, le reste de la presse ne se dépêche pas d'en rendre compte.

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Voici bientôt quinze jours que Benoît XVI a publié une encyclique consacrée à la doctrine sociale de l'Eglise. A part La Croix qui l'a publiée intégralement, le reste de la presse ne se dépêche pas d'en rendre compte. Il est vrai qu'un texte dense - 6 chapitres, 76 paragraphes, une page entière de références...- réclame un certain temps pour qu'on puisse le déchiffrer, le décrypter et qu'on tente d'en évaluer l'importance, en cette période précise de crise. Il y a fort à parier que si le Pape avait prononcé une petite phrase sur le préservatif ou sur le mariage des prêtres, cela aurait déclenché une avalanche de commentaires.L'encyclique ne se laisse pas résumer en une petite phrase. Ceci explique peut-être cela.

Je vais en retenir quelques points.

Ce texte se situe, très clairement, dans une tradition qui commence avec l'encyclique Rerum novarum de Léon XIII (1891), mais qui tire son origine des Pères de l'Eglise. Cette tradition, qui a subi quelques éclipses (c'est un euphémisme pour désigner toutes les périodes où l'Eglise n'a rien trouvé à redire à l'organisation socio-économique de nos sociétés - c'est un point sur lequel Benoît XVI est d'une discrétion absolue) a connu au XX° siècle un renouveau assez remarquable avec Paul VI (encyclique Populorum progressio que B.XVI cite abondamment) et Jean-Paul II .

De ce dernier, on a retenu essentiellement le combat qu'il a mené contre le marxisme, dans sa version soviétique et stalinienne, mais on a oublié que sa critique de l'idéologie marxiste était assortie d'une critique extrêmement virulente contre le capitalisme et ses dérives. B.XVI et les experts qui ont travaillé sur "Caritas in veritate", "la charité dans la vérité", dressent un constat sans complaisance de l'état actuel de nos sociétés, des dérives criminelles qu'un capitalisme sans frein, une finance fondée sur la recherche du profit immédiat de quelques uns plutôt que du bénéfice du plus grand nombre, ont engendrées - les analyses sont précises et couvrent l'ensemble des problèmes dont nous souffrons, de l'individu au groupe, de l'humanité au monde même dans lequel elle vit ; elles dénoncent en des termes qui rappellent étrangement ceux du jeune Marx, du Marx philosophe dont Althusser disait qu'il n'était pas marxiste, l'aliénation à laquelle une partie immense de l'humanité se trouve réduite par le fait d'une inégalité insupportable entre les hommes au sein d'une même société, entre les sociétés elles-mêmes. Ce constat qui était déjà celui de Paul VI, se trouve singulièrement assombri par la crise actuelle qui démontre l'incapacité dans laquelle se trouvent la logique libérale et ceux qui la défendent de réparer les méfaits qu'ils ont eux-mêmes engendrés ; à l'époque de Pau VI, on pouvait encore croire qu'une auto-régulation du capitalisme était possible, nous ne pouvons plus le croire maintenant.

Au centre de ce texte, le "développement". "Toute l'Eglise, dans son être et dans son agir, tend à promouvoir le développement intégral de l'homme quand elle annonce, célèbre et oeuvre dans la charité." Evidemment, il ne s'agit pas de ce développement uniquement économique dont nous voyons l'échec dramatique. Il s'agit du développement de tous les hommes (contre l'exclusion, la Les dirigeants du monde voudront-ils simplement corriger ce système de voracité - en vain - ou sont-ils prêts à engager une sortie définitive ?" - mais j'ai dû me tromper...Pourtant, le mot d'"émancipation" vient naturellement sous la plume de B.XVI, ce qui est fort proche de "libération" !

Ceux qui sont rétifs devant l'affirmation répétée d'une loi naturelle, devant la condamnation renouvelée du relativisme au nom d'une exigence d'Absolu seule capable de mettre un terme à la folie auto-suffisante de l'homme tordront sûrement le nez - qu'ils aient néanmoins l'honnêteté intellectuelle d'aller lire ce texte -. Ceux qui ne voient pas l'enjeu de l'alliance réclamée entre foi et raison qui est un des thèmes favoris de B.XVI, resteront à l'orée de son appel à restaurer les droits de la raison (dans un monde profondément marqué par la vacuité et l'absence du sens) tout en l'éclairant de la lumière de la foi en un Dieu transcendant - mais qu'ils lisent quand même ce texte et peut-être comprendront-ils que si le PS était foutu d'en proposer un semblable au pays, nous pourrions espérer sortir de la merde dans laquelle nous nous enfonçons !!!

Bien d'autres thèmes sont abordés dans ce texte, certains sont discutables, je n'ai retenu que ce qui a trait à la doctrine sociale de l'Eglise et qui apparait, à l'heure actuelle, comme une (sinon, la) sortie de la crise

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